Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 30 janvier 2017, 18 janvier et 16 mars 2018, M. A...C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance no 1602388 du 30 novembre 2016 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) de renvoyer l'affaire devant ce même tribunal afin qu'il y soit statué au fond ;
3°) subsidiairement, d'annuler l'article 6 de l'arrêté du préfet de la Marne du 11 février 2015 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. C...soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande comme tardive, dès lors que le délai de recours contentieux n'avait pas commencé à courir ;
- l'affaire doit être renvoyée au tribunal afin qu'il bénéficie du double degré de juridiction ;
- l'arrêté, pris en méconnaissance de l'article R. 214-17 du code de l'environnement, est entaché d'un vice de procédure ;
- le préfet ne pouvait pas légalement imposer la construction d'un dispositif de franchissement piscicole sur le barrage de prise d'eau du moulin de Vroil, dès lors que le cours d'eau La Chée n'est pas classé au titre de l'article L. 214-17-I-2° du code de l'environnement.
Par un mémoire, enregistré le 9 janvier 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Le ministre soutient que la demande présentée par M. C...devant le tribunal était irrecevable et qu'aucun des moyens qu'il soulève n'est fondé.
Le 23 janvier 2018, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la tardiveté de la demande présentée devant le tribunal.
A la suite de cette information, M. C...a présenté des observations le 25 janvier 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- la loi n° 2000-321 du12 avril 2000 modifiée, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- le décret n° 2001-492 du 6 juin 2001 pris pour l'application du chapitre II du titre II de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et relatif à l'accusé de réception des demandes présentées aux autorités administratives ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rees, premier conseiller,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour M.C....
Considérant ce qui suit :
1. M. A...C..., propriétaire et exploitant d'une centrale hydroélectrique implantée en dérivation de la rivière La Chée, sur le territoire de la commune de Vroil, a présenté le 29 octobre 2013 une demande tendant à la reconnaissance du caractère fondé en titre à l'usage de l'eau et à la définition de la consistance légale de son installation. Par un arrêté du 11 février 2015, le préfet de la Marne l'a autorisé à disposer de l'énergie mais a assorti cette autorisation de prescriptions, notamment à l'article 6 en ce qui concerne l'établissement et l'entretien de dispositifs destinés à assurer la circulation des poissons et éviter leur pénétration dans la turbine. Par un courrier du 18 juin 2015, reçu en préfecture le 26 juin, M. C...a formé un recours gracieux tendant à la suppression de l'article 6 de cet arrêté. Sa demande, restée sans réponse, a été implicitement rejetée le 26 août 2015.
2. M. C...relève appel de l'ordonnance du 30 novembre 2016 par laquelle le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté comme tardive sa demande tendant à l'annulation de l'article 6 de l'arrêté du 11 février 2015.
3. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. C...a eu connaissance de l'arrêté attaqué au plus tard le 26 juin 2015, date à laquelle le préfet de la Marne a reçu son recours gracieux, alors que sa demande a été enregistrée au greffe du tribunal le 24 novembre 2016, soit 17 mois plus tard. S'il invoque le temps qui lui a été nécessaire pour avoir connaissance du coût des travaux requis et de l'impossibilité d'obtenir une aide publique, il ressort des pièces du dossier qu'il disposait de l'ensemble de ces informations dès le 26 juin 2015. Par conséquent, cette circonstance ne saurait justifier qu'il ait attendu près d'un an et demi avant d'exercer un recours juridictionnel. Le principe de sécurité juridique fait donc obstacle à ce que cette décision, dont M. C...a eu connaissance plus d'un an avant l'introduction de sa demande devant le tribunal administratif, puisse être contestée devant le juge administratif.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté comme tardive et par suite manifestement irrecevable sa demande tendant à l'annulation de l'article 6 de l'arrêté du 11 février 2015. Dès lors, ses conclusions à fin d'annulation du jugement et de renvoi de l'affaire au tribunal ou, subsidiairement, d'annulation de l'article 6 de l'arrêté contesté, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.
Par ces motifs,
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de la transition écologique et solidaire.
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N° 17NC00193