Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 5 août 2020, Mme D... C... épouse B..., représentée par Me Ruffel, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 27 novembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 juin 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a notamment refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet et sérieux de sa demande de titre de séjour ;
- l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus ;
- l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant a été méconnu.
Une décision du 26 juin 2020 accorde l'aide juridictionnelle totale à Mme C....
Par un mémoire enregistré le 27 janvier 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Le préfet soutient que les moyens de la requérante sont infondés.
Une ordonnance du 9 juin 2021 fixe la clôture de l'instruction au 25 juin 2021 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Ury.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... épouse B..., née en 1966, ressortissante marocaine, est entrée en France selon ses déclarations en 2001. Elle a fait l'objet le 28 juin 2004 d'un arrêté portant refus de séjour ainsi que le 15 juillet 2004 d'une décision portant obligation de quitter le territoire national, et successivement le 24 septembre 2008 et le 17 janvier 2011 de deux décisions portant refus de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français. Par une décision n° 13MA05083 du 8 octobre 2015, la présente Cour a rejeté la requête de Mme C... contre le jugement n° 1301660 du 17 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 12 janvier 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à destination du Maroc et a fixé une interdiction de retour de deux ans. Par une décision n° 17MA00775 du 1er septembre 2017, la présente Cour a rejeté la requête de Mme C... contre le jugement n° 1603637 du 21 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de l'Hérault du 5 juillet 2016 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. L'intéressée a alors sollicité le 23 avril 2019 une carte de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Mme C... relève appel du jugement du 27 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 juin 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a notamment refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination.
Sur les conclusions d'annulation :
2. En premier lieu, d'une part, l'arrêté en litige comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde, et par suite, est suffisamment motivé. D'autre part, Mme C... fait valoir que le préfet n'a pas procédé à un examen complet et sérieux de sa demande de titre de séjour en ne mentionnant pas la présence en France des quatre enfants de son époux issus d'une précédente union dont un est français, et le fait que trois de ses frères et sœurs résident en France et que ses parents sont décédés. Cependant, l'arrêté contesté fait clairement état de la situation personnelle de Mme C... et le préfet de l'Hérault a notamment relevé que l'intéressée s'était mariée le 14 août 2018 avec un ressortissant marocain en situation régulière sur le territoire, qu'elle n'établissait pas être dans l'impossibilité de regagner son pays d'origine où elle a vécu une grande partie de sa vie et où elle ne serait pas isolée puisqu'y résident trois de ses frères et sœurs. Dans ces conditions, l'intéressée n'est pas fondée à faire valoir que l'arrêté attaqué, lequel n'a pas à reprendre l'ensemble de sa situation personnelle, a été pris au terme d'un examen incomplet de sa situation.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application des stipulations et dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. Néanmoins, ces stipulations ne sauraient s'interpréter comme comportant pour un Etat contractant l'obligation générale de respecter le choix, par des couples mariés, de leur domicile commun et d'accepter l'installation de conjoints non nationaux dans le pays.
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... qui déclare être entrée en France en 2001 n'a pas déféré à quatre décisions portant refus de séjour et/ou obligation de quitter le territoire français dont deux d'entre elles ont été confirmées par la présente Cour. Mme C..., qui déclare avoir été hébergée chez un de ses frères, âgée de 53 ans à la date de l'arrêté attaqué, a épousé le 14 août 2018 un ressortissant marocain en situation régulière sur le territoire national, sans établir la durée de leur communauté de vie antérieurement à cette union. Il est constant que l'époux de Mme C... dispose du droit de solliciter le regroupement familial au profit de sa femme. Mme C... ne justifie d'aucune insertion socioprofessionnelle en France en faisant seulement valoir la date présumée de son entrée sur le territoire national et une présence de vingt ans continue sur celui-ci, ainsi que la présence en France de quatre de ses frères et sœurs, alors que, selon les termes précités de l'arrêt n° 17MA00775 du 1er septembre 2017, à cette date, elle n'établissait pas sa résidence habituelle et continue en France ni y avoir constitué le centre de ses intérêts privées et familiaux. Les pièces produites à la présente instance ne permettent pas davantage de démontrer sa présence permanente sur le territoire national depuis l'année 2001. Par ailleurs, la requérante ne justifie pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident trois de ses frères et sœurs. Dans ces circonstances, et notamment compte tenu du caractère récent de la vie commune avec son époux, le préfet de l'Hérault n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme C... à mener une vie privée et familiale normale, ni entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle de l'intéressée.
5. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de 'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
6. Si Mme C... se prévaut des stipulations de l'article 3-1 de la convention de New York sur les droits de l'enfant, d'une part, ce moyen est inopérant en ce qui concerne les quatre enfants de son mari dont elle n'est pas la mère, d'autre part et en tout état de cause, Mme C... qui ne justifie d'aucune ressource ne soutient ni même allègue assumer la charge effective de ces enfants. A... s'ensuit que ce moyen doit être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les conclusions accessoires :
8. Le présent arrêt rejette les conclusions d'annulation de Mme C.... Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par elle à l'occasion du litige doivent être rejetées par voie de conséquence.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... épouse B..., à Me Ruffel et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 7 septembre 2021, où siégeaient :
- M. Badie, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Ury, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 septembre 2021.
N° 20MA02816 5