Par un jugement n° 1703282 du 26 septembre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté préfectoral du 8 août 2017 et a condamné l'Etat à verser une somme de 800 euros à Me C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Procédure devant la Cour :
Par un recours, enregistré le 10 octobre 2017, le Préfet des Alpes-Maritimes demande à la Cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 26 septembre 2017.
Il soutient que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été notifiée le 17 mars 2017 à Mme A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations du public avec l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Boyer a été entendu au cours de l'audience publique
1. Considérant que le préfet des Alpes-Maritimes relève appel du jugement du 26 septembre 2017 du tribunal administratif de Nice annulant l'arrêté du 8 août 2017 par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme A..., de nationalité nigériane et l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 733-32 du même code : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 213-3. Il la notifie également au directeur général de l'office. Il informe simultanément du caractère positif ou négatif de cette décision le préfet compétent et, à Paris, le préfet de police ainsi que le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / La cour communique au préfet compétent et, à Paris, au préfet de police, lorsque ceux-ci en font la demande, copie de l'avis de réception. (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ; qu'en l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire ; qu'en cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé, le cas échéant en sollicitant la communication de la copie de l'avis de réception auprès de la Cour ;
4. Considérant que le préfet des Alpes-Maritimes produit pour la première fois en appel l'accusé de réception du pli recommandé contenant la décision du 10 mars 2017 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours formé par Mme A... à l'encontre de la décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 30 septembre 2016 ; qu'il ressort des mentions portées sur ce document que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a régulièrement été notifiée à Mme A... qui n'ayant pas retiré le pli mis en instance doit être regardée comme ayant reçu le pli au jour de sa présentation soit le 17 mars 2017 ; que, dans ces conditions, le préfet est fondé à soutenir qu'à la date de sa décision, Mme A... ne bénéficiait plus du droit de séjourner en France ; qu'il a pu ainsi sans méconnaître les dispositions citées de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prendre à son encontre l'arrêté contesté ; que, par suite, le préfet des Alpes-Maritimes est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a annulé pour ce motif cette décision ;
5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A... devant le tribunal administratif de Nice ;
6. Considérant que, par un arrêté n° 2016-862 du 21 novembre 2016, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs du département, le préfet des Alpes-Maritimes a donné délégation à M. B... D..., sous-préfet, chargé de mission, à l'effet de signer, toutes les décisions relevant de la direction de la règlementation et des libertés publiques, notamment les titres ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'auteur de l'acte en litige serait incompétent ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations du public avec l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. " ; qu'aux termes de l'article L. 211-3 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;
8. Considérant que l'arrêté contesté précise que l'intéressée avait sollicité son admission au séjour au titre de l'asile en vertu des dispositions des articles L. 741-1 et suivants du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'aucun statut protecteur ne lui avait été accordé à la suite du rejet de son recours par la Cour nationale du droit d'asile ; que le visa de ces dispositions et la mention de ces mêmes faits permettaient de connaître les considérations de droit et les circonstances de fait constituant le fondement de la décision en cause ; que la requérante n'est donc pas fondée à soutenir que les dispositions citées du code des relations du public avec l'administration auraient été méconnues ;
9. Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou de reconduite à la frontière de s'assurer, sous le contrôle du juge, en application du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si elle est en droit de prendre en considération, à cet effet, les décisions qu'ont prises, le cas échéant, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Commission des recours des réfugiés saisis par l'étranger de demandes de titre de réfugié politique, l'examen par ces dernières instances, au regard des conditions mises à la reconnaissance du statut de réfugié par la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New-York le 31 janvier 1967, des faits allégués par le demandeur d'un tel statut, et des craintes qu'il énonce, et l'appréciation portée sur eux, en vue de l'application de ces conventions, ne lient pas l'autorité administrative et sont sans influence sur l'obligation qui est la sienne de vérifier, au vu du dossier dont elle dispose, que les mesures qu'elle prend ne méconnaissent pas les dispositions susmentionnées de l'article L. 513-2 du code ;
10. Considérant que si Mme A... fait valoir qu'elle serait exposée à des risques en cas de retour au Niger, elle n'assortit pas ses allégations de précisions et de justifications suffisamment probantes, en se bornant à produire une attestation de l'association " Accompagnement Lieux d'accueil Carrefour éducatif et social " (ALC) indiquant la prise en charge de son suivi médical et de ses démarches administratives de demande d'asile par le service Les Lucioles ayant pour mission au sein de l'association d'accompagner les victimes de traite des êtres humains et les personnes en situation de prostitution dans le département des Alpes-Maritimes, pour établir le caractère actuel et personnel de ces risques, dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'a d'ailleurs pas retenu l'existence ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la décision fixant la pays de renvoi méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Alpes-Maritimes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 8 août 2017 du préfet des Alpes-Maritimes ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 26 septembre 2017 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Nice est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Mme E...A....
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2018, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- Mme Boyer, premier conseiller,
- Mme Carotenuto, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 mai 2018.
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N° 17MA04064
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