Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 février 2016, et un mémoire enregistré le 15 février 2016, la commune de Maxéville, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) - d'annuler l'ordonnance du 20 janvier 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy ;
2°) - de condamner la SMACL à lui payer à titre provisionnel la somme de 204 097 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2015 ;
3°) - de condamner la SMACL à lui verser une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- l'existence de la créance dont elle se prévaut procède de l'exécution du contrat d'assurance qu'elle a souscrit auprès de la SMACL ;
- l'existence d'un contrat liant l'Etablissement Public Foncier de Lorraine (EPFL) à la société d'assurances Allianz ne constitue pas un motif de refus de versement intégral par la SMACL de l'indemnité en application du contrat précité ;
- la prescription biennale n'est pas acquise ;
- l'interprétation des stipulations de l'article 6.3 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) n'empêche pas le juge des référés de statuer ;
- le recours préalable prévu par l'article 6.3 du CCAP n'est qu'une possibilité et ne constitue pas une obligation ;
- le quantum de 204 097 euros réclamé à titre de provision a été fixé par la SMACL elle-même ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2016, la Société Mutuelle d'Assurances des Collectivités Locales (SMACL), représentée par MeB..., demande à la Cour :
1°) - de rejeter la requête de la commune de Maxéville ;
A titre subsidiaire :
2°) - de dire et juger la requête de la commune de Maxéville irrecevable et de réformer l'ordonnance du 20 janvier 2015 du juge des référés du tribunal administratif de Nancy sur ce point ;
En tout état de cause :
3°) - de condamner la commune de Maxéville à lui verser une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la créance dont se prévaut la commune de Maxéville à son encontre est sérieusement contestable ;
- l'existence d'une difficulté d'interprétation du contrat la liant à la commune de Maxéville soulève une difficulté sérieuse qui ne relève pas de l'office du juge du référé-provision ;
- le bien-fondé de la créance proprement dite porte à contestation ;
- la commune de Maxéville a manqué à certaines de ses obligations contractuelles, notamment en ne l'informant pas de changements dans les conditions d'occupation des locaux sinistrés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Par convention prenant effet au 1er juin 2004, l'Etablissement public foncier de Lorraine (EPFL) a mis à la disposition de la commune de Maxéville deux immeubles, dont l'un à usage d'habitation. Aux termes de ladite convention, la commune de Maxéville s'engageait à assumer l'entière responsabilité de ces biens tant sur le plan juridique que sur le plan matériel. Elle a, à ce titre, conclu, par acte d'engagement du 3 septembre 2009, un marché public d'assurances " dommages aux biens et risques annexes " avec la Société Mutuelle d'assurance des Collectivités Locales (SMACL). Parallèlement, l'EPFL a également contracté une assurance dommages aux biens auprès de la société Allianz. Le 12 avril 2013, un incendie d'origine inconnue s'est déclaré dans l'immeuble d'habitation qui avait été mis à la disposition de l'association " Materia Prima " par la commune. Les désordres ont été chiffrés à la somme de 237 231 euros. La SMACL a, dans un premier temps, accepté de verser à la commune une somme de 19 066 euros correspondant aux premières dépenses d'urgence et de mise en sécurité. La commune s'est ensuite trouvée confrontée au refus tant de la SMACL que de la société Allianz de prendre en charge le sinistre. La commune de Maxéville interjette appel de l'ordonnance du 20 janvier 2016 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à condamner la SMACL à lui verser, à titre de provision, une somme de 204 097 euros.
2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. (...) ". Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état.
3. La SMACL a opposé, devant le premier juge, une exception d'irrecevabilité à la demande de la commune tirée de ce que celle-ci n'a pas engagé la procédure de recours préalable prévue par l'article 6.3 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) afférent au marché litigieux aux termes duquel : " Le règlement des litiges s'effectue selon les conditions du code des marchés publics et notamment les articles 127 et suivants du code précité ".
4. Aux termes de l'article 127 du code des marchés publics alors applicable : " Les pouvoirs adjudicateurs et les titulaires de marchés publics peuvent recourir aux comités consultatifs de règlement amiable des différends ou litiges relatifs aux marché publics dans des conditions fixées par décret. Ces comités ont pour mission de rechercher les éléments de droit ou de fait en vue d'une solution amiable et équitable. (...) ". L'article 128 du même code est relatif aux procédures d'arbitrage.
5. Aux termes de l'article 2.1 " Pièces constitutives du marché - ordre de priorité " du CCAP du marché litigieux : "Les pièces constitutives du marché comprennent : l'acte d'engagement, le cahier des clauses administratives particulières (CCAP), le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) (...) ". La SMACL soutient qu'il résulte de ces stipulations contractuelles ainsi que de celles, précitées, de l'article 6.3 du même CCAP que les parties ont expressément entendu saisir le comité consultatif de règlement amiable des différends relatifs aux marchés publics avant de porter le litige devant le tribunal administratif.
6. La commune de Maxéville, qui ne conteste pas l'absence de saisine du comité consultatif de règlement amiable des différends ou litiges relatifs aux marchés publics, fait valoir que le recours préalable prévu par cet article ne constitue qu'une possibilité et non une obligation.
7. L'interprétation de la volonté des parties sur ce point soulève, ainsi que l'a relevé le premier juge, une difficulté sérieuse sur la recevabilité de la requête de la commune de Maxéville relevant de la seule compétence du juge du fond et qu'il n'appartient pas au juge des référés de trancher. Dès lors, l'obligation dont la commune de Maxéville se prévaut à l'appui de sa demande de provision ne peut être regardée, en l'état de l'instruction, comme n'étant pas sérieusement contestable.
8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Maxéville n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SMACL, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Maxéville demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Maxéville la somme que demande la SMACL sur le fondement des mêmes dispositions.
ORDONNE :
Article 1er : La requête de la commune de Maxéville est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la SMACL présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Maxéville et à la Société Mutuelle d'Assurances des Collectivités Locales.
Fait à Nancy, le 10 mai 2016.
La présidente de la Cour
Signé :
La République mande et ordonne au préfet de Meurthe-et-Moselle, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition conforme
Le Greffier en chef par intérim,
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16NC00201