I. Par une requête, enregistrée le 20 mars 2017, sous le n° 17MA01235, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 février 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour dans le mois de la notification l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône d'instruire à nouveau sa demande et de prendre une décision dans le mois de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du Code de Justice Administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour n'est pas motivée ;
-ce refus méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il remplit les conditions énoncées par la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 pour obtenir la régularisation de sa situation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ;
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée le 20 mars 2017, sous le n° 17MA01236, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 21 février 2017 ;
2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jours de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement contesté présenterait des conséquences difficilement réparables car le il perdrait ses contrats de travail et serait séparé de ses enfants et de son épouse ;
- les moyens énoncés dans sa requête sont sérieux ;
- la décision de refus de titre de séjour n'est pas motivée ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il remplit les conditions énoncées par la circulaire du 28 novembre 2012 pour la régularisation par le travail ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Portail a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par un arrêté du 26 septembre 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé à M.A..., ressortissant Philippin, la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que, par un jugement du 21 février 2017, dont le requérant relève en appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ; que M. A... demande, en outre, à la Cour d'ordonner le sursis à l'exécution de ce jugement ; que les requêtes sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué mentionne les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le préfet des Bouches-du-Rhône a entendu faire application pour refuser à M. A... la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il précise que l'intéressé, dont le conjoint est également en situation irrégulière, et dont l'enfant est scolarisé depuis moins de trois ans, ne justifie pas de l'ancienneté et de la stabilité des liens familiaux créés en France ; qu'il comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 1er et 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, aujourd'hui codifiée au code des relations entre le public et l'administration, doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; et qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;
4. Considérant que M. A... et son épouse, compatriote également en situation irrégulière, établissent exercer en France une activité professionnelle, sous la forme de chèques emploi-service ; que, toutefois, les intéressés ne justifient pas d'une présence en France avant 2010 ; que si leur deuxième enfant est né en 2011 à Marseille, leur premier enfant, né en 2008, réside en république des Philippines, où il est confié à la garde de sa grand-mère maternelle ; qu'eu égard à la présence récente en France des épouxA..., et des liens familiaux qu'ils ont conservés dans leur pays d'origine, ils ne justifient pas avoir constitué en France le centre de leurs intérêts familiaux ; que, dans ces conditions, en refusant à M. A..., par l'arrêté attaqué, la délivrance d'un titre de séjour, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise et n'a pas dès lors, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'au regard des conditions du séjour en France de M. A..., telles que décrites au point 4, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé d'une décision portant refus de titre de séjour ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'en dehors des cas où il satisfait aux conditions fixées par la loi, ou par un engagement international, pour la délivrance d'un titre de séjour, un étranger ne saurait se prévaloir d'un droit à l'obtention d'un tel titre ; que s'il peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que la décision du préfet, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ; que, par suite, M. A... ne saurait utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen selon lequel le préfet des Bouches-du-Rhône aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de ladite circulaire, est inopérant ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour, notamment lorsque la délivrance d'un titre de séjour a été refusée à l'étranger; que la décision de refus de titre de séjour étant suffisamment motivée ainsi qu'il a été dit au point 2, le moyen selon lequel l'obligation de quitter le territoire, qui est motivée en droit, ne serait pas motivée, doit être écarté ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard aux conditions de séjour en France du requérant, telles que décrites au point 4, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois ; qu'il n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur la situation personnelle du requérant d'une telle décision ;
9. Considérant, en troisième lieu, que M. A... n'établissant pas l'illégalité de la décision par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant au sursis à l'exécution du jugement attaqué :
11. Considérant que le présent arrêt statue sur les conclusions à fin d'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 février 2017 ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet ; que, par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation et constate qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées par M. A... n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant au sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 février 2017.
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 31 août 2017, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Busidan, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 septembre 2017.
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N° 17MA01235, 17MA01236