Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 juin 2016, sous le n° 16MA02237, M. B...A..., représenté par Me C...demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 mai 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté susvisé en tant qu'il porte refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet a commis une erreur d'appréciation en lui opposant l'absence d'un visa de long séjour ;
- cette décision et l'obligation de quitter le territoire français violent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2017, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Marchessaux a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 19 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 janvier 2016 du préfet de l'Hérault qui a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et à fixer le pays de destination ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant que l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que les dispositions de ce code s'appliquent sous réserve des conventions internationales ; qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 susvisé : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles " ; que l'article 9 du même accord stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour " compétences et talents " sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. " ; qu'il résulte de la combinaison des textes précités que, si la situation des ressortissants marocains souhaitant bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est régie par les stipulations de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, la délivrance à un ressortissant marocain du titre de séjour " salarié " prévu à l'article 3 de ce texte est subordonnée, en vertu de son article 9, à la condition, prévue à l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la production par ce ressortissant d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ;
3. Considérant qu'il ressort de la décision contestée que M. A...a produit, à l'appui de sa demande de titre de séjour mention " vie privée et familiale ", une promesse d'embauche pour un emploi de coiffeur en contrat à durée indéterminée ; qu'ainsi le préfet de l'Hérault a examiné si l'intéressé pouvait bénéficier d'un titre de séjour " salarié " sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain ; que, toutefois, les premiers juges ont estimé, à juste titre, à la suite du préfet de l'Hérault, que l'absence de production de visa de long séjour était suffisante pour refuser à M. A...la délivrance du titre de séjour en litige ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait ainsi commis une erreur d'appréciation ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...allègue sans le justifier, être entré en France le 21 décembre 2010, sous couvert d'un visa de long séjour délivré par les autorités italiennes ; que le 7 octobre 2011, il s'est marié avec une ressortissante algérienne, titulaire d'un certificat de résidence en cours de validité ; que de cette union est né un enfant, le 2 mai 2012 ; que, cependant, comme l'a estimé à juste titre le tribunal, le requérant ne démontre pas le caractère continue de sa présence sur le territoire national pour les années 2010 et 2011, en se bornant à produire deux promesses d'embauche, un acte de mariage, une facture d'achat et deux relevés de compte bancaire ; que, par ailleurs, il est constant que le couple s'est séparé ; qu'en effet, il ressort d'une ordonnance du 2 juillet 2013, que le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Narbonne a autorisé les époux à résider séparément, a fixé la résidence de l'enfant au domicile de la mère et dit que le droit de visite et d'hébergement de M. A... sera réservé, ainsi que le droit à la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant en raison de l'impécuniosité du père ; que le jugement de ce même tribunal du 4 mars 2016 accordant à M. A...un droit de visite sur l'enfant, tous les mardis de 14 heures à 17 heures est postérieur à la décision contestée ; que le requérant n'établit pas contribuer régulièrement à l'entretien et à l'éducation de sa fille par les documents versés au dossier et constitués par deux mandats cash d'un montant de cinquante euros adressés à son ex-épouse en mai et juillet 2014, des preuves d'envoi de colis à cette dernière et de divers tickets de caisse datant des mois de novembre, avril et juin 2013, ainsi que par les deux photos du requérant avec son enfant et des attestions de connaissance ; que les promesses d'embauche pour un emploi de coiffeur ne sont pas de nature à démontrer l'insertion professionnelle de M. A...; qu'en outre, celui-ci n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses parents et sa fratrie ; que, dans ces conditions, la décision en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que cette décision aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, la décision querellée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point n° 5 ;
7. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un refus de séjour, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
8. Considérant ainsi qu'il a été dit au point n° 5 que M. A...n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant ; que, par ailleurs, il ressort de l'ordonnance du 2 juillet 2013, que le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Narbonne a décidé de réserver le droit de visite et d'hébergement du requérant ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
10. Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A...n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions susvisées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que M. A...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2017, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- Mme Marchessaux, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 avril 2017.
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N° 16MA02237