Par un jugement n° 1503095 et 1504794 du 17 octobre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ces demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2017, la commune de Canet-en-Roussillon, représentée par Me B... A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 octobre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté par lequel la préfète des Pyrénées Orientales a procédé à la fixation du montant du prélèvement visé à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation au titre de l'année 2015 et de la majoration du prélèvement résultant de l'application de l'arrêté de carence du 12 décembre 2014 fondé sur l'article L. 302-9-1 du même code ;
3°) à défaut réformer le taux multiplicateur du prélèvement ;
4°) de condamner l'Etat au remboursement des sommes indument perçues depuis le mois de mars 2015, lui enjoindre de les restituer dans le délai de 60 jours sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2018, le ministre de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par la commune de Canet-en-Roussillon ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation. ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la commune de Canet-en-Roussillon.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 12 décembre 2014, la préfète des Pyrénées-Orientales, après avoir constaté le non-respect de l'objectif de réalisation de logements sociaux pour la période triennale 2011-2013, a, en application de l'article 26 de la loi n°2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, prononcé la carence de la commune de Canet-en-Roussillon et, au vu du bilan de l'année 2013, fixé à 2 le coefficient multiplicateur de la majoration du prélèvement défini à l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation. Par un second arrêté du 5 mars 2015, la préfète a fixé, au titre de l'année 2015, le montant de ce prélèvement ainsi que de celui de la majoration prévue au III de l'article 26 de la loi du 18 janvier 2013. Par deux courriers reçus le 9 février et le 18 mai 2015, la commune de Canet-en-Roussillon a adressé à la préfète des Pyrénées-Orientales un recours gracieux, tendant au retrait de chacun de ces deux arrêtés, qui sont restés sans réponse. La commune de Canet-en-Roussillon relève appel du jugement du 17 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes d'annulation de ces deux arrêtés.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de carence du 12 décembre 2014 :
2. Aux termes de l'article 26 de la loi n°2013-61 du 18 janvier 2013 : " I. - L'arrêté motivé prononçant la carence des communes et la majoration du prélèvement dont elles sont redevables est pris, pour la quatrième période triennale, selon les modalités prévues à l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation dans sa rédaction antérieure à la présente loi. II. - Les communes soumises au prélèvement défini à l'article L. 302-7 du même code réalisent, au titre d'une période de référence courant entre le premier jour du premier trimestre suivant la date d'entrée en vigueur de la présente loi et le 31 décembre 2013, un nombre de logements locatifs sociaux égal à un douzième du nombre de logements locatifs sociaux à réaliser pour la quatrième période triennale, en application de l'article L. 302-8 dudit code dans sa rédaction antérieure à la présente loi, multiplié par le nombre de trimestres entiers restant à courir pendant la période de référence. Le représentant de l'Etat dans le département peut, par arrêté motivé pris après avis du comité régional de l'habitat, constater qu'une commune n'a pas réalisé les objectifs mentionnés au premier alinéa du présent II, en tenant compte de l'importance de l'écart entre les objectifs et les réalisations constatées pendant la période de référence, du respect de la typologie prévue au II de l'article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation, des difficultés rencontrées, le cas échéant, par la commune et des projets de logements sociaux en cours de réalisation. III. - Pour les communes faisant l'objet de l'arrêté mentionné au I ainsi que de l'arrêté mentionné au II du présent article, le représentant de l'Etat dans le département peut, en fonction des critères mentionnés au second alinéa du même II, augmenter, après avis de la commission mentionnée au I de l'article L. 302-9-1-1 du code de la construction et de l'habitation, le taux de majoration de telle sorte que le prélèvement majoré puisse atteindre jusqu'à cinq fois le montant du prélèvement mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 302-7 du même code. Le prélèvement majoré ne peut excéder 5 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune. Ce plafond est porté à 7,5 % pour les communes dont le potentiel fiscal par habitant est supérieur ou égal à 150 % du potentiel fiscal médian par habitant sur l'ensemble des communes soumises au prélèvement défini au même article L. 302-7. ". Aux termes de l'article L. 302-9-1 dans sa rédaction visée au I de l'article 26 précité : " Lorsque, dans les communes soumises au prélèvement défini à l'article L. 302-7, au terme de la période triennale échue, les engagements figurant dans le programme local de l'habitat n'ont pas été tenus ou, à défaut de programme local de l'habitat, le nombre de logements locatifs sociaux à réaliser en application du dernier alinéa de l'article L. 302-8 n'a pas été atteint, le préfet informe le maire de la commune de son intention d'engager la procédure de constat de carence. Il lui précise les faits qui motivent l'engagement de la procédure et l'invite à présenter ses observations dans un délai au plus de deux mois. / En tenant compte de l'importance de l'écart entre les objectifs et les réalisations constatées au cours de la période triennale échue, du respect de l'obligation, visée à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 302-8, de mettre en chantier, pour chaque période triennale, au moins 30 % de logements locatifs sociaux rapportés au nombre total de logements commencés, des difficultés rencontrées le cas échéant par la commune et des projets de logements sociaux en cours de réalisation, le préfet peut, par un arrêté motivé pris après avis du comité régional de l'habitat, prononcer la carence de la commune. Par le même arrêté, il fixe, pour une durée maximale de trois ans à compter du 1er janvier de l'année suivant sa signature, la majoration du prélèvement défini à l'article L. 302-7. Le taux de la majoration est égal au plus au rapport entre le nombre des logements sociaux non réalisés et l'objectif total de logements fixé dans le programme local de l'habitat ou déterminé par application du dernier alinéa de l'article L. 302-8. (...) ".
3. Comme l'a jugé le tribunal, l'arrêté de carence vise les dispositions législatives et règlementaires sur lesquelles il est fondé, mentionne le courrier adressé par la préfète à la commune dans le cadre de la procédure contradictoire, le courrier du maire de Canet-en-Roussillon du 14 août 2014 présentant ses observations sur le non-respect de l'objectif triennal pour la période 2011-2013 et de l'objectif de l'année 2013, le courrier du 14 novembre 2014 par lequel il engage la commune sur une production de deux-cent-quinze logements pour la prochaine période triennale ainsi que l'avis du comité régional de l'habitat du 8 septembre 2014. L'arrêté mentionne également les données chiffrées qui ont permis de déterminer le taux de réalisation de logements sociaux par la commune pour la période considérée. Ces indications ont permis à la commune de comprendre et de contester tant la mesure de carence décidée par la préfète que le taux du coefficient multiplicateur retenu. Les arrêtés contestés, dont la motivation n'avait pas à répondre à l'ensemble de l'argumentaire de la commune, sont ainsi suffisamment motivés. La circonstance que des modèles d'arrêtés annexés à l'instruction adressée aux préfets par la ministre de l'égalité des territoires et du logement en date du 27 mars 2014 proposaient une rédaction plus précise n'est pas de nature à caractériser une insuffisante motivation des arrêtés contestés au regard des exigences prévues par les dispositions reproduites au point 3.
4. Il résulte de l'instruction que le nombre de logements locatifs sociaux réalisés sur la commune de Canet-en-Roussillon au titre du bilan triennal 2011-2013 est de quarante-sept pour un objectif de réalisation de cent-trente-neuf logements, soit un taux de réalisation de 34 %. Au titre de l'année 2013, treize logements ont été réalisés sur un objectif fixé à trente-cinq en application des dispositions du premier alinéa du II de l'article 26 de la loi du 18 janvier 2013, soit un taux de réalisation de 37 %. La commune de Canet-en-Roussillon fait valoir que, malgré les efforts consentis pour mener une politique volontaire de création de logements respectueuse des objectifs légaux de mixité sociale de l'habitat, le poids de la réglementation, et notamment de son plan de prévention des risques naturels et de la loi Littoral, l'a empêchée de satisfaire à ses obligations. Toutefois, la commune de Canet-en-Roussillon se borne à invoquer des considérations générales. Elle n'apporte pas d'éléments précis permettant notamment de justifier de l'incidence que les contraintes extérieures dont elle se prévaut auraient pu avoir sur son déficit de création de logements locatifs sociaux. Il en va de même s'agissant de la superficie du territoire impactée par les dispositions du plan de prévention des risques d'inondation au regard des zones constructibles. L'augmentation massive du nombre de résidences principales dont se prévaut la commune n'est pas établie par les pièces du dossier. Si la commune invoque le prix élevé du foncier et de l'immobilier ainsi que l'absence de " foncier public à usage d'habitat " sur son territoire, ces circonstances, non encore assorties de précisions, ne suffisent pas davantage à établir, à elles seules, qu'elle aurait été dans l'impossibilité de satisfaire à ses obligations en matière de logements locatifs sociaux. La commune invoque les modifications qu'elle a apportées aux règles d'urbanisme contenues dans son plan local d'urbanisme, en 2010 et 2014. Toutefois, si la part de réalisation de logements en logements locatifs sociaux a été fixée en 2010 à 25 %, cette obligation a été limitée à deux zones d'aménagement concertée, et à deux secteurs boulevard des Aliézés. L'extension adoptée par délibération du 30 juin 2014 qui impose de réaliser 1/3 de logements locatifs sociaux à partir de cinq logements dans la zone U hors front de mer et port est quant à elle postérieure à la période 2011-2013 caractérisée par un fort déficit en logement sociaux.
5. Dans ces conditions, eu égard au faible taux de réalisation des objectifs fixés et à la portée des difficultés alléguées, la préfète des Pyrénées-Orientales a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, et quand bien même aucune préemption n'aurait été réalisée depuis le constat de carence, constater la carence de la commune de Canet-en-Roussillon en application des dispositions de l'article 26 de la loi du 18 janvier 2013 et de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation citées au point 2.
6. Il ne résulte pas de l'instruction que la préfète, qui, après avoir constaté la carence de la commune au titre de son bilan triennal 2011-2013 et de son bilan de l'année 2013, a retenu un taux de majoration du prélèvement dû au titre de l'article L. 302-7 du code de la construction et de l'habitation de 100 %, alors que la loi lui permettait de fixer un taux maximal de 400 %, aurait omis de prendre en compte la volonté de la commune pour rattraper son retard et tenter de respecter ses obligations légales, ni les difficultés et contraintes extérieures objectives, qui, comme il a été dit, n'étaient pas de nature à empêcher la réalisation des objectifs fixés. La circonstance que le taux de réalisation de logements locatifs sociaux à l'échelle de l'agglomération excède les objectifs fixés par le programme local de l'habitat est en outre sans incidence sur l'appréciation portée par la préfète des Pyrénées-Orientales sur le non-respect par la commune des objectifs légaux qui lui avaient été assignés. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que, en fixant le taux de majoration, la préfète aurait omis de prendre en compte la modification du plan local d'urbanisme par la délibération du 30 juin 2014, qui exige, un taux de logements locatifs de 35% pour les projets de plus de cinq logements. Au total, le moyen tiré de ce que le taux de la majoration revêtirait un caractère disproportionné ne peut qu'être écarté. La commune de Canet-en-Roussillon n'est dès lors pas fondée à demander la réformation de l'arrêté du 12 décembre 2014 en tant qu'il applique une majoration du prélèvement par logement manquant tel que défini à l'article L. 302-7 au taux de 100 % à compter du 1er janvier 2015 et pour une durée de trois ans.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 5 mars 2015 :
7. Pour demander l'annulation de l'arrêté du 5 mars 2015, par lequel la préfète des Pyrénées-Orientales a fixé les montants du prélèvement et de la majoration prévue à l'article 26 de la loi du 18 janvier 2013, la commune de Canet-en-Roussillon se borne à exciper de l'illégalité de l'arrêté de carence du 12 décembre 2014 qui en constitue le fondement. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 6 que ce moyen ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune du Canet-en-Roussillon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Ses conclusions, fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées, l'Etat n'ayant pas la qualité de partie perdante à l'instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la commune de Canet-en-Roussillon est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Canet-en-Roussillon et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 4 novembre 2019, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. C..., président assesseur,
- M. Merenne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 novembre 2019.
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N° 17MA04777