Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 février 2017, le 7 décembre 2017 et le 29 janvier 2018, la société Mediterranean Properties Incorporated. représentée par Me A... et Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1402185 du 27 octobre 2016 ;
2°) de prononcer la restitution de la retenue à la source qu'elle a acquittée au titre de l'année 2011 d'un montant de 1 249 725 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les bénéfices qu'elle a réalisés en France à la suite de la cession du bien immobilier sis à Saint-Tropez le 29 juillet 2011 n'ont pas été effectivement distribués dans les conditions prévues par les dispositions des articles 115 quinquies du code général des impôts et 380 de l'annexe II à ce code ;
- l'interprétation de la loi fiscale contenue dans les paragraphes n° 10 à 40, 190, 200 et 220 de la documentation administrative référencée BOI-RPPM-RCM-30-30-30-10 confirme qu'elle a droit au remboursement de l'imposition en litige ;
- la procédure d'imposition méconnaît les dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales ;
- la procédure d'imposition méconnaît les dispositions du troisième alinéa de l'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 septembre 2017 et le 22 janvier 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société Mediterranean Properties Incorporated ne sont pas fondés.
La présidente de la Cour a désigné M. Barthez, président assesseur, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Antonetti, président de la 4ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Maury, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la société Mediterranean Properties Incorporated.
Considérant ce qui suit :
1. La société de droit américain Mediterranean Properties Incorporated a cédé un bien immobilier situé à Saint-Tropez le 29 juillet 2011 et a réalisé ainsi un bénéfice de 38 082 329 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2011 et acquitté une retenue à la source, d'un montant de 1 249 725 euros, au titre de l'année 2011. Par une réclamation du 14 mars 2013, elle a demandé la restitution de cette imposition. A la suite de la décision de rejet prise par le directeur départemental des finances publiques du Var le 7 avril 2014, elle a saisi le tribunal administratif de Toulon d'une même demande. Elle fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1402185 du 27 octobre 2016 rejetant sa requête.
Sur les conclusions à fin de restitution :
2. Aux termes de l'article 115 quinquies du code général des impôts : " 1. Les bénéfices réalisés en France par les sociétés étrangères sont réputés distribués, au titre de chaque exercice, à des associés n'ayant pas leur domicile fiscal (...) en France (...) 2. Toutefois, la société peut demander que la retenue à la source exigible en vertu des dispositions du 1 et de celles du 2 de l'article 119 bis fasse l'objet d'une nouvelle liquidation dans la mesure où les sommes auxquelles elle a été appliquée excèdent le montant total de ses distributions effectives. / L'excédent de perception lui est restitué (...) ". Aux termes de l'article 380 de l'annexe II au même code, fixant les modalités d'application de ces dispositions : " I. (...) Les distributions à retenir (...) s'entendent des distributions (...) qui ont été effectuées au cours de la période de douze mois qui suit la clôture de l'exercice (...) III. La société est tenue de produire, à l'appui de sa demande de révision, des copies, accompagnées, le cas échéant, de traductions en langue française, des décisions ou délibérations relatives aux distributions ainsi mentionnées, ainsi que des procès-verbaux ou comptes rendus des assemblées générales d'actionnaires ou d'associés qui ont approuvé les comptes de l'exercice ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à la société Mediterranean Properties Incorporated d'apporter la preuve que les bénéfices qu'elle a réalisés en France au titre de l'exercice clos en 2011 n'ont pas été effectivement distribués à ses associés avant le 1er janvier 2013.
4. Il résulte de l'instruction, notamment de la " résolution du Conseil d'administration " de la société Mediterranean Properties Incorporated, en date du 1er avril 2012, aux termes de laquelle la société s'est engagée à " affecter le profit tiré de la vente de la propriété située à St Tropez, en France, le 29 juillet 2011, à un compte de réserve pour un montant de 35.440.603 USD, et [à] ne décider d'aucune distribution du 29 juillet 2011 au 1er janvier 2013 ", et des déclarations des revenus de la société déposées aux États-Unis au titre des exercices clos les 31 décembre 2011 et 2012, qui mentionnent un actif d'un montant respectif de " 29 526 018 " et " 25 450 111 " dollars américains, que la société requérante a ainsi comptabilisé l'intégralité du produit de la cession du bien immobilier au titre des exercices en cause. Ces éléments sont corroborés par la réponse du Département du Trésor des États-Unis, en date du 9 février 2015, à une demande de renseignements des autorités françaises. Dans ces conditions, la société requérante doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, que le bénéfice réalisé en France au titre de l'exercice clos en 2011 n'a donné lieu à aucune distribution au sens et pour l'application des dispositions combinées de l'article 115 quinquies du code général des impôts et du I de l'article 380 de l'annexe II au même code. Par suite, la société Mediterranean Properties Incorporated est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration lui a refusé le bénéfice d'une restitution de la retenue à la source au titre de l'année 2011.
5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la société Mediterranean Properties Incorporated est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la société Mediterranean Properties Incorporated au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1402185 du 27 octobre 2016 du tribunal administratif de Toulon est annulé.
Article 2 : La société Mediterranean Properties Incorporated est déchargée de la retenue à la source d'un montant de 1 249 725 euros qu'elle a acquittée au titre de l'année 2011.
Article 3 : L'Etat versera à la société Mediterranean Properties Incorporated une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Mediterranean Properties Incorporated et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 8 janvier 2019, où siégeaient :
- M. Barthez, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Maury, premier conseiller,
- Mme Carotenuto, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 janvier 2019.
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N° 17MA00758
mtr