Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 29 février 2016, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 1er février 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité du 28 octobre 2015 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Aube de réexaminer sa demande dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
- la décision, qui ne fait pas état de sa situation personnelle, est insuffisamment motivée ;
- sa situation personnelle n'a pas fait l'objet d'un examen approfondi ;
- son état de santé justifie la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet n'établit pas qu'il existe des possibilités de traitement approprié de son affection dans son pays d'origine ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision n'est pas motivée ;
- la décision est fondée sur une décision portant refus de titre de séjour illégale ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 avril 2016, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 23 juin 2016, Mme C... n'a pas été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Di Candia.
1. Considérant que MmeC..., ressortissante marocaine née en 1971, déclare être entrée en France le 15 février 2015 ; que, par un arrêté du 28 octobre 2015, la préfète de l'Aube a rejeté la demande de titre de séjour présentée par l'intéressée à raison de son état de santé, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée ; que Mme C...relève appel du jugement du 1er février 2016 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur le moyen commun tiré du défaut de motivation des décision attaquées :
2. Considérant que Mme C...reprend en appel, avec la même argumentation qu'en première instance, les moyens tirés de l'insuffisante motivation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; qu'il y lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
Sur les autres moyens relatifs aux conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté en litige que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle du requérant ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays " ;
5. Considérant que Mme C...soutient qu'elle ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine dès lors qu'elle souffre de problèmes psychiatriques ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par avis du 22 octobre 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existe un traitement approprié dans son pays d'origine ; que Mme C... n'établit par aucune pièce suffisamment probante que sa pathologie ne lui permettrait pas de retourner dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de l'inexacte application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant que si Mme C...se prévaut de son état de santé et de la présence en France de ses deux filles, nées respectivement en 1996 et en 2001, il ressort toutefois des pièces du dossier que ces dernières, hébergées depuis 2012 en France chez leur grand-père, lequel s'est vu confier la garde de ses petites-filles par un acte de kafala prononcé le 10 juillet 2013 par l'autorité judiciaire marocaine, sont demeurées séparées de leur mère jusqu'à son entrée en France en février 2015 ; que la préfète de l'Aube soutient sans être contredite que la requérante est demeurée séparée de ses filles après son entrée en France ; que la requérante, qui ne justifie pas être dépourvue d'attaches au Maroc, où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-trois ans et dont le séjour en France est récent, ne démontre ainsi pas l'existence de liens personnels et familiaux en France tels que le refus de titre de séjour en litige puisse être regardé comme portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ni, par suite, comme méconnaissant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que pour les mêmes raisons, la préfète de l'Aube n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de titre de séjour attaqué sur la situation personnelle de MmeC... ;
Sur les autres moyens relatifs aux conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire devrait être annulée en conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour doit être écarté ;
9. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme C...doit être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée à la préfète de l'Aube.
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N°16NC00391