Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 15 novembre 2018 ;
2°) d'annuler la décision du maire de la commune de Mireval du 10 juillet 2017 ;
3°) d'enjoindre à la commune de saisir le juge du contrat afin d'annulation de l'acte de vente qui serait intervenu, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à venir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Mireval une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- la compétence du signataire de la décision litigieuse n'est pas établie ;
- l'exigence de motivation n'est pas satisfaite ;
- l'arrêté du 16 juin 1983 délimitant la zone de préemption forme avec la décision attaquée, une opération complexe ; il peut, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, exciper de son illégalité ;
- aucun avis de la chambre d'agriculture n'a été sollicité ; les exigences des articles L. 142-1 à L. 142-3 du code de l'urbanisme ne sont pas respectées ;
- la décision est entachée de détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2019, la commune de Mireval, représentée par la SELARL Valette-Berthelsen, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.
Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la méconnaissance du champ d'application de la loi, dès lors que, depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015, le droit de préemption prévu aux articles L. 215-1 et suivants du code de l'urbanisme n'est plus applicable dans les zones de préemption créées par les préfets au titre de la législation sur les périmètres sensibles avant l'entrée en vigueur de la loi du 18 Juillet 1985.
Un mémoire, en réponse à ce moyen, a été enregistré pour M. B... le 27 octobre 2020.
Il s'approprie ce moyen.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985 ;
- la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 ;
- l'ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... relève appel du jugement du 15 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 juillet 2017 par laquelle le maire de la commune de Mireval a décidé de préempter la parcelle cadastrée AH n°28 dont il s'était porté acquéreur.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En application des articles L. 142-1 et suivants du code de l'urbanisme, dans leur rédaction antérieure à la loi du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en oeuvre de principes d'aménagement, des périmètres sensibles pouvaient être délimités par le préfet dans les départements inscrits sur une liste établie par décret en Conseil d'Etat. Il appartenait au préfet d'arrêter les mesures nécessaires à la protection des sites et des paysages compris dans ces périmètres sensibles et d'y créer des zones de préemption au profit du département.
3. La loi du 18 juillet 1985 a modifié les articles L. 142-1 et suivants du code de l'urbanisme en supprimant le régime de protection des périmètres sensibles et en confiant au département la compétence pour élaborer et mettre en oeuvre une politique de protection, de gestion et d'ouverture au public des espaces naturels sensibles. L'article L. 142-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction résultant de cette loi, prévoyait que, pour la mise en oeuvre de cette politique, le conseil général pouvait créer des zones de préemption. Un nouvel article L. 142-12 disposait que : " (...) Le droit de préemption prévu à l'article L. 142-3 dans sa rédaction issue de la loi (...) s'applique dès l'entrée en vigueur du présent chapitre à l'intérieur des zones de préemption délimitées en application de l'article L. 142-1 dans sa rédaction antérieure (...) ".
4. L'ordonnance du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre Ier du code de l'urbanisme, ratifiée par l'article 156 de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, a recodifié les dispositions relatives aux espaces naturels sensibles, d'une part, aux articles L. 113-8 et suivants pour les dispositions relatives à la politique départementale de protection des espaces naturels sensibles, et, d'autre part, aux articles L. 215-1 et suivants pour celles relatives au droit de préemption dans ces espaces. Cette ordonnance a abrogé, à compter du 1er janvier 2016, la partie législative du livre Ier du code de l'urbanisme dans sa rédaction antérieure, sans reprendre les dispositions de l'article L. 142-12. Il en résulte que, depuis cette date, le droit de préemption prévu aux articles L. 215-1 et suivants du code de l'urbanisme n'est plus applicable dans les zones de préemption créées par les préfets au titre de la législation sur les périmètres sensibles avant l'entrée en vigueur de la loi du 18 juillet 1985, sauf à ce que le département les ait incluses dans les zones de préemption qu'il a lui-même créées au titre des espaces naturels sensibles.
5. Il suit de là que la commune de Mireval ne pouvait, après l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 23 septembre 2015, exercer légalement le droit de préemption qu'elle tient de l'article L. 215-7 du code de l'urbanisme sur une parcelle située dans le périmètre sensible de la commune de Mireval, créée par un arrêté du commissaire de la République du département de l'Hérault en date du 16 juin 1983.
6. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible de fonder l'annulation de la décision contestée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort, que, par celui-ci, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 juillet 2017.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. L'annulation d'une décision de préemption n'implique pas que la personne publique ayant pris cette décision saisisse le juge du contrat afin d'annulation de l'acte de vente qui serait intervenu. Par suite les conclusions de M. B... tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Mireval d'agir de la sorte doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la commune de Mireval et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions au bénéfice de M. B....
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 15 novembre 2018 du tribunal administratif de Montpellier et la décision prise par le maire de la commune de Mireval le 10 juillet 2017, préemptant la parcelle cadastrée AH n°28, sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et à la commune de Mireval.
Délibéré après l'audience du 16 novembre 2020, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- Mme C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 novembre 2020.
N°19MA00251 2