Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 mai 2020, Mme B... A..., représentée par Me Dombek, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 2000581 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 mars 2020 ;
2°) d'annuler les décisions du directeur du centre hospitalier intercommunal Nord Ardennes des 8 août 2019 et 13 janvier 2020 ;
3°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier intercommunal Nord Ardennes de la réintégrer immédiatement sur son poste d'agent de production à la blanchisserie centrale du site de Sedan ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal Nord Ardennes la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le juge de première instance a considéré que sa demande était irrecevable ;
- son changement d'affectation ne peut être regardé comme une mesure d'ordre intérieur, eu égard aux agissements de harcèlement moral et aux propos désobligeants et discriminatoires sur son physique et ses origines, dont elle a été victime de la part du directeur opérationnel et de la responsable de production de la blanchisserie centrale du centre hospitalier intercommunal Nord Ardennes ;
- eu égard aux pièces versées au dossier, l'ordonnance de première instance, qui conclut à l'absence de discrimination, est insuffisamment motivée ;
- les décisions en litige sont entachées d'un vice de procédure en l'absence de consultation préalable du comté technique ou de la commission administrative paritaire ;
- les décisions en litige sont également entachées d'inexactitudes matérielles et d'une erreur d'appréciation ;
- le changement d'affectation a été pris, non pas dans l'intérêt du service, mais en considération de sa personne et indépendamment du point de savoir si son nouveau poste est compatible avec son état de santé ;
- le changement d'affectation présente également un caractère discriminatoire.
La requête a été régulièrement communiquée au centre hospitalier intercommunal Nord Ardennes, qui n'a pas défendu dans la présente instance.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 juillet 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 2016-1705 du 12 décembre 2016 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Meisse,
- et les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Titulaire du grade d'ouvrier principal de deuxième classe, Mme A... est fonctionnaire de la fonction publique hospitalière. Depuis 2008, elle travaille en qualité d'agent de production au sein de la blanchisserie centrale du centre hospitalier intercommunal Nord Ardennes, qui se trouve sur le site de Sedan de l'établissement. Par une décision du 8 août 2019, le directeur du centre hospitalier a décidé de l'affecter, à compter du mois de septembre 2019, sur un emploi d'agent de bio-nettoyage au service d'hygiène et maintenance des locaux du site de Sedan. La requérante ayant sollicité sa réintégration dans ses anciennes fonctions, notamment dans un courrier du 7 janvier 2020, le directeur, par une décision du 13 janvier 2020, a maintenu ce changement d'affectation. Son recours gracieux formé par courrier du 24 janvier 2020 s'étant heurté au silence de l'administration, Mme A... doit être regardée comme ayant saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation des décisions du 8 août 2019 et du 13 janvier 2020. Elle relève appel de l'ordonnance n° 2000581 du 17 mars 2020, prise en application du 4° du premier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, qui rejette sa demande pour irrecevabilité manifeste.
Sur la régularité du jugement :
2. D'une part, en indiquant, au point 4 de son ordonnance, que " ce changement d'affectation ne traduit aucune discrimination ", le président de la troisième chambre du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a suffisamment répondu au moyen de la requérante, lequel, au demeurant, était faiblement articulé, et n'a pas entaché sa décision d'irrégularité pour insuffisance de motivation.
3. D'autre part, les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou de leur contrat ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination, est irrecevable.
4. Il ressort des pièces du dossier que, dans un avis du 24 avril 2019, le médecin de prévention a conclu à une inaptitude totale et définitive de Mme A... à son emploi actuel, tout en considérant qu'elle était susceptible d'occuper un autre poste à définir avec l'employeur. De nouveau placée en congé de maladie ordinaire à compter du 26 avril 2019, Mme A... a été examinée, le 6 mai 2019, à la demande de l'administration, par un expert agréé, qui a considéré qu'" elle peut être maintenue sur son poste sous réserve qu'il n'existe pas de problème relationnel sur le lieu de travail ". Le comité médical ayant également émis un avis d'inaptitude le 4 juillet 2019, la requérante a été affectée, à compter du mois de septembre 2019, sur un emploi d'agent de bio-nettoyage au service " hygiène et maintenance des locaux ", compatible avec son état de santé et correspondant à son grade.
5. Mme A... fait valoir que, dans son avis du 9 janvier 2020, le comité médical a finalement estimé, à la suite du rapport d'expertise du 21 novembre 2019, qu'elle était apte à l'exercice de ses fonctions d'agent de production au sein de la blanchisserie centrale. Il est de plus constant que la requérante, qui s'estime victime de harcèlement moral et de discrimination à raison de son aspect physique et de ses origines de la part de deux membres de son encadrement, entretient depuis plusieurs années des relations conflictuelles avec les personnes concernées et qu'elle a fait l'objet de plusieurs arrêts de travail en raison notamment d'épisodes dépressifs. Toutefois, le changement d'affectation litigieux, qui ne présente pas le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée, ne traduit par lui-même aucune discrimination et ne procède d'aucun harcèlement moral à son encontre. Intervenu sur le site de Sedan et sans qu'il soit porté atteinte aux droits statutaires ou aux droits et libertés fondamentaux de l'agent, il n'a entraîné, pour la requérante, ni diminution de ses responsabilités, ni atteinte à ses perspectives de carrière, ni enfin, ainsi qu'il ressort des bulletins de paie versés au dossier, perte de rémunération. Dans ces conditions, s'il est loisible à Mme A..., si elle s'y croit fondée, de rechercher la responsabilité de l'administration pour les faits de discrimination et de harcèlement moral dont elle aurait été victime de la part de deux membres de son encadrement au sein de la blanchisserie centrale, le changement d'affectation contesté, alors même qu'il a été pris en considération de la personne de l'intéressée pour tenir compte de son état de santé, présente le caractère d'une mesure d'ordre intérieur, qui ne fait pas grief et n'est, en conséquence, pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la requérante n'est pas recevable à demander l'annulation des décisions des 8 août 2019 et 13 janvier 2020. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, a rejeté sa demande pour irrecevabilité manifeste. Ses conclusions à fin d'annulation et, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier intercommunal Nord Ardennes.
N° 20NC01104 4