Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2020, Mme A... D..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 mai 2020 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 26 novembre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur le refus de titre de séjour :
- la décision n'est pas suffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen particulier ;
- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision n'est pas motivée ;
- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2020, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., née en 1967 et de nationalité arménienne, est entrée régulièrement en France le 31 décembre 2011 sous couvert d'un visa court séjour. Elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 13 avril 2012 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 17 décembre 2012. Après avoir sollicité une demande de titre de séjour en raison de l'état de santé de son fils, l'intéressée a bénéficié d'un titre de séjour " vie privée et familiale " régulièrement renouvelé jusqu'au 19 octobre 2019. Le 15 octobre 2019, Mme D... a déposé une demande de renouvellement de son titre de séjour. Par arrêté du 26 novembre 2019, le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme D... relève appel du jugement du 29 mai 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 26 novembre 2019.
Sur l'arrêté dans son ensemble :
2. Mme D... reprend en appel les moyens invoqués en première instance tirés de l'insuffisante motivation et du défaut d'examen particulier dont seraient entachées les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français. Elle n'apporte aucun élément de droit ou de fait nouveau, ni pièce nouvelle à l'appui de ces moyens auxquels le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu. Il y a lieu, dès lors, de les écarter par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges.
Sur le refus de renouveler son titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... est entrée en France le 31 décembre 2011 à l'âge de quarante-quatre ans. Si elle résidait sur le territoire français depuis huit ans à la date de l'arrêté attaqué, la durée de sa présence en France s'explique pour l'essentiel par les titres de séjour qu'elle a obtenus en raison de l'assistance qu'elle apportait à son fils admis à séjourner en France en qualité d'étranger malade. Toutefois, il est constant que ce dernier a quitté la France le 23 novembre 2019, antérieurement à la date de la décision attaquée, après s'être vu notifié un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Pour établir l'intensité des liens qu'elle a noué avec sa fille et son gendre résidant à Châteauroux ainsi qu'avec son petit-fils né en 2018, la requérante produit des réservations de covoiturages pour un aller-retour Troyes-Châteauroux et pour deux trajets simples sur lesquelles ne figure pas l'année de ces déplacements. Ces seuls éléments et les attestations de sa fille et de son gendre ne suffisent pas à établir l'intensité des liens de la requérante avec ces derniers. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à son arrivée en France et où résident son fils et son petit-fils, comme il a été dit précédemment, ainsi que ses frères et soeurs. Mme D... se prévaut par ailleurs de son insertion professionnelle en produisant une attestation du directeur de la société Sodexo de Troyes qui précise qu'après avoir été embauchée sous contrats à durée déterminée depuis novembre 2017, l'intéressée bénéficie d'un contrat à durée indéterminée depuis le 22 avril 2019. Elle a également occupé un emploi d'ouvrier viticole durant un mois en 2016. Dans ces circonstances, en dépit des efforts d'insertion professionnelle et d'apprentissage de la langue de la requérante, le préfet n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer un titre de séjour, ni porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet n'a pas non plus entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces stipulations et dispositions.
5. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de la requérante.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
6. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.
7. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Aube.
2
N° 20NC01475