Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 18 août 2017, et par un mémoire complémentaire, enregistré le 8 mars 2018, Mme A...et M.F..., représentés par la Selarl d'avocats Blanc-Tardivel, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 20 juin 2017 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 septembre 2015 du maire de la commune de Baron ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Baron de procéder à un nouvel examen de leur demande de permis de construire dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Baron la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la décision en litige est insuffisamment motivée ;
- le projet d'extension de la construction existante, d'une superficie totale extérieure supérieure à 60 m2, ne méconnait pas l'article NC2 du règlement du plan d'occupation des sols ;
- ils n'ont pas modifié sans autorisation préalable la destination de la construction initiale en application de l'article R. 123-9 16° b) du code de l'urbanisme ;
- le projet ne consiste pas en une construction nouvelle, mais constitue une extension de la construction existante.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2017, la commune de Baron, représentée par la SCP d'avocats D...-D'Albenas, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge solidaire des requérants la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carassic,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me E...pour Mme A...et M. F...et Me D...pour la commune de Baron.
Une note en délibéré a été enregistrée le 15 janvier 2019 pour Mme A...et M. F....
Considérant ce qui suit :
1. Les requérants sont propriétaires d'une parcelle cadastrée AC n° 10 située Mas de Clary sur le territoire de la commune de Baron. Ils ont déposé le 23 juillet 2015 une demande de permis de construire pour étendre l'habitation existant sur cette parcelle. Par l'arrêté en litige du 16 septembre 2015, le maire de la commune de Baron a refusé de leur délivrer ce permis de construire. Par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté la demande des requérants tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, pour refuser le permis de construire en litige, le maire de la commune de Baron s'est fondé sur deux motifs tirés, d'une part, de ce que le projet méconnaît l'article NC2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune et, d'autre part, et au surplus, de ce qu'il porte sur une construction existante qui a été transformée en habitation sans autorisation d'urbanisme préalable et contrairement à la vocation de la zone NC. Le refus en litige est ainsi suffisamment motivé en fait et en droit.
3. En deuxième lieu, le règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Baron, approuvé le 15 avril 1996 et modifié le 10 avril 2000, définit le caractère de la zone NC comme un "espace naturel à protéger en raison de la valeur économique des sols. Viticulture et petit maraîchage constituent les activités principales qui intéressent l'espace agricole, lequel occupe l'essentiel du territoire de la commune.". L'article NC1 du règlement autorise notamment, outre les constructions nécessaires au fonctionnement des exploitations agricoles, "l'extension des constructions existantes d'une superficie égale ou supérieure à 60 m2 à la date de publication du plan d'occupation des sols, dans la limite de 150 m2 de surface de plancher hors oeuvre nette totale (y compris l'existant)". L'article NC2 interdit les occupations et utilisations des sols non visées à l'article NC 1 et notamment l'extension des bâtiments dont la superficie est inférieure à 60 m2.
4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la demande de permis de construire, que le projet des requérants consiste en l'extension d'un bâtiment existant depuis 1960 par la création d'un étage, de l'édification d'une terrasse, d'un toit supportant des panneaux photovoltaïques et en une isolation extérieure des fenêtres. La notice explicative du dossier de demande mentionne un bâtiment existant d'une surface de 62 m2, qui correspondrait selon les requérants au "nu extérieur des façades" de la construction existante que le projet vise à agrandir, alors que la rubrique 4.4 du "tableau des surfaces" joint à cette demande renseignée par les pétitionnaires mentionne une surface de 45 m2, qui correspondrait selon eux au "nu intérieur des murs de façade". Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan du géomètre-expert établi le 9 janvier 2018 produit par les requérants pour la première fois en appel, qu'à la date de la décision en litige, l'emprise au sol de la partie bâtie existante est de 62,3 m2. Par suite, le premier motif tiré de ce que la superficie de la construction existante serait inférieure à celle de 60 m2 exigée par l'article NC1 du règlement du plan d'occupation des sols est entaché d'une erreur de fait. Si la décision en litige se fonde aussi sur la circonstance que le projet va aboutir en un triplement de la surface initiale et ne peut être ainsi regardé comme procédant à une "extension", qui doit être limitée à 50 % de la surface initiale d'un bâtiment selon la commune, de la construction existante au sens de l'article NC2 du règlement du plan, il ressort des pièces du dossier que le projet crée une superficie de 105 m2 supplémentaire à la construction existante de 62,3 m2 et ne triple ainsi pas la superficie initiale de la construction. En tout état de cause, les rédacteurs du règlement du plan d'occupation des sols de la commune, en mentionnant dans l'article NC1 une "extension" et non une "extension mesurée" des constructions existantes et en autorisant une surface maximale de 150 m2 pour l'extension d'un bâtiment existant d'au moins 60 m2, n'ont pas entendu limiter à 50 % l'extension de la construction initiale. Par suite, le second motif tiré de ce que le projet en litige ne constituerait pas une extension de la construction existante en méconnaissance de l'article NC2 du règlement ne pouvait pas non plus fonder légalement la décision en litige.
5. Toutefois, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas la requérante d'une garantie procédurale liée au motif substitué. La commune en invoquant dans ses écritures d'appel, communiquées aux requérants, le motif surabondant de la décision en litige tiré de ce que les travaux porteraient sur un bâtiment dont le changement de destination de garage en maison d'habitation n'a pas été autorisé et ne pouvait pas l'être au regard de sa situation en zone agricole, doit être regardée comme demandant à la Cour de procéder à une substitution de motifs.
6. Aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme : " Les constructions, même ne comportant pas de fondations, doivent être précédées de la délivrance d'un permis de construire. / Un décret en Conseil d'Etat arrête la liste des travaux exécutés sur des constructions existantes ainsi que des changements de destination qui, en raison de leur nature ou de leur localisation, doivent également être précédés de la délivrance d'un tel permis. ". Aux termes de l'article R. 421-14 de ce code dans sa rédaction alors applicable : " Sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires : (...) c) Les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination entre les différentes destinations définies à l'article R. 123-9.(...) Pour l'application du c du présent article, les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-17 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Doivent être précédés d'une déclaration préalable lorsqu'ils ne sont pas soumis à permis de construire en application des articles R. 421-14 à R. 421-16 les travaux exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires, et les changements de destination des constructions existantes suivants : (...) b) Les changements de destination d'un bâtiment existant entre les différentes destinations définies à l'article R. 123-9 ; pour l'application du présent alinéa, les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal (...). ".
7. Lorsqu'une construction a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, il appartient au propriétaire qui envisage d'y faire de nouveaux travaux de déposer une déclaration ou de présenter une demande de permis portant sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu ou auront pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé ou de changer sa destination. Il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une telle déclaration ou demande de permis, de statuer au vu de l'ensemble des pièces du dossier d'après les règles d'urbanisme en vigueur à la date de sa décision.
8. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'acte de vente notarié du 9 mars 1998, que la parcelle AC n°10 acquise par les requérants ne supportait à cette date qu'un bâtiment à usage de garage. Le changement de destination de ce local en une construction à usage d'habitation en 2006 était soumis à l'exigence d'un permis de construire en application des dispositions de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme. Si les requérants font valoir que ce garage constituerait un local accessoire à l'habitation principale sise sur le tènement foncier qu'ils avaient acquis précédemment le 7 novembre 1989, il ressort des pièces du dossier que ce garage distant de la résidence principale ne saurait être regardé comme l'accessoire de l'habitation principale. Ce garage a été transformé, sans aucune autorisation, par les requérants en bâtiment à usage d'habitation, dont il est demandé l'extension par le projet en litige. Le dossier de demande de permis de construire en cause ne porte pas sur ces travaux irrégulièrement réalisés. Il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Par suite, il y a lieu d'accueillir la substitution de motifs demandée par la commune, dès lors que le maire a pu légalement refuser de délivrer le permis en litige portant sur l'extension d'une construction à usage d'habitation irrégulièrement créée, en l'absence d'autorisation préalable.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...et M. F...ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'enjoindre au maire de réexaminer leur demande doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge de la commune de Baron, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire des requérants la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Baron au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1 : La requête de Mme A...et de M. F...est rejetée.
Article 2 : Mme A...et M. F...verseront solidairement à la commune de Baron la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., à M. B...F...et à la commune de Baron.
Délibéré après l'audience du 15 janvier 2019, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente de chambre,
- Mme Simon, président-assesseur,
- Mme Carassic, première conseillère.
Lu en audience publique, le 29 janvier 2019.
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N°17MA03643