Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 septembre 2018 et les 21 février et 7 juin 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de remettre à la charge de M. et Mme D... la cotisation d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014, soit une somme de 16 922 euros.
Il soutient que :
- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en estimant que M. et Mme D... étaient fondés à obtenir une réduction de base correspondant à 15 % de la quote-part du bénéfice comprise entre une fois et huit fois le plafond de la sécurité sociale ;
- l'article 163 quatervicies du code général des impôts permet de déduire les cotisations de non-salariés aux régimes facultatifs notamment de retraite qu'instituent les contrats dits " Madelin " pour un montant plus important que ne peuvent le faire les salariés à la condition que la fraction des cotisations versées au titre de l'année de référence ait excédé 10 % du montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale ;
- les cotisations de M. D... ne peuvent pas être prises en compte dès lors que l'intéressé n'a pas disposé de revenus professionnels entre 2011 et 2013 ; la déduction supplémentaire de 15 % ne pouvait pas s'appliquer ;
- si Mme D... a versé des cotisations relatives au contrat dit " Madelin ", elle n'a pas effectué des versements à hauteur au moins de 15 % de la quote-part de bénéfice comprise entre une fois et huit fois le plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale prévue par l'article 163 quatervicies du code général des impôts ; c'est à bon droit que le second terme prévu par les dispositions de l'article 163 quatervicies pour la détermination du plafond annuel a été retenu.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 décembre 2018 et 5 mars 2019, M. et Mme D..., représentés par Me B..., concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la requête est tardive ;
- les moyens soulevés par le ministre de l'action et des comptes publics ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- l'arrêté du 26 novembre 2010 portant fixation du plafond de la sécurité sociale pour 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Après avoir constaté sur leur avis d'imposition sur le revenu au titre de 2014 que l'administration a retenu, sur la ligne 6RT " cotisations PERP, PREFON, COREM, CGOS et autres produits assimilés ", en déduction de leur revenu global, une somme de 40 478 euros et non celle de 98 975 euros, M. et Mme D... ont sollicité, le 4 septembre 2015, la prise en compte des cotisations qu'ils ont versées en 2014 dans le cadre d'un " Plan Epargne Retraite Populaire " (PERP), d'un contrat " Mondiale Solutions Retraite " (cotisations dites " Madelin ") et de celles versées en 2010 à 2013 au titre du dispositif de rachat d'années antérieures à hauteur d'un montant total de 98 975 euros. La demande qui tendait également, dans cette mesure, à la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu qu'ils ont acquittée au titre de l'année 2014 et la rectification par voie de conséquence de leur base imposable de l'année 2015 a été rejetée par l'administration le 16 septembre 2015. Par un jugement du 13 juin 2018, le tribunal administratif de Rennes, saisi par M. et Mme D..., a décidé que la base d'imposition de M. et Mme D... à l'impôt sur le revenu de l'année 2014 sera recalculée selon les modalités précisées au point 4 du jugement ainsi que leur éventuelle incidence sur la base d'imposition de l'année suivante (article 1er) et réduit la cotisation d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2014 en application de l'article 1er (article 2), soit une décharge de 16 922 euros. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article 163 quatervicies du code général des impôts dans sa rédaction applicable : " I.-1.-Sont déductibles du revenu net global, dans les conditions et limites mentionnées au 2, les cotisations ou les primes versées par chaque membre du foyer fiscal : / a) aux plans d'épargne retraite populaire prévus à l'article L. 144-2 du code des assurances ; / b) A titre individuel et facultatif aux contrats souscrits dans le cadre de régimes de retraite supplémentaire, auxquels l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale, lorsque ces contrats sont souscrits par un employeur ou un groupement d'employeurs ;/ c) Au régime de retraite complémentaire institué par la Caisse nationale de prévoyance de la fonction publique ainsi qu'aux autres régimes de retraite complémentaire, auxquels les dispositions du 1° bis de l'article 83, en vigueur jusqu'au 1er janvier 2004, avaient été étendues avant cette date, constitués au profit des fonctionnaires et agents de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics soit auprès d'organismes relevant du code de la mutualité, soit auprès d'entreprises régies par le code des assurances, ou institués par les organismes mentionnés au VII de l'article 5 de l'ordonnance n° 2001-350 du 19 avril 2001 relative au code de la mutualité et transposant les directives 92/49/CEE et 92/96/CEE du Conseil, des 18 juin et 10 novembre 1992, pour leurs opérations collectives visées à l'article L. 222-1 du code de la mutualité. / 2.-a) Les cotisations ou les primes mentionnées au 1 sont déductibles pour chaque membre du foyer fiscal dans une limite annuelle égale à la différence constatée au titre de l'année précédente ou, pour les personnes qui n'ont pas été fiscalement domiciliées en France au cours des trois années civiles précédant celle au cours de laquelle elles s'y domicilient, au titre de cette dernière année, entre : / 1° une fraction égale à 10 % de ses revenus d'activité professionnelle tels que définis au II, retenus dans la limite de huit fois le montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale ou, si elle est plus élevée, une somme égale à 10 % du montant annuel du plafond précité ; / 2° et le montant cumulé des cotisations ou primes déductibles en application du 2° de l'article 83 ou, au titre de la retraite supplémentaire, du 2°-0 bis et, au titre de la retraite, du 2°-0 ter y compris les versements de l'employeur, des cotisations ou primes déductibles au titre du 1° du II de l'article 154 bis, de l'article 154 bis-0 A et du 13° du II de l'article 156 compte non tenu de leur fraction correspondant à 15 % de la quote-part du bénéfice comprise entre une fois et huit fois le plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, ainsi que des sommes versées par l'entreprise ou le salarié au plan d'épargne pour la retraite collectif défini aux articles L. 3334-1 à L. 3334-16 du code du travail et exonérées en application du 18° de l'article 81. (...) / b) La différence, lorsqu'elle est positive, constatée au titre d'une année entre, d'une part, la limite définie au a et, d'autre part, les cotisations ou primes mentionnées au 1 peut être utilisée au cours de l'une des trois années suivantes. (...) / II.- Les revenus d'activité professionnelle mentionnés au 1° du a du 2 du I s'entendent : / 1.-Des traitements et salaires définis à l'article 79 et des rémunérations allouées aux gérants et associés des sociétés mentionnées à l'article 62, pour leur montant déterminé respectivement en application des articles 83 à 84 A et du dernier alinéa de l'article 62 ; / 2.-Des bénéfices industriels et commerciaux définis aux articles 34 et 35, des bénéfices agricoles mentionnés à l'article 63 et des bénéfices tirés de l'exercice d'une profession non commerciale mentionnés au 1 de l'article 92, pour leur montant imposable. (...). ".
3. En application du 2° du a du 2 du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts, est pris en compte, pour le calcul de la limite annuelle dans laquelle les cotisations d'épargne retraite sont déductibles du revenu net global, le montant cumulé des cotisations ou primes déductibles du revenu catégoriel compte non tenu de leur fraction correspondant à 15 % de la quote-part du bénéfice comprise entre une fois et huit fois le plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. En l'absence de référence aux dispositions régissant ces revenus catégoriels, lesquelles prévoient la déductibilité de 10 % de la fraction du revenu professionnel imposable qui n'excède pas huit fois le montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, auxquels s'ajoutent 15 % supplémentaires sur la fraction de ce revenu comprise entre une fois et huit fois le montant annuel, l'exclusion de la prise en compte de la fraction correspondant à 15% de la quote-part de bénéfice comprise entre une fois et huit fois le plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale prévue par l'article 163 quatervicies du code général des impôts ne saurait être limitée aux seuls cas dans lesquels s'applique la déduction supplémentaire de 15% pour le calcul du revenu catégoriel.
4. Si l'administration, s'agissant de Mme D..., a déduit du plafond correspondant à la fraction égale à 10 % de ses revenus d'activité professionnelle, soit les sommes non contestées de 22 409 euros en 2012, 21 395 euros en 2013 et 21 505 euros en 2014, les cotisations dites " Madelin " versées par l'intéressée au titre des dispositions du 1° du II de l'article 154 bis du code général des impôts d'un montant de 22 633 euros en 2011, 12 726 euros en 2012 et 13 340 euros en 2013, elle s'est abstenue, en méconnaissance des dispositions précitées du 2° du 2 a) du I de l'article 163 quatervicies du code général des impôts, d'extourner la fraction correspondant à 15 % de la quote-part comprise entre une fois et huit fois le plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale pour calculer le deuxième terme de la différence prévue à l'article 163 quatervicies et, par voie de conséquence, le montant qui en résulte pour le calcul de la base imposable à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014 et des éventuelles incidences de cette rectification sur la base imposable de l'année suivante. Elle a appliqué le même mode de calcul erroné s'agissant de M. D....
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par M. et Mme D... à la requête, que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a décidé que la base d'imposition de M. et Mme D... à l'impôt sur le revenu de l'année 2014 sera recalculée selon les modalités précisées au point 4 du jugement ainsi que leur éventuelle incidence sur la base d'imposition de l'année suivante et réduit la cotisation d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2014. Il s'ensuit également qu'une somme de 1 500 euros doit être mise à la charge de l'Etat, partie perdante, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme D... une somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... D... et au ministre des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. C..., président assesseur,
- M. Brasnu, premier conseiller.
Lu en audience publique le 5 novembre 2020.
Le rapporteur,
J.-E. C...Le président,
F. Bataille
Le greffier,
A .Rivoal
La République mande et ordonne au ministre des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 18NT03427