Procédure devant la cour :
I- Par une requête, enregistrée sous le n°2000976 le 22 avril 2020, M. B..., représenté par Me Segaud-Martin, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 23 mars 2020 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet des Ardennes du 23 octobre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Ardennes de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 9 du code civil ainsi que l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle méconnaît les articles L. 511-4 10° et L 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
II- Par une requête, enregistrée sous le n°2000977 le 22 avril 2020, Mme B..., représentée par Me Segaud-Martin, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 23 mars 2020 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet des Ardennes du 23 octobre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Ardennes de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- cette décision méconnaît les articles L. 511-4 10° et L 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Les requêtes ont été communiquées au préfet des Ardennes, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
M. et Mme B... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 25 juin 2020.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Grossrieder, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour pour motifs de santé. Par arrêté du 23 octobre 2019, le préfet des Ardennes a refusé la délivrance du titre demandé, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destination. Par voie de conséquence, le préfet des Ardennes a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B..., l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination. M. et Mme B..., par deux requêtes enregistrées sous les numéros 2000976 et 2000977, qu'il y a lieu de joindre, font appel du jugement du 23 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande d'annulation de ces arrêtés.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, il ressort des termes des décisions attaquées portant refus de titre de séjour et obligations de quitter le territoire français que celles-ci comportent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elles rappellent le parcours des intéressés depuis leur arrivée en France, le fait qu'ils aient déjà fait l'objet de précédentes obligations de quitter le territoire français et qu'ils se sont maintenus sur le territoire irrégulièrement. La décision opposée à Mme B... rappelle que l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont les termes sont repris, ne lie pas le préfet et que le respect des règles du secret médical fait obstacle à ce que les services de l'Etat aient connaissance de la pathologie de l'intéressée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait et ne peut qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".
4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, pour le cas des ressortissants algériens, que ces derniers aient effectivement accès à ces soins. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
5. Par un avis émis le 21 août 2018, l'Office français de l'immigration et de l'intégration indique que si l'état de santé de Mme B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de son pays d'origine, y bénéficier d'un traitement approprié et y voyager sans risque.
6. Si Mme B... se prévaut de la nécessité du suivi en France de sa pathologie de lupus erythémateux disséminé, les différents certificats médicaux produits établis en France qui se bornent à indiquer la nécessité d'un suivi régulier de cette pathologie, ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet au regard de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration quant à la disponibilité d'un traitement approprié en Algérie. Il en est de même des éléments médicaux versés au dossier d'appel, au demeurant postérieurs à la décision attaquée. Par suite, l'arrêté relatif à Mme B... ne méconnaît pas les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. M. B... ne peut quant à lui utilement soulever le moyen tiré la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne fait état d'aucun problème de santé.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ".
9. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... réside en France régulièrement depuis 2013 du fait de son état de santé et son époux a bénéficié d'autorisations provisoires de séjour en qualité d'accompagnant depuis leur mariage. Les titres de séjour temporaires successifs et autorisations provisoires de séjour dont ils ont bénéficié au motif de l'état de santé de Mme B... ne leur donnaient pas vocation à rester durablement en France. Par ailleurs, alors que les certificats médicaux produits ne sont pas de nature à infirmer l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration quant à l'accès effectif à des soins appropriés à l'état de santé de Mme B... en Algérie, rien ne fait obstacle à ce que sa vie familiale se poursuive en Algérie où leurs enfants pourront être scolarisés d'autant que leurs familles respectives vivent en Algérie où les époux B... ont passé la majeure partie de leur vie. Enfin, les requérants ne justifient ni d'une insertion particulière dans la société française alors même que seule Mme B... a suivi des formations et a exercé le métier d'aide cuisine pendant 10 mois sous contrat à durée déterminée avant de bénéficier d'un contrat à durée indéterminée à compter du 1er septembre 2019, ni d'attaches sur le territoire français. Aussi, en prenant les actes attaqués, le préfet n'a pas porté au droit de M. et Mme B... à mener une vie famille normale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
10. En dernier lieu, si les requérants invoquent la méconnaissance des dispositions de l'article L 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ils n'apportent aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. et Mme B... ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés aux instances :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. et Mme B... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... épouse B..., à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Ardennes.
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N° 20NC00976 N° 20NC00977