Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 mars 2015 et le 23 novembre 2016, MmeB..., représentée par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 22 janvier 2015 ;
2°) de prononcer, à titre principal, la décharge des impositions contestées ;
3°) de prononcer à titre subsidiaire la réduction des impositions contestées à hauteur des montants de 12 734,58 euros au titre de 2008, 20 528,16 euros au titre de 2009 et 23 015,10 euros au titre de 2010 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- son activité entre dans le champ d'application de l'exonération prévue à l'article 261-4-4° du code général des impôts ;
- aux termes de la doctrine administrative référencée 3 A-3125 du 20 octobre 1999, seules les personnes qui ont recours à des salariés sont exclues de l'exonération ;
- cette doctrine est illégale dans la mesure où en prévoyant que les cours soient dispensés par le professeur personnellement et en dehors de l'exploitation d'un établissement d'enseignement, elle ajoute à la loi une condition que l'article 261 ne prévoit pas ;
- les interventions extérieures auxquelles elle a eu recours sont marginales ;
- à titre subsidiaire, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée doivent être circonscrits aux seules recettes encaissées au titre des cours dispensés par les intervenants extérieurs ;
- en l'absence de vérification de comptabilité il ne peut lui être reproché un défaut de ventilation des recettes provenant d'une part des cours dispensés par elle et d'autre part des cours assurés par des tiers ;
- l'administration fiscale a opéré entre la phase administrative et la phase contentieuse une substitution de motifs la plaçant dans le cadre d'une vérification de comptabilité sans qu'elle ait pu bénéficier des garanties substantielles attachées à cette procédure de contrôle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boyer,
- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.
1. Considérant qu'à la suite d'un contrôle sur pièces, Mme B...a fait l'objet de rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période allant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010, assortis d'intérêts de retard, pour un montant de 43 287 euros, à raison de cours de danse dispensés au centre chorégraphique " Céline B... " ; qu'elle demande l'annulation du jugement du 22 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;
2. Considérant qu'aux termes des dispositions du b) du 4° du 4. de l'article 261 du code général des impôts, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : " Les cours ou leçons relevant de l'enseignement scolaire, universitaire, professionnel, artistique ou sportif, dispensés par des personnes physiques qui sont rémunérées directement par leurs élèves " ; qu'il résulte de ces dispositions que les personnes dispensant un enseignement scolaire, universitaire, professionnel, artistique ou sportif ne peuvent bénéficier de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée qu'à proportion de la part de leur activité correspondant aux cours qu'ils dispensent personnellement et qui leur sont payés directement par leurs élèves, à l'exclusion des sommes encaissées pour d'autres prestations ; que si cette personne confie l'exécution d'une partie de ces enseignements à un tiers, cette seule circonstance n'est toutefois pas de nature à lui faire perdre le bénéfice de l'intégralité du droit à exonération qu'elle tient des dispositions du b) du 4° du 4. de l'article 61 précitées, mais seulement à la priver du bénéfice de cette exonération pour la partie des cours dont l'exécution a été confiée à ce tiers, quand bien même les élèves continueraient de rémunérer cette personne physique pour la partie des cours dont la dispense a été déléguée ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au sein du centre chorégraphique " CélineB... ", les cours de danses étaient dispensés directement par Mme B... mais également par des intervenants extérieurs ; qu'en application des dispositions précitées, l'administration n'a pu valablement, comme elle l'a fait dans la proposition de rectification en date du 17 juin 2011, se fonder sur la seule circonstance qu'une partie des cours était assurée par ces intervenants, que Mme B... rémunérait par des rétrocessions d'honoraires, pour refuser à cette dernière le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue au b) du 4° du 4. de l'article 261 du code général des impôts sur la totalité des recettes déclarées ;
4. Considérant, toutefois, que pour justifier du bien-fondé des impositions en litige l'administration fiscale oppose à Mme B... un nouveau motif tiré de l'absence de comptabilisation distincte des recettes correspondant à l'activité d'enseignement qu'elle a personnellement exercée ; que l'administration est en droit, à tout moment de la procédure, de faire état d'un motif différent de celui qu'elle a initialement retenue, dès lors que cette substitution peut être faite sans priver le contribuable d'aucune des garanties de procédure prévues par la loi, sans qu'elle soit tenue de prononcer préalablement le dégrèvement initial ni d'établir une nouvelle proposition de rectification ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 10 du Livre des procédures fiscales : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. " ; qu'aux termes de l'article 286 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la période en litige : " I. Toute personne assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée doit : (...) 3° Si elle ne tient pas habituellement une comptabilité permettant de déterminer son chiffre d'affaires tel qu'il est défini par le présent chapitre, avoir un livre aux pages numérotées sur lequel elle inscrit, jour par jour, sans blanc ni rature, le montant de chacune de ses opérations, en distinguant, au besoin, ses opérations taxables et celles qui ne le sont pas.(...) 4° Fournir aux agents des impôts, ainsi qu'à ceux des autres services financiers désignés par décrets, pour chaque catégorie d'assujettis, tant au principal établissement que dans les succursales ou agences, toutes justifications nécessaires à la fixation des opérations imposables, sans préjudice des dispositions de l'article L. 85 du livre des procédures fiscales. " ;
6. Considérant que le service, en se livrant à la simple constatation matérielle de l'absence de production par Mme B... des éléments comptables permettant d'établir la répartition de ses recettes entre son activité taxable et son activité exonérée, ne peut être regardé, contrairement à ce qui est soutenu, comme imposant à la requérante des obligations relevant d'une vérification de comptabilité au sens de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, Mme B...ne peut utilement soutenir qu'elle aurait été privée des garanties attachées à une telle vérification ;
7. Considérant que les recettes issues des cours dispensés directement par Mme B... ne peuvent bénéficier du régime d'exonération qu'à la condition d'avoir fait l'objet d'une comptabilisation distincte ; que si Mme B... présente en appel des tableaux retraçant les recettes encaissées par les professeurs selon les disciplines enseignées et les modes de paiement sur les trois années en litige, de tels documents, dont le caractère exhaustif n'est pas établi, ne permettent pas de remettre en cause l'absence, invoquée par le ministre, de comptabilisation distincte des prestations, selon qu'elles étaient exonérées ou pas de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ainsi, l'administration a pu à bon droit procéder à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur la totalité des recettes encaissées au cours de la période allant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 ;
8. Considérant que Mme B... ne peut se prévaloir, pour contester les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, de la documentation administrative de base n°3 A-3125 du 20 octobre 1999, qui ne fait pas une interprétation différente de la loi ; que si elle invoque l'illégalité de cette instruction, il est constant que, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, cette instruction n'a pas servi de fondement aux rectifications contestées ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2017, où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président-assesseur,
- Mme Boyer, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 avril 2017.
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N° 15MA01208