Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 novembre 2018 et 25 avril 2019 le centre hospitalier de Saint-Malo, représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 6 septembre 2018 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Rennes ;
3°) de mettre à la charge de M. E... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le recours de M. E... était irrecevable, la décision contestée devant être regardée comme une mesure d'ordre intérieur ;
- les premiers juges ne pouvaient se fonder sur des faits postérieurs à la décision contestée pour l'annuler ;
- l'avis du 29 avril 2016 sur lequel se sont fondés les premiers juges ne se prononce pas sur l'inaptitude définitive de M. E... à exercer ses fonctions ;
- les autres moyens soulevés par M. E... en première instance sont infondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 mars 2019 M. E..., représenté par
Me A..., conclut au non-lieu à statuer sur la requête du centre hospitalier de Saint-Malo.
Il soutient que, dès lors que les parties ont signé un contrat de médiation le 10 octobre 2018, la requête du centre hospitalier de Saint-Malo est dépourvue d'objet.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant le centre hospitalier de Saint-Malo.
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., praticien hospitalier titulaire, spécialisé en hygiène hospitalière, a occupé à partir de 2004 les fonctions de responsable du département d'information médicale (DIM) du centre hospitalier de Saint-Malo, poste sur lequel il a été officiellement nommé le
5 septembre 2011. Il a été placé en congé pour maladie du 28 juin 2012 au 28 juin 2013, puis affecté à son retour sur le poste provisoirement vacant de chef du service d'hygiène hospitalière. Par une décision du 17 juillet 2015, rapportée par le centre hospitalier de Saint-Malo pour vice de forme, et une autre du 7 janvier 2016, il a été affecté à titre permanent sur ce poste. Par un jugement du 6 septembre 2018, le tribunal administratif de Rennes a annulé cette dernière décision. Le centre hospitalier de Saint-Malo relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions aux fins de non-lieu présentées par M. E... :
2. Il ressort des pièces du dossier que M. E... a été placé en position de recherche d'affectation auprès du centre national de gestion à compter du 1er novembre 2018, après avoir signé avec le centre hospitalier de Saint-Malo, le 10 octobre 2018, un contrat de médiation par lequel il s'est engagé, à l'issue d'une formation prise en charge par son employeur, à rechercher une affectation dans un autre établissement de santé. Cet accord, qui ne prévoit pas le renoncement aux actions contentieuses engagées antérieurement par les parties, n'est pas de nature à priver d'objet la présente requête, que le centre hospitalier a d'ailleurs déclaré vouloir maintenir. L'exception de non-lieu soulevée par M. E... ne peut donc qu'être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou de leur contrat ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent de perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination ou une sanction, est irrecevable.
4. Il ressort des pièces du dossier que le 29 juin 2013, à l'issue de son congé pour longue maladie, M. E... a été affecté à titre provisoire sur le poste de chef du service d'hygiène hospitalière, puis s'est vu proposer divers autres postes par le directeur du centre hospitalier de Saint-Malo et par le directeur général de l'ARS, qu'il a tous refusés. Il ressort également du dossier que si M. E... a exprimé à plusieurs reprises à son employeur son souhait d'être réaffecté au sein du DIM du centre hospitalier de Saint-Malo, devenu en 2013 un service communautaire après la constitution d'un groupement de coopération sanitaire entre le centre hospitalier de Saint-Malo et celui de Dinan, il n'a pas fait acte de candidature au poste de chef de ce département lorsqu'il en a eu la possibilité. En tout état de cause, une telle nomination aurait été contraire aux recommandations émises par le directeur général de l'ARS dans un courrier adressé le 17 juin 2013 au directeur du centre hospitalier de Saint-Malo mentionnant que la reprise d'activité devait être envisagée " dans une nouvelle affectation qui ne puisse s'avérer pathogène pour l'intéressé ni générer de tensions ", afin de tenir compte du conflit qui l'opposait à une partie de ses confrères en raison des vives critiques qu'il avait émises, parfois publiquement, à l'encontre du fonctionnement du DIM.
5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision d'affecter de manière permanente M. E... sur le poste de chef du service d'hygiène hospitalière, qui comme il a été dit précédemment a été prise pour préserver sa santé, ait porté atteinte à ses droits et prérogatives statutaires ou à l'exercice d'un droit ou d'une liberté fondamentale, ni qu'elle ait entraîné pour lui une diminution de ses responsabilités ou une perte de rémunération. Il n'est pas davantage établi que cette décision d'affectation à la tête d'un service correspondant à sa spécialité et assortie d'une proposition de formation pour lui faciliter l'adaptation à ses fonctions, constitue une sanction disciplinaire déguisée ou révèle l'existence d'une discrimination. Il suit de là que cette décision d'affectation présentait le caractère d'une mesure d'ordre intérieur qui ne fait pas grief et n'était, en conséquence, pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.
6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que le centre hospitalier de Saint-Malo est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision d'affectation de M. E... du 7 janvier 2016.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... la somme de 800 euros au titre des frais exposés par le centre hospitalier de Saint-Malo et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1601224 du tribunal administratif de Rennes du 6 septembre 2018 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.
Article 3 : M. E... versera au centre hospitalier de Saint-Malo la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Saint-Malo et à
M. F... E....
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur ;
- M. B..., premier conseiller
Lu en audience publique, le 6 novembre 2020.
Le rapporteur
E. B...Le président
I. PerrotLe greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT04104