Procédure devant la cour :
I - Par une requête enregistrée le 27 août 2015, sous le n° 15NC01890, Mme D... A... épouseB..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 3 mars 2015 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision de refus de titre de séjour du 23 juillet 2014 prise à son encontre par le préfet des Vosges ;
3°) d'enjoindre au préfet des Vosges, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à Me C... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision portant refus de délivrance de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a procédé à aucun examen de sa situation individuelle ;
- l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant des conditions manifestement disproportionnées, il ne peut servir de base légale à une décision de refus de titre de séjour ;
- le préfet ne pouvait fonder sa décision de refus de titre de séjour sur l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans préalablement la mettre à même de présenter ses observations ;
- la décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
II - Par une requête enregistrée le 27 août 2015 sous le n° 15NC01901, M. E... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 3 mars 2015 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision de refus de titre de séjour du 23 juillet 2014 prise à son encontre par le préfet des Vosges ;
3°) d'enjoindre au préfet des Vosges, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à Me C... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soulève les mêmes moyens que son épouse dans la requête enregistrée sous le n°15NC01890.
Par des mémoires en défense enregistrés le 9 août 2016, le préfet des Vosges conclut au rejet des deux requêtes.
Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
M. et Mme B...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du bureau d'aide juridictionnelle du 23 juillet 2015.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Kohler, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
2. Considérant que M. et Mme B..., ressortissants albanais, sont entrés irrégulièrement en France le 5 mai 2013 accompagnés de leur enfant mineur afin de solliciter la reconnaissance du statut de réfugié ; qu'à la suite du rejet de leurs demandes d'asile, le préfet des Vosges a, par deux arrêtés du 23 juillet 2014, refusé de leur délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination d'éventuelles mesures d'éloignement forcé ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 3 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés en tant qu'ils leur refusent la délivrance d'un titre de séjour ;
3. Considérant, en premier lieu, que contrairement à ce que soutiennent M. et Mme B..., les décisions attaquées énoncent les motifs de droit et de fait sur lesquels le préfet des Vosges s'est fondé pour refuser de leur délivrer un titre de séjour ; que cette motivation n'est pas stéréotypée et démontre que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle des intéressés ; que, par suite, les moyens tirés de l'insuffisante motivation des décisions attaquées et du défaut d'examen particulier doivent être écartés ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'une demande d'asile a été définitivement rejetée, l'étranger qui sollicite la délivrance d'une carte de séjour doit justifier, pour obtenir ce titre, qu'il remplit l'ensemble des conditions prévues par le présent code " ;
5. Considérant, d'une part, qu'en mentionnant cet article dans les décisions de refus de titre de séjour, qui sont fondées sur les articles L. 313-13 et L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non sur les dispositions précitées de l'article L. 311-6 du même code, le préfet, qui n'avait été saisi que de demandes tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié, s'est borné à rappeler qu'il appartient à l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée et qui solliciterait la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement, d'apporter les éléments tendant à démontrer qu'il remplit les conditions prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obtenir le titre de séjour demandé ; que le préfet n'a ainsi pas commis d'erreur de droit, ni entaché ses décisions d'un défaut de base légale ;
6. Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas des dispositions précitées de l'article L. 311-6 que le préfet serait spécifiquement tenu de recueillir les observations d'un étranger ayant demandé le séjour en qualité de réfugié avant de prendre une décision de refus de séjour ; qu'au demeurant, M. et Mme B... ont pu, lors de l'instruction de leurs demandes, faire valoir l'ensemble des éléments qu'ils ont jugé utile de communiquer à l'administration ;
7. Considérant, en troisième lieu, que M. et Mme B... reprennent en appel, avec la même argumentation qu'en première instance et sans apporter d'élément nouveau, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
8. Considérant, en quatrième lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce même code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser sa situation ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme B...ont uniquement sollicité un titre de séjour en qualité de réfugiés ; que, si les décisions en litige indiquent que les refus de titre de séjour ne portaient pas une atteinte disproportionnée au respect de la vie privée et familiale des intéressés, le préfet ne peut, ce faisant, être regardé comme ayant examiné le droit au séjour des intéressés au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les requérants ne peuvent, par suite, utilement se prévaloir ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., Mme D... A...épouse B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Vosges.
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Nos 15NC01890, 15NC01891