Par un jugement n° 1704126 du 6 décembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à l'annulation de la décision de refus de séjour.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 janvier 2018 et 26 février 2019, Mme C...A..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1704126 du 6 décembre 2017 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler la décision du 7 juillet 2017 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour en France ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement de réexaminer sa situation, dans un délai déterminé, au besoin sous astreinte ;
4°) de surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur la demande d'aide juridictionnelle, subsidiairement de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son avocat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Mme A...soutient que :
- le préfet, qui s'est fondé exclusivement sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, a méconnu l'étendue de sa compétence ;
- elle remplit les conditions prévues par l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle ne peut pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2019, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les observations de MeB..., pour MmeA..., ainsi que celles de Mme A...ont été entendues au cours de l'audience publique
Considérant ce qui suit :
1. Mme C...A..., ressortissante albanaise, est entrée en France le 17 novembre 2014 en vue d'y solliciter l'asile. A la suite du rejet de sa demande, elle a sollicité son admission au séjour en faisant valoir son état de santé. Par un arrêté du 7 juillet 2017, le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office à l'expiration de ce délai. Par une ordonnance du 31 août 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif de Strasbourg a transmis au tribunal administratif de Nancy les conclusions de la demande de Mme A...tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de la décision fixant le délai de départ volontaire et de la décision fixant le pays de destination.
2. Mme A...relève appel du jugement du 6 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à l'annulation de la décision de refus de séjour.
Sur les conclusions relatives à l'aide juridictionnelle :
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A...s'est vu accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 mars 2018. Dès lors, il n'y a plus lieu de surseoir à statuer sur sa requête ni de statuer sur ses conclusions subsidiaires tendant à l'octroi de l'aide juridictionnelle provisoire.
Sur la légalité de la décision contestée :
4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
5. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte-tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi.
6. Dans son avis du 29 juin 2017, le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que la dépression et le syndrome de stress post-traumatique dont souffre Mme A...nécessitent une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il ressort de l'arrêté contesté que le préfet a fait sienne cette appréciation.
7. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet disposait, pour se prononcer sur la situation de Mme A...au regard des dispositions de l'article L. 313-11 précité, d'autres éléments que l'avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dès lors, il a pu, sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, se fonder sur cet élément et se l'approprier.
8. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme A...suit un traitement psychotrope comprenant, notamment, la prise quotidienne de Tercian et d'Alprazolam. Si les attestations qu'elle produit, établies par un médecin albanais et par un laboratoire pharmaceutique, indiquent que ces deux médicaments ne sont pas commercialisés en Albanie, ces attestations sont anciennes et ne font pas état de l'indisponibilité, dans ce pays, de tout autre médicament comprenant le même principe actif ou un principe actif équivalent. Au demeurant, la requérante ne conteste pas la disponibilité des médicaments de substitution cités par le préfet à partir des informations du ministère de la santé en Albanie. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le lien entre la pathologie dont souffre Mme A...et les évènements traumatisants qu'elle dit avoir vécus en Albanie soit tel, qu'il ne permette pas, dans son cas, d'envisager un traitement effectivement approprié dans ce pays. Dans ces conditions, l'appréciation du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration quant à la possibilité pour l'intéressée de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, n'est pas remise en cause. Dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant d'admettre au séjour MmeA....
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de Mme C...A...tendant au bénéfice de l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle et au sursis à statuer.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
2
N° 18NC00016