Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 27 juin 2017, 25 juillet 2017, 16 janvier 2018 et 30 mars 2018, l'ASPDH, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des contributions temporaires et exceptionnelles à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011 ainsi que la décharge des intérêts de retard complémentaires de 146 773 euros mis en recouvrement le 30 juin 2017 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en méconnaissance de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, elle n'a pas été destinataire, préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement, d'un document l'informant du montant global par impôt des droits, pénalités et intérêts de retard dont elle était redevable au titre des rehaussements mis à la charge de sa filiale, la société des publications du courrier de l'Ouest ; l'avis de mise en recouvrement n'y fait pas référence ; l'adresse mentionnée sur la lettre du 7 janvier 2014 est erronée ;
- à titre principal, sur le fondement de l'instruction 4 E-2-85 n°3, 4 E-2223 n°4 et BOI-BIC-PROV-30-20-10-20 n°320, la société des publications du courrier de l'Ouest était, compte tenu du contrat conclu avec Audiens Prevoyance le 16 décembre 2011, engagée vis-à-vis de cet organisme et avait perdu à cette date la propriété et la disposition de la somme de 3 125 292 euros ;
- à titre subsidiaire, elle a commis une erreur comptable de sorte que la somme de 3 215 292 euros constitue au 31 décembre 2011 une charge certaine dans son principe dont le montant est nettement déterminé et est donc déductible.
Par deux mémoires, enregistrés les 5 décembre 2017 et 26 mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Malingue,
- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,
- les observations de MeA..., représentant l'association pour le soutien des principes de la démocratie humaniste.
Considérant ce qui suit :
1. La société des publications du courrier de l'Ouest, dont l'association pour le soutien des principes de la démocratie humaniste (ASPDH) est l'entité mère, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a, par proposition de rectification du 12 juin 2013, remis en cause la déduction de la provision de 3 125 292 euros comptabilisée au 31 décembre 2011 pour risques et charges de personnel. Après procédure contradictoire, l'imposition supplémentaire en matière d'impôt sur les sociétés, de contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés et de contribution exceptionnelle sur ce même impôt a été mise en recouvrement le 31 mars 2014 au nom de l'ASPDH à hauteur, respectivement, en droits de 915 712 euros, 30 219 euros, 45 786 euros, le tout majoré des intérêts de retard à hauteur de 55 536 euros. Après le rejet de sa réclamation préalable par décision du 7 novembre 2014, l'association a sollicité auprès du tribunal administratif de Rennes la décharge de ces impositions. Elle relève appel du jugement du 10 mai 2017 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande et sollicite la décharge de ces impositions ainsi que des intérêts de retard de 146 773 euros qui ont été mis à sa charge par avis de mise en recouvrement du 30 juin 2017.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. L'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable prévoit que : " (...) Lorsqu'en application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts la société mère d'un groupe est amenée à supporter les droits et pénalités résultant d'une procédure de rectification suivie à l'égard d'une ou de plusieurs sociétés du groupe, l'administration adresse à la société mère, préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement correspondant, un document l'informant du montant global par impôt des droits, des pénalités et des intérêts de retard dont elle est redevable. L'avis de mise en recouvrement, qui peut être alors émis sans délai, fait référence à ce document. (...) ".
3. Par lettre n° 751 en date du 7 janvier 2014, l'administration fiscale a informé le représentant de l'ASPDH des rectifications résultant du contrôle de la société des publications du courrier de l'Ouest et du montant des droits, pénalités et intérêts de retard dont l'association était redevable. Il résulte de la copie d'écran du tableau de suivi fourni par l'application informatique de La Poste que le pli contenant cette lettre, adressé en lettre recommandée avec accusé de réception, a été, en dépit d'une erreur sans incidence portant sur le numéro de l'immeuble (numéro 35 n'existant pas à la place du numéro 38), remis contre signature du destinataire ou à son représentant dûment mandaté le 15 janvier 2014. La notification du document d'information destiné à la société mère est donc intervenue préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement du 31 mars 2014. Si, en méconnaissance des dispositions citées au point précédent, l'avis de mise en recouvrement du 31 mars 2014 omet de faire référence à la lettre du 7 janvier 2014, cette carence constitue une simple erreur matérielle qui n'a pas privé l'ASPDH d'une garantie et de la possibilité de contester utilement les montants mis en recouvrement. Par conséquent, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition et l'émission de l'avis de mise en recouvrement sont entachées d'irrégularités de nature à entraîner la décharge des impositions.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
4. Il ressort de la proposition de rectification du 12 juin 2013 que le vérificateur a réintégré au résultat fiscal de l'exercice clos en 2011 un montant de 3 135 292 euros correspondant à une provision pour le versement d'allocations en raison de départ en préretraite de 24 salariés concernés par le plan de cessation anticipée d'activité prévu par l'accord d'entreprise signé le 29 novembre 2011. Pour la mise en oeuvre de ce plan, la société des publications du courrier de l'Ouest a signé, le 16 décembre 2011, une convention avec la société d'assurance Audiens Prévoyance, désignant cette dernière comme organisme assureur et gestionnaire du service des prestations de l'ensemble des bénéficiaires au nom et pour le compte de la société.
5. L'article 39 du code général des impôts dans sa rédaction applicable prévoit que : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. Toutefois, ne sont pas déductibles les provisions que constitue une entreprise en vue de faire face au versement d'allocations en raison du départ à la retraite ou préretraite des membres ou anciens membres de son personnel, ou de ses mandataires sociaux. (...) ". Compte tenu de l'objet de la provision de 3 135 292 euros rappelé au point précédent, c'est à bon droit que, sur le fondement du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, le vérificateur l'a exclue des charges déductibles au titre de l'exercice 2011.
6. La société des publications du courrier de l'ouest, qui a comptabilisé au 31 décembre 2011 une provision pour risques et charges de personnel, a souscrit un contrat d'assurance de cessation anticipée d'activité avec la société Audiens Prevoyance avec prise d'effet au 1er janvier 2012 et ne justifie d'aucun versement à hauteur de 3 135 292 euros à cette société avant cette date. Par suite, l'association requérante n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes des instructions administratives 4 E-2-85, 4 E-2223 et BOI-PROV-30-20-10-20 n° 320 qui concernent la déductibilité des primes versées à des compagnies d'assurances en vue de garantir au personnel l'allocation d'indemnités de départ à la retraite.
7. En l'absence de toute stipulation du contrat du 16 décembre 2011 sur le montant des redevances à verser ou de tout justificatif prévoyant le versement de la somme de 3 135 292 euros à la société Audiens Prevoyance au titre de l'exercice clos en 2011, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir, à titre subsidiaire, que cette somme constituait une dette certaine dans son principe et son montant au titre de cet exercice et que la société des publications du courrier de l'Ouest a commis une erreur comptable, susceptible d'être corrigée, en l'enregistrant comme une provision.
8. Il résulte de tout ce qui précède que l'ASPDH n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'ASPDH est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association pour le soutien des principes de la démocratie humaniste et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 3 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 janvier 2019.
Le rapporteur,
F. MalingueLe président,
F. Bataille
Le greffier,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT01944
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