Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 juin 2019, M. et Mme D..., représentés par Me B..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 avril 2019 en tant qu'il a rejeté leurs demandes tendant à la décharge de l'obligation de payer et à la restitution des sommes déjà versées ;
2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme mise à leur charge par commandement de payer du 15 octobre 2015 et d'ordonner en conséquence la restitution des sommes outre les frais, majorations et pénalités de retard déjà recouvrées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ayant bien demandé au tribunal administratif la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu au titre des années 1997 et 1998 et le jugement du 2 juin 2004 ayant prononcé la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu au titre de ces deux années résultant des rehaussements en matière de bénéfices industriels et commerciaux, c'est à tort que le tribunal administratif a jugé le 30 avril 2019 que cette décharge n'avait pas concerné tous les rappels d'impôt sur le revenu en litige et a donc bien méconnu l'autorité de chose jugée le 2 juin 2004 ; en conséquence, il ne restait plus aucune somme en recouvrement à la suite de ce jugement, ce que l'administration avait d'ailleurs bien admis en procédant au dégrèvement total des impositions ;
- l'action en recouvrement était bien prescrite au 31 août 2004 ; compte tenu d'une mise en recouvrement le 31 août 2000, le délai de prescription a été interrompu par la saisine du tribunal administratif lequel a rendu son jugement le 2 juin 2004 qui a fait courir un nouveau délai expirant le 30 juin 2008 de sorte que la prescription a bien été acquise, étant précisé qu'ils ont bien fait opposition à poursuites le 18 avril 2012 contre les actes de poursuite du 17 avril 2012.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le moyen relatif à la prescription de l'action en recouvrement est irrecevable et que les autres moyens ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1405 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... ;
- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite de la vérification de comptabilité de l'activité de déménageur exercée par M. D..., l'administration fiscale a procédé à l'évaluation d'office, selon la procédure prévue à l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, des bénéfices industriels et commerciaux réalisés par l'intéressé au titre des années 1997 et 1998 suivant proposition de rectification du 27 mars 2000. C'est ainsi que s'agissant du bénéfice de l'année 1997, le service a procédé à des redressements par rapport au résultat déclaré tardivement de 174 419 francs portant sur des charges injustifiées et de 205 120 francs concernant des recettes regardées comme dissimulées et que s'agissant du bénéfice de l'année 1998, le vérificateur l'a évalué à 509 839 francs dont 274 640 francs provenant de recettes regardées comme dissimulées. Les suppléments d'impôt sur le revenu consécutifs à cette procédure de contrôle ont été mis en recouvrement le 31 août 2000 pour la somme de 182 058 francs en droits et pénalités au titre de l'année 1997 (27 754,56 euros) et de 196 426 francs en droits et pénalités au titre de l'année 1998 (29 944,95 euros). Par jugement du 2 juin 2004, devenu définitif, le tribunal administratif de Besançon a déchargé les époux D... " des suppléments d'impôt sur le revenu qui leur ont été assignés au titre des années 1997 et 1998 à la suite du rehaussement de leurs recettes imposables au titre des bénéfices industriels et commerciaux ". Par un premier avis de dégrèvement du 30 juin 2004, l'administration fiscale, en exécution de ce jugement, a prononcé le dégrèvement de la totalité des impositions et pénalités procédant de la vérification de comptabilité analysée ci-dessus. Cet avis de dégrèvement a été retiré et remplacé par un avis de dégrèvement partiel du 1er juillet 2004 limité aux seules impositions et pénalités procédant des redressements relatifs aux recettes que l'administration avait regardées comme dissimulées. Cette décision a donc prononcé le dégrèvement de la somme de 20 085,16 euros en droits et pénalités concernant l'année 1997 et de 23 828, 85 euros en droits et pénalités concernant l'année 1998 de sorte que demeuraient exigibles, au vu de cette décision, une somme de 7 669,40 euros au titre de l'année 1997 et une somme de 6 116,10 euros au titre de l'année 1998. Poursuivant le recouvrement de ces sommes, l'administration a, notamment, notifié le 15 octobre 2015 aux époux D... un commandement de payer la somme de 5 637,75 euros. Par décision du 9 décembre 2015 la directrice régionale des finances publiques de Franche-Comté a rejeté la réclamation des époux D... du 4 novembre 2015. Par le jugement attaqué du 30 avril 2019, dont les époux D... relèvent appel, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 5 637,75 euros et à la restitution des sommes déjà recouvrées.
Sur l'exigibilité des impositions assignées à M. et Mme D... :
2. Il résulte explicitement des motifs et de l'article 1er du jugement du 2 juin 2004 que le tribunal administratif de Besançon, alors que les époux D... avaient contesté l'intégralité des impositions supplémentaires mises à leur charge à la suite de la vérification de comptabilité, n'a entendu les décharger que des seules impositions et pénalités découlant de la reconstitution des recettes que le service vérificateur avait effectuée à partir des lettres de voiture, s'élevant à 205 120 francs et 274 640 francs au titre, respectivement, des deux années 1997 et 1998 en litige. Dès lors, en ne prononçant qu'un dégrèvement partiel des impositions et pénalités dans la mesure correspondant à ces redressements en base, l'administration fiscale a correctement exécuté le jugement du 2 juin 2004. Par suite, les époux D... ne sont pas fondés à soutenir qu'il ne subsistait plus aucune imposition exigible à la suite de ce jugement de nature à priver de fondement les actes de recouvrement litigieux.
Sur la prescription de l'action en recouvrement :
3. Aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, " les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable (...) ". Aux termes de l'article L. 281 de ce livre : " les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199 ". Aux termes de l'article R. 281-1 du même livre : " Les contestations relatives au recouvrement prévues par l'article L. 281 peuvent être formulées par le redevable lui-même ou la personne solidaire. / Elles font l'objet d'une demande qui doit être adressée, appuyée de toutes les justifications utiles, en premier lieu, au chef du service du département ou de la région dans lesquels est effectuée la poursuite (...) ". Aux termes de l'article R. 281-3-1 du même code, dans sa version applicable au litige, " la demande prévue à l'article R. 281-1 doit, sous peine d'irrecevabilité, être présentée, selon le cas, au directeur départemental des finances publiques (...), dans un délai de deux mois à partir de la notification : a) De l'acte de poursuite dont la régularité en la forme est contestée ; b) De tout acte de poursuite si le motif invoqué porte sur l'obligation de payer ou le montant de la dette ; c) Du premier acte de poursuite permettant d'invoquer tout autre motif ". L'article R. 281-5 du livre des procédures fiscales dispose que : " Le juge se prononce exclusivement au vu des justifications qui ont été présentées au chef de service. Les redevables qui l'ont saisi ne peuvent ni lui soumettre des pièces justificatives autres que celles qu'ils ont déjà produites à l'appui de leurs mémoires, ni invoquer des faits autres que ceux exposés dans ces mémoires ".
4. Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le contribuable soulève devant le tribunal administratif, jusqu'à la clôture de l'instruction, des moyens de droit nouveaux, n'impliquant pas l'appréciation de pièces justificatives ou de circonstances de fait qu'il lui eût appartenu de produire ou d'exposer dans sa demande au directeur départemental des finances publiques, tels que la prescription de l'action en recouvrement édictée par le premier alinéa de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, pourvu que la demande prévue par l'article R. 281-1 ait été présentée au directeur départemental des finances publiques dans le délai de deux mois après le premier acte de poursuites permettant d'invoquer cette prescription.
5. Les premiers actes de poursuite contre lesquels les époux D... pouvaient invoquer la prescription de l'action en recouvrement sont des avis à tiers détenteurs du 12 avril 2012 à la suite desquels les requérants ont présenté une réclamation d'assiette à titre contentieux et gracieux du 18 avril 2012 ne comportant aucune contestation en matière de recouvrement. En conséquence, leur opposition à poursuites du 4 novembre 2015 est postérieure de plus deux mois aux premiers actes de poursuite contre lesquels ils pouvaient invoquer la prescription. Par suite, c'est à juste titre que le tribunal administratif de Besançon a écarté le moyen comme étant irrecevable en vertu des règles rappelées aux points 3 et 4 ci-dessus.
6. Il résulte de tout ce qui précède que les époux D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande. Par suite, leur requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
N° 19NC02057 2