Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 21 juillet 2020, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2018 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder à un nouvel examen de sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative et de lui délivrer, dans l'attente de sa décision, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros à Me B... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- le préfet a commis une erreur de droit car il n'a pas examiné sa situation personnelle ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de la décision de refus de titre de séjour ;
- cette décision méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de la décision d'éloignement.
La requête de M. C... a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Un mémoire présenté pour M. C... et enregistré le 11 décembre 2020 n'a pas été communiqué.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 13 décembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... Grimaud, rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Entré pour la première fois en France le 29 janvier 2017, M. C..., né le 18 mai 1983 et de nationalité comorienne, a obtenu une autorisation provisoire de séjour pour soins valable du 3 avril 2018 au 15 septembre 2018. Il a, le 2 août 2018, demandé le renouvellement de ce titre de séjour et l'octroi d'une carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 30 novembre 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté cette demande et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
2. Aux termes des dispositions de l'article L. 31311 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 3132 n'est pas exigée. (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du compte rendu de consultation établi le 18 mars 2019 par le professeur Brue, chef du service d'endocrinologie, diabète et maladies métaboliques de l'hôpital de la Conception, qui suit l'intéressé depuis sa prise en charge par ce service, que M. C..., qui souffre d'un hypogonadisme sévère ayant un fort retentissement fonctionnel et psychologique, bénéficie en France d'un traitement androgénique qui doit lui être délivré en permanence et faute duquel il serait exposé au risque d'une absence totale de fonction sexuelle, d'une fragilité musculaire et osseuse accrue avec risque de fracture et d'une anémie non régénérative, ainsi que d'un syndrome dépressif. Il s'ensuit que l'intéressé, qui établit ainsi que l'absence de traitement l'exposerait au risque de subir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, est fondé à soutenir que le préfet des BouchesduRhône, qui a fondé le refus de titre de séjour qu'il lui a opposé sur le seul motif qu'il n'encourrait pas ce risque en l'absence de soins, a fait une inexacte application des dispositions précitées en lui refusant le séjour sur leur fondement. Aucun autre moyen n'étant mieux à même de régler le litige, M. C... est pour ce motif fondé à demander l'annulation de la décision lui refusant le séjour ainsi que, par voie de conséquence, de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
4. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont, par leur jugement, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 30 novembre 2018. Il y a lieu, par suite, d'annuler ce jugement et cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".
6. Eu égard au motif pour lequel elle est prononcée, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement que le préfet des Bouches-du-Rhône réexamine la situation de M. C... dans un délai de deux mois à compter de sa notification. Il y a lieu de le lui enjoindre. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à sa mission d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'État le versement à cet avocat de la somme de 1 500 euros.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1905740 du tribunal administratif de Marseille du 18 octobre 2019 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 30 novembre 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer la situation de M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera à Me B... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... A... H... C..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Marseille.
Délibéré après l'audience du 21 décembre 2020, où siégeaient :
- M. Guy Fédou, président,
- Mme E... F..., présidente assesseure,
- M. D... Grimaud, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 janvier 2021.
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N° 20MA02348