Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 juillet 2017 et le 23 mars 2018 Mmes B...et E...C..., représentées par MeD..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon ;
2°) d'annuler la décision de la commission départementale d'aménagement foncier rejetant leur réclamation ;
3°) de mettre à la charge du département de la Haute-Saône une somme de 3 000 euros à leur verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la parcelle ZB 65, qui a été attribuée au compte de propriété n° 638, n'aurait pas dû être incluse dans le périmètre de remembrement car elle est traversée par une ligne à haute tension ; il en est de même de la parcelle d'apport C 33 qui était classée en zone 1AUB dans le plan local d'urbanisme ;
- le plan joint à la décision de la commission départementale d'aménagement foncier n'a pas été soumis à la commission intercommunale d'aménagement foncier et ne leur a pas été communiqué ;
- la commission départementale d'aménagement foncier n'a pas répondu suffisamment précisément au moyen tiré de ce que la parcelles ZB 65 avait été classée à tort partiellement en T2 ;
- la surface, la valeur et le classement partiel en T2 de la parcelle ZB 65 qui leur a été attribuée sont erronés ;
- le classement en T2 de la parcelle d'attribution ZI 32 est erroné ;
- le classement en T2 de la parcelle d'apport C 33 est erroné ;
- la procédure d'aménagement foncier, qui a eu pour but de favoriser la réalisation d'un lotissement et la constitution d'une réserve foncière par la commune de Frahier et Chatebier, est entachée de détournement de pouvoir ;
- des parcelles ont été attribuées à une personne qui n'avait pas la qualité de propriétaire et les comptes d'autres propriétaires ne sont pas équilibrés, ce qui révèle un détournement de pouvoir et une erreur de droit.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 mars et le 29 mars 2018, le département de la Haute-Saône, représenté par la SCP Charrel et associés conclut :
- au rejet de la requête ;
- à ce que soit mise à la charge de Mmes C...une somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le moyen relatif au défaut de motivation de la commission départementale d'aménagement foncier est irrecevable, aucun moyen de légalité externe n'ayant été présenté devant le tribunal administratif et n'est, en tout état de cause, pas fondé ;
- l'article R. 123-2 du code rural et de la pêche maritime n'est pas méconnu ;
- le principe d'équivalence n'est pas méconnu ; en effet, la superficie de la parcelle ZB 65 est exacte, le classement de la parcelle n'est pas erroné ; le classement de la parcelle ZI 32 n'est pas erroné ni celui de la parcelle C 33 ;
- le moyen tiré de ce qu'un attributaire de terres n'était pas propriétaire est inopérant et manque en fait ;
- le compte en litige est équilibré ;
- le moyen critiquant le périmètre de l'aménagement foncier est inopérant et n'est pas fondé, la parcelle ZB 65 ne concerne que les espaces classés boisés et n'interdit pas le classement de parcelles agricoles ; le moyen relatif à la parcelle C 33 n'est pas assorti de précisions ;
- le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi et le moyen est inopérant.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., pour le département de la Moselle.
Considérant ce qui suit :
1. Mmes E...et B...C...ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 10 décembre 2014 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier de Haute-Saône a rejeté leur réclamation relative à leur compte de propriété n° 638 dans le cadre du remembrement intercommunal de Frahier et Chatebier et Errevet. Elles interjettent appel du jugement du 13 juin 2017 par lequel le tribunal administratif a rejeté leur demande.
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le périmètre de remembrement a été fixé par arrêté préfectoral du 12 juillet 2010. S'il a été modifié par un arrêté préfectoral du 2 mars 2015, c'est uniquement pour tenir compte des parcelles prises en compte par les commissions départementales d'aménagement foncier. Il est constant que MmesC... n'ont pas attaqué dans les délais légaux ces arrêtés dont il n'est pas contesté qu'ils ont fait l'objet d'une publicité régulière. Par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, les appelantes n'étaient pas recevables à en invoquer l'illégalité à l'occasion de leur demande dirigée contre la décision de la commission départementale d'aménagement foncier statuant sur leur réclamation. Le moyen d'appel tiré par les requérantes de ce que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, elles n'étaient pas en mesure d'attaquer l'arrêté préfectoral du 2 mars 2015 dont elles n'avaient pas connaissance à la date de la décision contestée de la commission départementale d'aménagement foncier du 10 décembre 2014, ne peut être accueilli, dès lors que l'arrêté préfectoral était postérieur à cette décision. En tout état de cause, l'arrêté préfectoral du 2 mars 2015 ne concerne pas la parcelle ZD 65, située au " Au CU Buisson " qui a été attribuée au compte de propriété n° 638 et dont les requérantes soutenaient qu'elle n'aurait pas dû être incluse dans le périmètre de remembrement en raison de la présence d'une ligne électrique. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité du périmètre de remembrement ne peut être accueilli.
3. En deuxième lieu, les appelantes soutiennent qu'un plan daté du 2 avril 2015 n'a pas été soumis à la commission intercommunale d'aménagement foncier et ne leur a pas été communiqué avant l'introduction de leur demande de première instance. Toutefois, à supposer que le plan mentionné ait été joint au procès-verbal de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier daté du 2 avril 2015, ce plan ne pouvait être communiqué à la commission intercommunale d'aménagement foncier qui a statué avant la commission départementale d'aménagement foncier. D'autre part, aucune disposition n'exige qu'un tel plan soit communiqué avec la décision de la commission départementale d'aménagement foncier.
4. En troisième lieu, en répondant à Mme C...que "le classement des parcelles au lieu-dit "CU Buisson" est conforme au pointage effectué sur le terrain pendant les opérations de classement des terres", la commission départementale d'aménagement foncier ne s'est pas bornée, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, à apporter une réponse générale qui ne faisait pas référence à leur parcelle et a suffisamment répondu à leur réclamation qui ne comportait pas de précisions.
5. En quatrième lieu, les requérantes soutiennent que la surface, les limites et la valeur de la parcelle ZD 65 retenues par la commission départementale d'aménagement foncier sont inexactes. Toutefois, en se bornant à faire valoir d'abord que la surface et le classement de la parcelle sont différents de ceux retenus par la commission communale d'aménagement foncier qui avait proposé l'attribution d'une parcelle ZD 64 à un autre compte, les appelantes ne démontrent pas le bien-fondé de leurs allégations, alors notamment qu'il n'est pas établi que les parcelles ZD 64 et ZD 65 étaient identiques. S'il est vrai que la commission départementale d'aménagement foncier a décidé de confirmer la décision de la commission intercommunale d'aménagement foncier, la circonstance que la surface de la parcelle ZD 65, qui est de plus de 2 hectares, comporte une légère différence de 4 ca entre les décisions des deux commissions, ne suffit pas à démontrer que la commission départementale d'aménagement foncier aurait commis une erreur quant à la surface de cette parcelle.
6. Aucun texte n'exige que le procès-verbal de remembrement précise pour chaque parcelle, la valeur et la surface de ses parties affectées aux différentes classes définies par les commissions de remembrement. Ainsi, la circonstance que la valeur de la parcelle ZD 65 soit indiquée de façon globale en mentionnant qu'elle comporte des terres de classe 2, 4, 7, 8 et 11 sans que soient indiquées les superficies de chacune de ces classes n'est pas de nature à entacher d'illégalité ce procès-verbal, ni à préjudicier aux droits des intéressées. En outre, celles-ci ont été destinataires d'un avis les informant qu'elles pouvaient consulter à la mairie durant un mois le dossier visé à l'article R. 123-6 du code rural et de la pêche maritime et ont reçu un bulletin individuel sur lequel figuraient les biens qui paraissaient leur appartenir, soumis aux opérations de remembrement, ainsi que leur classement et la valeur attribuée par la commission intercommunale d'aménagement foncier. Par suite, le moyen ne peut être accueilli.
7. Selon le mémoire explicatif communiqué par le département de la Haute-Saône, la classe T2 correspond à : "Proximité des maisons - zone NA du PLU - terrain à vocation particulière à réaménager dans la même zone - parcelle en zone sensible à proximité de zone du PLU".
8. Il ressort des pièces du dossier que la partie de la parcelle ZD 65 classée en T2 est celle qui longe la rue d'Everret qui se trouve à proximité immédiate d'une zone AU du plan local d'urbanisme de la commune et de maisons. Ainsi, le classement en T2 de cette partie de parcelle, qui n'est pas enclavée contrairement à ce que soutiennent les requérantes, n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
9. En cinquième lieu, les appelantes soutiennent que c'est à tort que la parcelle d'attribution ZI 32 située "aux champs de la goutte" a été classée en T2, alors qu'elle est grevée d'une servitude d'utilité publique tenant à la présence d'une canalisation d'assainissement. Cependant, l'existence d'une telle servitude, encore moins d'une servitude qui aurait dû être prise en considération dans le cadre du remembrement, ne ressort d'aucune des pièces du dossier, l'article R. 127-10 du code rural et de la pêche maritime prévoyant que seuls les droits réels signalés au président de la commission communale d'aménagement foncier doivent être mentionnés au procès-verbal du remembrement, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce. De plus, les appelantes n'indiquent pas en quoi la présence d'une canalisation sur la parcelle serait de nature à empêcher son classement en classe T2.
10. En sixième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le remembrement qui concernait les territoires des communes de Frahier et Chatebier et d'Errevet, aurait en réalité eu pour but de permettre à la commune de Frahier et Chatebier de réaliser un lotissement sur une parcelle de 26 ares appartenant aux appelantes et que celles-ci aurait refusé de vendre à la commune, alors même que cette parcelle a été attribuée à la commune qui y aurait réalisé un lotissement en 2016. Il n'est pas non plus démontré que le remembrement avait pour but de permettre à la commune de créer une réserve foncière, dès lors qu'une des parcelles d'apport de Mmes C...aurait été attribuée à une autre propriétaire qui l'aurait ensuite revendue à la commune.
11. En septième lieu, les moyens tirés de ce que des illégalités affecteraient les comptes de propriété de tiers est inopérant, les requérantes ne pouvant contester que leurs comptes de propriété.
12. Il résulte de ce qui précède que les appelantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Haute-Saône, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les appelantes demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de mettre solidairement à la charge de Mmes C...une somme de 1 500 euros à verser au département de la Haute-Saône au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mmes C...est rejetée.
Article 2 : Mmes B...et E...C...verseront solidairement au département de la Haute-Saône une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C..., à Mme E...C...et au département de la Haute-Saône.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Saône.
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N° 17NC01834