3°) d'enjoindre à la préfète d'Indre-et-Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire l'autorisant à travailler sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la procédure suivie pour obtenir l'avis des médecins de l'OFII est irrégulière ;
- le refus de séjour méconnaît l'article 6-7 de l'accord franco-algérien ;
- l'obligation de quitter le territoire méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 février 2019, la préfète d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par MmeB... ne sont pas fondés.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 janvier 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Giraud a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., ressortissante algérienne née le 8 septembre 1956, est entrée en France le 24 février 2012 sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de court séjour de trente jours délivré par les autorités consulaires espagnoles à Oran. Elle a présenté, le 9 mars 2012, une demande d'admission provisoire au séjour afin de déposer auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides une demande de reconnaissance de la qualité de réfugié. Par une décision du 14 mai 2012, le préfet du Loiret a rejeté la demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile en application des dispositions du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire le 21 janvier 2013. Mme B...a sollicité la délivrance d'une carte de résident algérien en se prévalant de son état de santé. Cependant, par l'arrêté attaqué du 20 juin 2018, la préfète d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande. Mme B...relève appel du jugement du 6 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. ".
3. Selon l'article 3 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ( OFII), de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'avis du collège de médecins de l'OFII est établi sur la base du rapport médical élaboré par un médecin de l'office selon le modèle figurant dans l'arrêté du 27 décembre 2016 mentionné à l'article 2 ainsi que des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays dont le demandeur d'un titre de séjour pour raison de santé est originaire ".
4. Enfin l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté (...) Cet avis mentionne les éléments de procédure. (...) L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".
5. Il ressort des pièces du dossier que l'avis du 13 mars 2018 relatif à l'état de santé de Mme B...a été rendu par trois médecins dont le nom est mentionné. La préfète d'Indre-et-Loire produit en outre une attestation de la directrice territoriale de l'OFII indiquant le nom du médecin qui a établi le rapport médical, dont il ressort qu'il ne faisait pas partie du collège de médecins du service médical de l'OFII qui a rendu l'avis litigieux.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du
27 décembre 1968 susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Enfin, selon l'article 6 de l'arrêté du
27 décembre 2016 susvisé, le collège de médecins, au vu du rapport établi par un médecin de l'office, " (...) émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. (...) ".
7. La partie qui justifie d'un avis du collège des médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, s'il peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays de renvoi.
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour rejeter la demande de la requérante, la préfète d'Indre-et-Loire s'est fondée sur l'avis du collège des médecins de l'OFII du 13 mars 2018 selon lequel l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays d'origine, la requérante peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié et qu'elle peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Compte tenu de leur ancienneté, les certificats des
24 janvier 2013 et 4 février 2013 établis, le premier, par un praticien hospitalier du centre hospitalier régional universitaire de Tours et, l'autre par un endocrinologue d'Oran ne sont pas de nature à remettre sérieusement en cause l'avis récent du collège des médecins de l'OFII. Les autres documents médicaux produits, s'ils indiquent chacun les différentes pathologies dont souffre MmeB..., ne précisent pas qu'elle ne pourrait bénéficier de soins appropriés à son état de santé en Algérie. Ces documents sont dès lors insuffisants pour remettre en cause l'avis du collège de médecins et l'appréciation de la préfète sur l'état de santé de la requérante. Par ailleurs, si la requérante indique qu'elle sera isolée en Algérie et pas à même d'accéder à une possible offre de soin, cette circonstance n'est pas de nature à établir que la préfète aurait méconnu les dispositions précitées de l'article 6 de l'accord franco-algérien.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. Il ressort des pièces du dossier que Mme B...est entrée récemment en France à l'âge de cinquante-cinq ans, que son mari et sa fille vivent en Algérie. Si elle fait valoir qu'elle sera isolée, compte tenu de sa pathologie, de la séparation d'avec son mari depuis 2003 et d'une pathologie dont sa fille serait atteinte, empêchant cette dernière de s'occuper d'elle, ces circonstances, compte tenu du nombre d'années passées par la requérante dans son pays d'origine et de son entrée récente sur le territoire français, ne sont pas de nature à établir que l'arrêté attaqué aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale.
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
12. La requérante soutient qu'elle serait dans l'impossibilité de suivre son traitement médical en Algérie ce qui entraînera son décès et qu'elle sera également privée de ses proches qui la soutiennent dans le suivi de son traitement médical du fait de son handicap et de sa dépendance. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'elle pourra bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine. De plus, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présence de sa famille en France serait indispensable pour pouvoir suivre son traitement. Ainsi, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
14. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeB..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions de la requête à fin d'injonction sous astreinte doivent, dès lors, être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont Mme B...sollicite le versement au profit de son conseil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 25 juin 2019 , où siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Giraud, premier conseiller,
- Mme Bougrine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 juillet 2019.
Le rapporteur,
T. GIRAUDLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT00115