Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 décembre 2018, Mme C...B..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 29 novembre 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 24 août 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Jura de lui délivrer une carte de séjour temporaire.
Elle soutient que :
- elle réside en France avec son enfant malade, subvient à son éducation et poursuit un parcours d'intégration ;
- le préfet n'a pas consulté la commission nationale de l'admission exceptionnelle prévue par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle remplit les conditions prévues par cet article pour bénéficier d'un titre de séjour ;
- le préfet n'a pas produit l'avis rendu par le collège de médecins sur la situation médicale de son enfant ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- il n'est pas établi que les autorités albanaises auraient accepté de l'accueillir.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 février 2019, le préfet du Jura conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 janvier 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Guérin-Lebacq a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., ressortissante albanaise née le 23 août 1996, déclare être entrée irrégulièrement en France le 17 avril 2016 pour y solliciter le bénéfice du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 23 août 2016, confirmée le 11 janvier 2017 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Mme B...a été autorisée à séjourner provisoirement sur le territoire français en qualité d'accompagnant d'un enfant malade au cours de la période du 20 septembre 2017 au 19 septembre 2018. L'intéressée ayant sollicité le renouvellement de cette autorisation provisoire, le préfet du Jura a, par un arrêté du 24 août 2018, rejeté sa demande et assorti sa décision de refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de l'Albanie. Mme B...relève appel du jugement du 29 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 (...) / L'autorisation provisoire de séjour (...) est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11 (...) ". En application du 11° de l'article L. 313-11 du même code, un titre de séjour est délivré : " A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État ".
3. Le préfet du Jura produit en appel l'avis rendu le 21 août 2018 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) dont il ressort que l'état de santé de la fille de Mme B...nécessite une prise en charge dont le défaut ne devrait pas entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'enfant peut voyager sans risque vers le pays d'origine de la famille. Mme B...ne produit à l'instance aucun élément, notamment de nature médicale, qui permettrait de contredire cet avis, sur lequel le préfet s'est fondé pour lui refuser une autorisation provisoire de séjour.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".
5. D'une part, il est constant que Mme B...ne justifie pas d'une résidence habituelle supérieure à dix ans sur le territoire français. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que la commission du titre de séjour aurait dû être consultée sur sa situation dans les conditions prévues par les dispositions précitées.
6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que Mme B...est entrée irrégulièrement en France moins de trois ans avant l'intervention de la décision contestée, que sa demande d'asile a été rejetée, qu'elle est employée en qualité d'agent d'entretien et que la situation médicale de sa fille ne fait pas obstacle à un retour dans le pays d'origine de la famille. Si la requérante fait état de sa volonté d'intégration et de sa situation familiale en produisant sur ce point des attestations émanant de collègues et d'associations caritatives, elle ne justifie d'aucune circonstance exceptionnelle ou humanitaire au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14. Elle n'est donc pas fondée à soutenir qu'un titre de séjour aurait dû lui être délivré sur le fondement de ces dispositions.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Mme B...est entrée en France le 17 avril 2016 seulement et ne justifie de son séjour sur le territoire français que pour les besoins de l'instruction de sa demande d'asile puis en raison de l'état de santé de sa fille. Ainsi qu'il a été dit, la situation médicale de l'enfant, qui a évolué, ne fait plus obstacle à un retour dans le pays d'origine de la famille. Il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B...serait dépourvue de toute attache familiale en Albanie où elle a vécu avec sa famille avant son arrivée en France et où réside son époux. Dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de MmeB..., les décisions lui refusant le droit au séjour et l'obligeant à quitter le territoire français n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Pour les mêmes raisons, il n'est pas établi que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation de MmeB....
9. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité (...) ". Mme B...ne conteste pas être une ressortissante de l'Albanie, pays vers lequel le préfet du Jura a décidé de l'éloigner. La circonstance que les autorités albanaises n'auraient pas délivré de laissez-passer afin de permettre son retour est par elle-même sans incidence sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Jura.
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N° 18NC03529