Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 mai 2018 Mme D..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 16 février 2018 ;
2°) d'annuler la décision du préfet d'Ille-et-Vilaine ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, le tout dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué omet de faire mention de l'ordonnance rendue par le juge des référés dans le même litige ;
- la décision contestée portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée en droit et en fait ;
- en prenant cette décision au motif de l'absence de justification de son identité, le préfet a commis une erreur de droit, méconnu les dispositions de l'article R. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et commis un abus de pouvoir ;
- cette décision a été prise en méconnaissance des dispositions des articles L. 111-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 47 du code civil ;
- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
La requête a été communiquée le 22 mai 2018 au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas produit de mémoire.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 avril 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Coiffet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante de la République démocratique du Congo, relève appel du jugement du 16 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 avril 2017 du préfet d'Ille-et-Vilaine lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.
Sur la régularité du jugement :
2. Contrairement à ce que soutient Mme D..., la circonstance que le jugement attaqué ne mentionne pas l'ordonnance du 16 avril 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Rennes statuant sur sa demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision contestée du 6 avril 2017 du préfet d'Ille-et-Vilaine n'est pas de nature à entacher ce jugement d'irrégularité.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. La décision contestée du 6 avril 2017, qui vise notamment le 11° de l'article L. 313-11 et l'article R. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique avec précision les motifs relatifs à la situation et à l'état de santé de Mme D... justifiant le rejet de sa demande, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle est, dès lors, suffisamment motivée.
4. La délivrance d'une carte de séjour temporaire mention "vie privée et familiale" sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas seulement subordonnée au respect des conditions de fond qu'elles prévoient mais également au respect, par le demandeur, des règles de recevabilité de sa demande et, notamment, de celle imposée par l'article R. 311-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tenant à la production des indications relatives à l'état civil de l'intéressé. L'article 47 pose par ailleurs une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère. Il résulte également de ces dispositions et de celles de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.
5. A l'appui de sa demande de titre de séjour Mme D..., se disant née le 30 octobre 1992, a produit un acte de naissance et sa copie intégrale établis le 15 mai 2016 sur la base d'un jugement supplétif non produit du 4 mai 2016 et qui ont été signalés par la police au frontières comme entachés de lacunes et incohérences qui ne permettaient pas de regarder ces actes comme authentiques. Si l'intéressée soutient que ces actes n'ont pas été expressément déclarés frauduleux ou falsifiés et que des incohérences administratives ne suffisent pas à fonder automatiquement une remise en cause de l'identité de la personne concernée et que son passeport, établi postérieurement à ces actes, a été reconnu authentique, elle ne démontre pas que le préfet d'Ille-et-Vilaine aurait en l'espèce estimé à tort que ces actes étaient dépourvus de force probante quant à l'établissement de son état civil. En outre, la requérante ne conteste pas qu'elle est connue du fichier Visabio, qui recense tous les demandeurs de visa pour l'espace Schengen, pour avoir sollicité et obtenu, le 16 décembre 2013, sous une identité différente et avec une date de naissance au 30 octobre 1984, un visa de court séjour auprès du poste consulaire italien à Kinshasa pour se rendre en Italie. Mme D..., qui a, dans ces conditions, bénéficié des vérifications utiles prévues par l'article 47 du code civil, ne conteste pas utilement ces constatations en faisant notamment valoir que l'authenticité de son nouveau passeport, établi le 8 octobre 2016 et qui porte des indications conformes aux actes d'état civil précédemment évoqués, n'est pas contestée, aucune force probante particulière ou supérieure ne pouvant être attribuée par principe à un tel document. Par suite, le préfet d'Ille-et-Vilaine a pu, sans commettre d'erreur de droit ni méconnaître les dispositions de l'article R. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni commettre d'abus de pouvoir, estimer que Mme D... ne justifiait pas de façon probante de son état civil et rejeter, pour ce motif, sa demande de titre de séjour pour raisons médicales.
6. Enfin, pour le surplus, Mme D... se borne à invoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux développés en première instance. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges et tirés de ce que l'intéressée ne peut se prévaloir utilement de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de ce que la décision contestée portant refus de titre de séjour n'est pas entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
D E C I D E
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Berthon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 décembre 2018.
Le rapporteur,
O. Coiffet
Le président,
I. Perrot
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18NT018112