Procédures devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée le 19 avril 2017 sous le n° 17MA01607, M. et Mme A..., représentés par la SCP SVA, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1504604 du tribunal administratif de Montpellier du 31 mars 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif de Montpellier ;
3°) à titre subsidiaire, de mettre en oeuvre les dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin de leur permettre de présenter un dossier de demande de permis de construire modificatif de nature à régulariser la situation ;
4°) de mettre à la charge de M. et Mme D... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de l'urbanisme.
Ils soutiennent que :
- le jugement méconnaît l'article R. 741-1 du code de justice administrative ;
- les premiers juges ont commis une erreur de droit dans l'application de l'article UI-7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune qui vise deux situations précises et non des conditions cumulatives ;
- les premiers juges ont commis une erreur de fait en estimant que le maire avait méconnu l'étendue de ses compétences ;
- l'arrêté du 23 septembre 2014 ayant été retiré et étant disparu de l'ordonnancement juridique, ils pouvaient déposer une nouvelle demande de permis et aucune disposition législative, ni réglementaire n'imposait au maire d'engager une procédure contradictoire sur le fondement de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- au demeurant, une telle omission n'a ni été de nature à priver M. et Mme D... d'une garantie, ni n'a influé sur le sens de la décision de la commune ;
- les autres moyens invoqués par M. et Mme D..., devant les premiers juges, tirés du détournement de pouvoir, du non-respect des dispositions des articles U1-6 et U1-11 du plan local de la commune et de la violation des dispositions du plan de prévention des risques d'inondation limitant l'emprise des extensions des constructions existantes à 20 m² devront être écartés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2017, M. et Mme D..., représentés par la SELARL Maillot Avocats et associés, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme A... la somme de 2 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de l'urbanisme.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.
II. Par une requête, enregistrée le 19 avril 2017 sous le n° 17MA01608, M. et Mme A..., représentés par SCP SVA, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1602193 du tribunal administratif de Montpellier du 31 mars 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif ;
3°) à titre subsidiaire, de mettre en oeuvre les dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin de leur permettre de présenter un dossier de demande de permis de construire modificatif de nature à régulariser la situation ;
4°) de mettre à la charge de M. et Mme D... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de l'urbanisme.
Ils soutiennent que :
- le jugement méconnaît l'article R. 741-1 du code de justice administrative ;
- les premiers juges ont commis une erreur de droit dans l'application de l'article UI 7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune qui vise deux situations précises et non des conditions cumulatives ;
- à la date de la décision contestée, les permis de construire précédents des 23 septembre 2014 et 29 juillet 2015 ayant été retirés et étant disparus de l'ordonnancement juridique, ce nouveau permis n'a pas pu retirer la décision du 27 août 2015 ;
- au demeurant, l'omission du respect de la procédure contradictoire n'a pas été de nature à avoir privé M. et Mme D... d'une garantie ;
- le moyen tiré du détournement de pouvoir, présenté à l'expiration de l'ordonnance du 29 juillet 2016, est irrecevable et, en outre, le projet à l'origine du nouveau permis de construire délivré est différent du précédent ;
- l'arrêté en litige ne méconnaît pas les dispositions des articles U1-6, U1-11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, ni celles du règlement du plan de prévention des risques d'inondation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2017, M. et Mme D..., représentés par la SELARL Maillot Avocats et associés concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme A... la somme de 2 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de l'urbanisme.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., représentant M. et Mme A... et de Me F..., représentant M. et Mme D....
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes n° 17MA01607 et n° 17MA01608, présentées par M. et Mme A..., portent sur des permis de construire qui leur ont été délivrés par le maire de la commune de Saint-Thibéry, sur le même terrain d'assiette et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. Par un arrêté en date du 23 septembre 2014, le maire de la commune de Saint-Thibéry a délivré à M. A... un permis de construire en vue de la réalisation d'une maison à usage d'habitation par surélévation d'une cave vinicole existante et l'ajout de deux niveaux, pour une surface de plancher créée de 143 mètres carrés, sur un terrain cadastré section AC n° 255, situé 10 avenue d'Agde sur le territoire de cette collectivité. Par un arrêté en date du 22 décembre 2014, le maire de la commune de Saint-Thibéry a, à la suite du recours gracieux exercé par M. et Mme D..., retiré ce permis de construire au motif que le projet avait été autorisé en méconnaissance des dispositions de l'article UI-6 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) communal. Par un arrêté du 30 mars 2015, le maire a retiré cet arrêté de retrait au motif que ce dernier avait été notifié plus de trois mois après le délai imparti par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme. Par ordonnance du 13 mai 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a suspendu l'exécution de la décision du 30 mars 2015 et rejeté les conclusions de M. et Mme D... tendant à la suspension de l'arrêté du 23 septembre 2014. Par un nouvel arrêté du 6 juillet 2015, le maire de la commune de Saint-Thibéry a, sur demande du bénéficiaire, procédé de nouveau au retrait du permis de construire du 23 septembre 2014. Par un arrêté du 29 juillet 2015, cette même autorité a délivré un nouveau permis de construire à M. et Mme A... en vue de la réalisation du même projet pour le retirer dès le 27 août 2015. A la suite de ce retrait, M. et Mme A... ont sollicité, le 17 novembre 2015, une nouvelle autorisation de construire qui leur a été accordée, par arrêté du 24 mars 2016. Par deux jugements n° 1504604 et n° 1602193 dont relèvent appel M. et Mme A..., le tribunal administratif de Montpellier a, à la demande de M. et Mme D..., annulé tant l'arrêté du 29 juillet 2015 que la nouvelle autorisation du 24 mars 2016.
3. La délivrance aux bénéficiaires, le 24 mars 2016, d'un nouveau permis de construire pour le même projet, sur le même terrain d'assiette, a implicitement mais nécessairement eu pour effet de rapporter le permis qui leur avait été précédemment délivré le 29 juillet 2015. Dès lors, il appartient au juge administratif de se prononcer d'abord sur la légalité de ce second permis et de ne statuer sur la légalité du premier que si, par l'effet de l'annulation qui serait prononcée, celui-ci était rétabli dans l'ordonnancement juridique.
Sur le permis de construire du 24 mars 2016 :
4. Pour annuler l'arrêté du maire de la commune de Saint-Thibéry du 24 mars 2016, les premiers juges ont estimé que cet arrêté méconnaissait les dispositions de l'article U1-7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune.
5. D'une part, cet article U1-7 dispose que : " Les constructions doivent respecter un retrait par rapport aux limites séparatives au moins égal à la moitié de la hauteur totale de la construction sans que ce retrait puisse être inférieur à 3 mètres. Cependant, les constructions en limites séparatives sont autorisées dans les situations suivantes : - lorsqu'il existe une construction implantée en limite séparative sur la parcelle voisine,/- sous condition que la hauteur de la construction mesurée au droit de la limite séparative n'excède pas 3,5 m (au-delà d'une hauteur de 3,5 m, la construction devra respecter les règles de retrait citées précédemment) ".
6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation du plan local d'urbanisme, que ses auteurs ont entendu préserver les caractéristiques architecturales du centre ancien classé en zone U1, à, travers " le gabarit des habitations denses et de faible hauteur ".
7. Eu égard tant aux termes de l'article U1-7 qui mentionnent, au pluriel, " des situations " dans lesquelles l'implantation d'une construction en limites séparatives est autorisée qu'aux finalités de ces dispositions qui ont pour objet de définir l'implantation des bâtiments dans leur environnement immédiat afin d'assurer une homogénéité du tissu urbain, elles doivent être interprétées comme autorisant l'implantation d'une construction en limites séparatives soit " lorsqu'il existe une construction implantée en limite séparative sur la parcelle voisine ", soit " sous condition que la hauteur de la construction mesurée au droit de la limite séparative n'excède pas 3,5 m ". Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont retenu, pour annuler l'arrêté du 24 mars 2016, que la hauteur de la construction envisagée dépassant le seuil autorisé de 3,5 mètres, cette construction ne répondait pas ainsi aux conditions cumulatives posées par ces dispositions, alors qu'elle était implantée en limite séparative.
8. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les requérants tant devant le tribunal administratif de Montpellier que devant la Cour.
9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, (...) sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 211-2 du même code : " doivent être motivées les décisions qui : (...) / 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative compétente pour retirer une décision créatrice de droits de mettre la personne intéressée en mesure de présenter des observations.
10. Comme il a été dit au point n° 1, quand bien même la nouvelle autorisation de construire délivrée par l'arrêté contesté du 24 mars 2016 à M. et Mme A... porte sur un projet de construction similaire à celui qui avait fait l'objet des précédents permis qui leur avaient été délivrés, elle n'a eu ni pour objet, ni pour effet de procéder au retrait du retrait du permis de construire du 23 septembre 2014. En conséquence, le moyen invoqué par M. et Mme D..., tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration doit, en tout état de cause, être écarté. En outre, le détournement de pouvoir allégué n'est pas davantage établi.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article U1-6 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Saint Thibéry : " Lorsque la majorité des constructions est à l'alignement sur une voie publique ou privée existante, les constructions doivent être édifiées à l'alignement, afin de conserver le caractère du centre historique. Dans les autres cas, un retrait est autorisé, sa distance n'est pas réglementée ".
12. Lorsqu'une construction existante n'est pas conforme à une ou plusieurs dispositions d'un plan local d'urbanisme régulièrement approuvé, un permis de construire ne peut être légalement délivré pour la modification de cette construction, sous réserve de dispositions de ce plan spécialement applicables à la modification des immeubles existants, que si les travaux envisagés rendent l'immeuble plus conforme aux dispositions réglementaires méconnues ou s'ils sont étrangers à ces dispositions.
13. Pour l'application de la règle citée au point précédent, les travaux envisagés afin de surélever de deux niveaux le bâtiment existant implanté à l'arrière du mur d'enceinte d'une hauteur de 4,50 mètres, édifié à l'alignement de l'avenue d'Agde, sans modifier ce mur et dont il est séparé par une cour intérieure, sont étrangers aux dispositions de l'article U1-6 du règlement du PLU qui ne visent que l'implantation des constructions de premier rang à l'alignement des voies publiques. Dès lors, le moyen manque en droit.
14. En troisième lieu, l'article U1-11 du règlement du plan local d'urbanisme, relatives à l'aspect extérieur des constructions énonce, à la suite de la reproduction intégrale de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, des dispositions générales aux termes desquelles " les dispositions citées précédemment ne visent en aucun cas à produire un mimétisme des caractéristiques anciennes ; la conception architecturale contemporaine est autorisée dans la mesure où elle fait preuve d'une prise en compte des spécificités des tissus urbains anciens. En aucun cas les constructions et installations à réaliser ou à modifier ne doivent par leur architecture, leurs dimensions ou leur aspect extérieur porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels et urbains ". En outre, des dispositions particulières complètent l'ensemble et portent notamment sur les toitures à créer, les toitures existantes et les ouvertures en toiture. En vertu de l'article U1 11 C 1), toute nouvelle toiture devra respecter les orientations, pentes et matériaux de couvrement ancien qui caractérise le centre ancien et, ainsi, privilégiera l'orientation générale de l'ensemble urbain et assurera la continuité des faîtages et lignes d'égouts.
15. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans annexés à la demande de permis de construire, que le projet visant notamment la réalisation d'une terrasse au premier niveau du bâtiment envisagé par surélévation de l'existant, n'a pas pour vocation d'assurer la couverture d'une partie du bâtiment projeté. Par ailleurs, ce bâtiment comporte une toiture à deux pentes, conformément aux dispositions de l'article U1-11 du règlement. Dès lors, le moyen invoqué par M. et Mme D..., fondé sur le non-respect de ces dispositions doit être écarté.
16. En dernier lieu, en vertu du règlement de la zone SUE 2 du règlement du plan de prévention des risques d'inondation, définie comme étant un secteur urbanisé endigué, sont notamment admises les modifications, extensions de constructions existantes dans la limite de 20 m² d'emprise au sol, la création de logement ou la reconstruction de bâtiments vétustes, même avec changement de destination.
17. Il ressort des pièces du dossier, notamment tant des mentions apposées sur la demande de permis de construire que du plan de masse annexé à cette demande que le projet prévoit l'extension du bâtiment existant par sa surélévation, l'emprise au sol étant portée de 139,50 m² à 158,79 m². En se bornant à produire, à l'appui de leur argumentation, des croquis manuscrits indiquant des mesures estimatives de la cour intérieure sur laquelle l'emprise s'effectue, M. et Mme D... n'établissent pas que le projet autorisé emporterait une emprise au sol excédant le seuil ainsi limité à 20 m². Le moyen doit, en conséquence, donc être écarté.
18. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de la régularité du jugement attaqué, M. et Mme A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du maire de la commune de Saint-Thibéry du 24 mars 2016. Dès lors, ce jugement doit être annulé et la demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif doit être rejetée.
Sur le permis de construire du 29 juillet 2015 :
19. La demande de M. et Mme D... dirigée contre l'arrêté du maire de la commune de Saint-Thibéry du 24 mars 2016 étant rejetée, il n'y a pas lieu, ainsi qu'il a été dit au point 3, de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme A... dirigées contre le jugement par lequel le tribunal administratif a annulé le permis de construire initial du 29 juillet 2015.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme A..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. et Mme D... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. et Mme D... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'a pas lieu de statuer sur la requête n° 17MA01706 de M. et Mme A....
Article 2 : Le jugement n° 1602193 du tribunal administratif de Montpellier du 31 mars 2017 est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Saint-Thibéry du 24 mars 2016 est rejetée.
Article 4 : M. et Mme D... verseront globalement à M. et Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de M. et Mme D... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...A..., à M. C... D...et à Mme G... D....
Copie en sera adressée à la commune de Saint-Thibéry.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente,
- Mme Simon, présidente-assesseure,
- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.
Lu en audience publique, le 11 décembre 2018.
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N°s 17MA01607 - 17MA01608