Par un jugement n° 1402269 du 24 juillet 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er août 2014 et le 27 août 2014, Mme E..., représentée dans le dernier état de ses écritures par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 24 juillet 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 juin 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui restituer son passeport et de lui délivrer un titre de séjour portant droit au travail dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est entaché d'une insuffisance de motivation ;
- l'arrêté du 9 décembre 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'appelante et lui faisant obligation de quitter le territoire est illégal ; en effet :
- il méconnaît les dispositions de l'alinéa 2 de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 en l'absence de mention des qualité, nom et prénom de son signataire,
- il porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale,
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en tant que la durée d'assignation a été limitée à trente jours et n'a pas été renouvelée, alors qu'elle pouvait prétendre au bénéfice de la durée de six mois prévue par les dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que l'appelante n'était pas recevable à exciper pour la première fois le 27 août 2014 de l'illégalité de l'arrêté du 9 décembre 2013 qui lui a été notifié le 11 décembre 2013.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme F..., première conseillère a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme E..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 24 juillet 2014 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juin 2014, par lequel le préfet de Vaucluse l'a assignée à résidence dans le département de Vaucluse pour une durée de trente jours, dans l'attente de son départ à destination de son pays d'origine ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'en indiquant que les circonstances alléguées par Mme E..., liées à ses difficultés financières et à l'absence de logement et d'attaches dans son pays d'origine, ne constituaient pas des motifs caractérisant une impossibilité de quitter le territoire français au sens des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et alors qu'il n'était pas soutenu devant lui que l'intéressée ne pouvait ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, le premier juge a suffisamment répondu au moyen, tiré de ce qu'elle pouvait prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tel qu'il était invoqué devant lui ;
Sur la légalité de l'arrêté du 5 juin 2014 :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 9 décembre 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'appelante et lui faisant obligation de quitter le territoire lui a été notifié le 11 décembre 2013 et n'a pas été contesté ; que, par suite, elle n'est pas recevable à exciper de l'illégalité de cet arrêté, devenu définitif, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 5 juin 2014 qui l'assigne à résidence en vue de la mise à exécution d'office de la mesure d'éloignement ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois. " ;
5. Considérant que l'arrêté contesté, qui précise que l'appelante devra se présenter au départ du vol qui lui sera réservé à destination de son pays d'origine et qu'elle est assignée à résidence dans l'attente de ce départ, a été pris sur le fondement des dispositions susmentionnées de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il vise, en vue d'assurer l'exécution forcée par la puissance publique de la mesure d'éloignement faute pour l'intéressée d'y avoir volontairement déféré dans le délai imparti ; que si Mme E... invoque une situation d'impécuniosité faisant obstacle à la prise en charge financière de son retour au Maroc, ces considérations sont inopérantes dès lors que la mesure contestée vise à l'exécution forcée de la mesure d'éloignement, devenue possible à défaut d'exécution spontanée au terme du délai de départ volontaire ;
6. Considérant qu'eu égard à son âge de vingt-deux ans au moment de son arrivée en France et à l'existence d'attaches familiales au Maroc, et même si l'intéressée a de fortes attaches familiales en France où elle vit depuis près de neuf ans, son éloignement ne peut être regardé comme portant une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeurait donc une perspective raisonnable, ce qui ouvrait au préfet la possibilité de l'assigner à résidence sur le fondement des dispositions précitées ;
7. Considérant que l'assignation à résidence prévue par les dispositions susmentionnées intervient après l'expiration du délai imparti à l'étranger pour organiser son départ volontaire ; que la durée de quarante-cinq jours, renouvelables une fois, qu'elles mentionnent n'obéit pas à des considérations liées à la nécessité pour l'étranger de préparer son départ mais à des considérations essentiellement liées aux délais nécessaires à l'administration pour procéder à l'éloignement forcé de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire ; qu'en conséquence, si Mme E... fait valoir les difficultés auxquelles elle se trouvera confrontée en retournant dans son pays d'origine et son désir de comparaître lors du procès pénal consécutif aux violences conjugales infligées par son époux, ainsi que la procédure de divorce en cours, ces éléments ne sont pas de nature à démontrer qu'en arrêtant à trente jours la durée de son assignation à résidence, le préfet de Vaucluse aurait apprécié de façon manifestement erronée les faits de l'espèce ; qu'à plus forte raison, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que la durée de la mesure aurait dû être portée à six mois ; qu'elle ne démontre d'ailleurs pas entrer dans les prévisions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elle revendique l'application, faute de justifier être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou dans l'impossibilité de regagner son pays d'origine et de se rendre dans tout autre pays ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... épouse A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 26 février 2016, où siégeaient :
- M. Lascar, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme F..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 15 mars 2016.
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N° 14MA03468
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