Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2016, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de Strasbourg du 20 septembre 2016 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la proposition de rectification du 21 décembre 2012 est insuffisamment motivée ; le fondement juridique des rectifications retenu par l'administration ayant changé en cours de procédure, elle aurait dès lors dû lui notifier une nouvelle proposition de rectification ;
- elle a procédé à la déduction de son revenu catégoriel du solde de la créance qu'elle détenait sur la Société régionale de location et de services (SRL) au titre de l'année 2009, date à laquelle elle a été informée du caractère irrécouvrable de cette créance ; les autres conditions de déduction n'ont pas été discutées en cours de contrôle ; en ne procédant pas à la déduction l'année du versement des montants en cause, elle n'a causé aucun préjudice au Trésor.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2017, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Didiot,
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
1. Considérant que MmeC..., en tant que dirigeante salariée et associée de la société SRL (Société régionale de locations et services), a souscrit des engagements de caution auprès d'organismes bancaires en faveur de sa société qu'elle a dû exécuter et a cédé des immeubles personnels dont le produit de la vente a également été apporté à la société ; que la créance d'un montant de 194 941,13 euros constituée par ces versements a été portée au crédit de son compte courant d'associée dans les écritures de la société ; qu'à la suite de la mise en liquidation judiciaire de celle-ci le 5 novembre 2009 pour insuffisance d'actifs, la requérante a été informée du caractère irrécouvrable de sa créance par le mandataire judiciaire, et l'a portée en déduction de son revenu catégoriel sur sa déclaration afférente aux revenus de l'année 2009 ; qu'à la suite d'un contrôle sur pièces, par proposition de rectification du 21 décembre 2013, établie selon la procédure contradictoire, l'administration fiscale a remis en cause cette déduction ainsi que les reports déficitaires en résultant sur les revenus des années 2010 et 2011, qui s'élevaient respectivement à 161 883 euros et 108 215 euros ; que le revenu imposable de MmeC..., qui était nul au cours des années 2009, 2010 et 2011, a ainsi été fixé respectivement à 31 300 euros, 52 922 euros et 37 162 euros ; que la requérante a, par suite, été assujettie au titre de ces trois années à des cotisations d'impôt sur le revenu et des majorations ; qu'elle relève appel du jugement du 20 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge desdites impositions et majorations ;
Sur les conclusions à fin de décharge :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification notifiée à l'intéressée le 21 décembre 2013 fait état de la perte de la créance constituée par le solde créditeur de son compte courant d'associée à hauteur de 194 941,13 euros ; que le service y indique que, dès lors que cette perte concerne la société, elle ne peut la déduire de son revenu catégoriel, en application des dispositions de l'article 156 du code général des impôts selon lesquelles les membres des sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés, comme en l'espèce, ne peuvent pas, pour l'établissement de leur impôt personnel, imputer sur leur revenu global une part du déficit de la société ; qu'à la suite des observations formulées par la requérante expliquant que ladite créance correspondait en réalité aux versements effectués au profit de la société dans le cadre de l'exécution des engagements de caution souscrits et de la vente d'immeubles issus de son patrimoine privé, la réponse aux observations du contribuable du 8 mars 2013 a motivé le maintien des rectifications litigieuses en mentionnant, outre l'article 156 précité du code général des impôts, les dispositions des articles 13-1 et 83-3 du même code et en admettant la déduction du revenu catégoriel des versements effectués dans le cadre d'engagements de caution sous certaines conditions et sous réserve pour la contribuable d'avoir opté pour le régime des frais professionnels réels et versé les sommes en cause au cours de l'année d'imposition ; qu'en admettant même que l'administration ait modifié le fondement juridique des rehaussements postérieurement à la notification de la proposition de rectification, il est constant que la réponse aux observations du contribuable précise le nouveau fondement juridique retenu par l'administration, qui n'aboutit pas à un rehaussement plus important, en citant précisément les textes applicables, et qu'elle ouvre au contribuable un nouveau délai de trente jours pour faire valoir ses observations ; qu'il s'ensuit que contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration a suffisamment motivé la proposition de rectification qui lui a été adressée et n'était pas tenue de lui notifier une nouvelle proposition de rectification ;
4. Considérant, en second lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts, dans sa version applicable à l'espèce : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement " ; qu'il résulte de ces dispositions que le déficit subi dans une catégorie de revenus n'est imputable et, le cas échéant, reportable sur le revenu global des années suivantes, que s'il a été effectivement constaté dans la déclaration du contribuable afférente à l'année du prétendu déficit ;
5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 13 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu. 2. Le revenu global net annuel servant de base à l'impôt sur le revenu est déterminé en totalisant les bénéfices ou revenus nets visés aux I à VII bis de la 1e sous-section de la présente section, compte tenu, le cas échéant, du montant des déficits visés aux I et I bis de l'article 156, des charges énumérées au II dudit article et de l'abattement prévu à l'article 157 bis. 3. Le bénéfice ou revenu net de chacune des catégories de revenus visées au 2 est déterminé distinctement suivant les règles propres à chacune d'elles. Le résultat d'ensemble de chaque catégorie de revenus est obtenu en totalisant, s'il y a lieu, le bénéfice ou revenu afférent à chacune des entreprises, exploitations ou professions ressortissant à cette catégorie et déterminé dans les conditions prévues pour cette dernière. (...) " ; qu'aux termes de l'article 83 du même code, qui concerne l'imposition des revenus dans la catégorie des traitements et salaires : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales " ;
6. Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article 83 du code général des impôts qui concerne l'imposition du revenu dans la catégorie des traitements et salaires et qui prévoit la déduction des " frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales ", et de celles de l'article 156-1 du même code selon lesquelles " le déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus " est déduit du revenu global du contribuable, que les sommes qu'un salarié qui, s'étant rendu caution d'une obligation souscrite par la société dont il est le dirigeant de droit ou de fait, a dû payer au créancier de cette dernière, sont déductibles de son revenu imposable de l'année au cours de laquelle le paiement a été effectué, à condition toutefois que son engagement comme caution se rattache directement à sa qualité de dirigeant, qu'il ait été pris en vue de servir les intérêts de l'entreprise et qu'il n'ait pas été hors de proportion avec les rémunérations allouées à l'intéressé ou qu'il pouvait escompter au moment où il l'a contracté ; que, si cette dernière condition n'est pas remplie, les sommes payées ne sont déductibles que dans la mesure où elles n'excèdent pas cette proportion ;
7. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que Mme C...s'est rendue caution d'emprunts contractés par la société SRL les 8 janvier 1991, 4 avril 1991, 6 novembre 1992 et 29 mai 1998 ; qu'elle a été appelée en garantie de ces emprunts les 28 mai, 8 septembre et 8 novembre 1993, les 21 février et 27 septembre 1995 et le 18 janvier 1999 ; qu'ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, la requérante n'a déduit les sommes en cause qu'au titre de l'année 2009, date à laquelle le mandataire judiciaire chargé de la liquidation de la société SRL l'a informée de la perte définitive de sa créance ; que par suite, et à supposer même que les conditions requises pour la déduction des sommes en cause aient été satisfaites, le déficit qui aurait pu résulter de ces paiements, faute d'avoir été constaté dans la déclaration du contribuable afférente à l'année au cours de laquelle il a été dégagé, ne pouvait pas être imputé sur les revenus des années suivantes ;
8. Considérant, d'autre part, que s'agissant des sommes versées en contrepartie de la vente d'immeubles privés en 1998, et qui n'ont pas davantage fait l'objet d'une déduction au titre de l'année de leur versement, elles doivent en tout état de cause, à défaut de justifications, être regardées comme des versements spontanés qui n'ouvrent pas droit à déduction ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie tenue aux dépens ou la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre de l'action et des comptes publics.
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N° 16NC02580