Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 janvier et 1er mars 2017, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 30 septembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 14 mars 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivé ;
- il méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ;
- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il excipe de l'illégalité du refus de séjour au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision fixant le pays de renvoi n'est pas suffisamment motivée ;
- le préfet s'étant cru à tort en situation de compétence liée, elle n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2017, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 décembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aubert ;
- et les observations de MeA..., substituant MeC..., pour M.B....
1. Considérant que M.B..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement du 30 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 14 mars 2016 portant refus de titre de séjour en qualité d'étranger malade et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant que la décision de refus de titre de séjour, qui comporte les éléments de fait et de droit sur lesquels elle est fondée, est suffisamment motivée alors même qu'elle ne précise pas les raisons pour lesquelles le préfet a estimé que M. B...pourra bénéficier en Tunisie d'un traitement approprié à son état de santé ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé (...) " ;
4. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
5. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
6. Considérant que, par un avis rendu le 22 juin 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existe pas de traitement approprié à cet état de santé dans son pays d'origine ; que le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de délivrer le titre de séjour demandé au motif que l'intéressé pourra y bénéficier d'un traitement approprié aux troubles anxio-dépressifs qu'il présente ;
7. Considérant que pour établir l'existence en Tunisie d'un traitement approprié à l'état de santé du requérant, le préfet se fonde sur la fiche de soins relative à ce pays établie en 2006 selon laquelle l'ensemble des troubles mentaux et du comportement dont, notamment, la schizophrénie, bénéficie d'une offre de soins suffisante sur tout le territoire tant en ce qui concerne le traitement médicamenteux que la prise en charge spécialisée ; qu'il se fonde également sur le " formulaire thérapeutique tunisien " de 2012 qui mentionne les neuroleptiques au titre des médicaments disponibles dans le pays permettant de soigner les troubles mentaux ; que si M. B...fait valoir que le préfet n'établit pas qu'il pourra bénéficier en Tunisie de l'administration de Weplion et de Xeplion, les ordonnances et les certificats médicaux qu'il produit font seulement état de la prescription de Xeplion ; qu'en outre, il soutient plus précisément qu'il ne pourra pas avoir accès à ce médicament en Tunisie en raison de son coût élevé, ce qui ne constitue pas un élément dont le préfet devait tenir compte dans son appréciation de l'existence dans ce pays d'un traitement approprié ; qu'enfin, à supposer même que le Xeplion ne soit pas disponible en Tunisie, les pièces produites par M. B...n'établissent pas que la schizophrénie dont il souffre ne pourra pas être traitée par l'administration de neuroleptiques prescrits dans ce pays ; que, dans ces conditions, le refus de titre de séjour ne méconnaît pas le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant que M. B...se borne à soutenir que, présent en France depuis 2011, il y bénéficie du suivi médical que nécessite son état de santé ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Tunisie où réside sa fille née en 2007 et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de trente ans ; que, dans ces conditions le refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, dès lors, être écarté ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8 du présent arrêt, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
10. Considérant que M. B...se borne à reprendre en appel sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, les moyens invoqués en première instance tirés du défaut de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, du refus de titre de séjour ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
11. Considérant que le requérant se borne à reprendre en appel sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, les moyens invoqués en première instance tirés du défaut de motivation de la décision fixant le pays de renvoi et de l'absence d'examen de sa situation au regard des risques encourus en cas de retour en Tunisie ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur le surplus des conclusions :
13. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 23 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Delesalle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 avril 2017.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT00177 2
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