Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 janvier 2015, M. A... C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 décembre 2014 ;
2°) de condamner le SDIS des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 40 000 euros en réparation de ses préjudices ;
3°) de mettre à la charge du SDIS des Bouches-du-Rhône la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur l'existence d'une inégalité de traitement entre lui et les autres agents du SDIS ;
- les agissements de sa hiérarchie directe et la carence de la hiérarchie supérieure à agir en réponse aux signalements de ces faits de harcèlement, à lui accorder la protection fonctionnelle et à lui assurer un traitement identique à celui des autres agents notamment en matière d'avancement constituent des faits de harcèlement moral qui engagent la responsabilité du SDIS ;
- son préjudice moral doit être évalué en tenant notamment compte des conséquences importantes sur son état de santé des faits de harcèlement ;
- le préjudice financier résulte notamment du retard qui a été causé dans le déroulement de sa carrière.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné M. Renouf en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Argoud,
- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., substituant MeB..., représentant M. C....
1. Considérant que M. C..., lieutenant de 2ème classe de sapeurs-pompiers du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) des Bouches-du-Rhône, affecté au centre de secours principal d'Aubagne, a demandé en vain au tribunal administratif de Marseille la condamnation du SDIS des Bouches-du-Rhône à lui verser 40 000 euros de dommages intérêts en réparation d'un préjudice subi du fait du harcèlement moral dont il estime avoir été victime ; qu'il relève appel du jugement du 16 décembre 2014, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que M. C... soutient que le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur l'existence d'une inégalité de traitement entre lui et les autres agents du SDIS ; qu'à l'appui de sa demande d'indemnisation, M. C... n'a invoqué l'engagement de la responsabilité de l'administration que sur le seul fondement du harcèlement moral ; que les premiers juges ont répondu à ce moyen en exposant aux points 4 à 6 du jugement les motifs pour lesquels ce moyen devait être écarté ; qu'ainsi, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à chacun des arguments avancé par l'intéressé au soutien de son moyen, aurait omis de se prononcer sur l'un des fondements de la responsabilité du SDIS qu'il avait invoqué ;
Sur les conclusions indemnitaires :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : "Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. (...) " ;
4. Considérant qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ;
5. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'audit du centre de secours principal d'Aubagne réalisé par le SDIS des Bouches-du-Rhône à l'intention du préfet des Bouches-du-Rhône, que les consignes du commandant Maggiani critiquées par le requérant visaient à mettre fin à des habitudes de travail des agents qui n'étaient en accord ni avec la règlementation ni avec les règles de bon fonctionnement d'un centre opérationnel de cette importance ; que certains des agissements dénoncés par M. C... comme étant à l'origine de la dégradation de ses conditions de travail concernent des remontrances relatives aux faits d'avoir quitté son poste de chef de garde le 13 février 2010, sans autorisation et sans prévenir sa hiérarchie, d'avoir refusé à plusieurs reprises d'obéir aux ordres formels de suivre un entretien avec son supérieur hiérarchique ; que si M. C... soutient avoir fait l'objet d'une sanction disciplinaire injuste, il n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause le bien-fondé de cette mesure, dont il n'a d'ailleurs pas alors contesté la légalité ;
6. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que la situation du centre de secours principal d'Aubagne a été suivie avec attention par ses responsables, notamment par le commandant du SDIS et par le préfet ; que s'ils n'ont pas apporté aux demandes de M. C... les réponses que celui-ci attendait, cette circonstance ne saurait constituer un agissement de harcèlement dès lors que, pour les motifs indiqués au point précédent, les protestations de M. C... concernant les reproches qui lui étaient adressés n'étaient pas fondées ; qu'en outre, lesdits reproches étant justifiés, c'est à bon droit que le SDIS des Bouches-du-Rhône a refusé d'accorder à l'intéressé le bénéfice de la protection fonctionnelle instituées par les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 ;
7. Considérant, enfin qu'il ne ressort pas des pièces dossier que l'intéressé, dont la manière de servir était caractérisée, ainsi qu'il a été dit au point 4, par plusieurs refus de se conformer aux ordres et par des écarts de conduite, était dans la même situation que les agents qui ont bénéficié d'un avancement plus rapide que lui ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir qu'il aurait été victime d'une inégalité de traitement en ce qui concerne le déroulement de sa carrière et, singulièrement, son avancement ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été victime d'un harcèlement moral et n'est donc pas non plus fondé à soutenir que la responsabilité du SDIS serait engagée sur ce fondement ; qu'ainsi M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au service départemental d'incendie et de secours des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2016, où siégeaient :
- M. Renouf, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Argoud, premier conseiller,
- M. Coutel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 décembre 2016.
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N° 15MA00355