Par une requête enregistrée le 4 avril 2016, M. C... B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 2 du jugement du 16 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande d'annulation ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 19 janvier 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 513 euros au titre de la première instance, ainsi qu'une somme d'un même montant au titre de l'instance d'appel, à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence dès lors que le préfet ne peut déléguer sa signature ;
- le préfet devait vérifier, avant d'assortir sa décision de refus de séjour d'une mesure d'éloignement, qu'aucune des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'autorisait la délivrance d'un titre de séjour ;
- la décision abrogeant le récépissé constatant une demande d'asile méconnaît l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- l'annulation de la décision de refus de séjour entraine par voie de conséquence l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 novembre 2016, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 septembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Guérin-Lebacq a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., ressortissant albanais né le 27 décembre 1976, est entré en France, selon ses déclarations, le 5 septembre 2013, accompagné de son épouse et de ses filles mineures, afin de solliciter la qualité de réfugié ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 11 mars 2014, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 4 décembre 2014 ; que, tirant les conséquences du rejet de cette demande d'asile, le préfet de Meurthe-et-Moselle a, par un arrêté du 19 janvier 2015, refusé d'admettre M. B...au séjour, a abrogé le récépissé qui lui avait été délivré en vue de présenter une demande d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Albanie comme pays à destination duquel il pourrait être reconduit en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement ; que M. B...relève appel du 16 juin 2015 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 311-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le titre de séjour est délivré par le préfet du département dans lequel l'étranger a sa résidence (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 512-1 du même code : " L'autorité administrative mentionnée aux articles L. 511-1 et L. 511-3-1 est le préfet de département (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 513-1 de ce code : " L'autorité administrative compétente pour prononcer la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger devant être d'office reconduit à la frontière est le préfet de département (...) " ; qu'aux termes de l'article 43 du décret susvisé du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements : " Le préfet de département peut donner délégation de signature, notamment en matière d'ordonnancement secondaire : 1° En toutes matières et notamment pour celles qui intéressent plusieurs chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans le département, au secrétaire général et aux chargés de mission (...) " ;
3. Considérant que le préfet de Meurthe-et-Moselle pouvait, en application des dispositions précitées de l'article 43 du décret du 29 avril 2004, donner délégation au secrétaire général de la préfecture aux fins de signer les décisions en matière de séjour et d'éloignement des étrangers ; que l'arrêté contesté a été signé par M. Jean-François Raffy, secrétaire général de la préfecture de Meurthe-et-Moselle, auquel le préfet avait délégué sa signature par un arrêté du 20 août 2013, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ; qu'ainsi, le moyen tiré de la prétendue incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, alors applicable : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) " ;
5. Considérant qu'il résulte de leurs termes mêmes que les dispositions de l'article 24 de la loi du 24 avril 2000 ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus prise en réponse à une demande formulée par le destinataire de cette décision ; qu'il en est notamment ainsi lorsque le préfet refuse la délivrance d'une carte de résident à un étranger auquel la qualité de réfugié a été refusée ; qu'ainsi, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. B...et en abrogeant le récépissé qui lui avait été délivré afin de déposer sa demande d'asile, le préfet s'est borné à répondre à sa demande de titre de séjour déposée au titre de l'asile ; que par suite, le requérant ne saurait utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
6. Considérant, en troisième lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est pas sérieusement allégué que M. B...aurait présenté une demande de titre de séjour sur un autre fondement que celui prévu pour les étrangers reconnus réfugiés en application du livre VII du même code ; que dans ces conditions, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'était pas tenu, avant de rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. B...en qualité de réfugié, d'examiner d'office s'il pouvait prétendre à un tel titre sur un autre fondement ; que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, la circonstance que le préfet a assorti sa décision de refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français est sans influence sur la règle rappelée ci-dessus ;
7. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'établit pas que la décision de refus de séjour serait entachée d'illégalité et devrait, pour ce motif, être annulée ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'éloignement devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision lui refusant un droit au séjour ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 11 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 16NC00579