Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 3 avril 2019 et 31 mars 2020 M. E..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 1er février 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 26 septembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au centre hospitalier de Bayeux de le réintégrer à compter du
1er décembre 2017 ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Bayeux la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la commission administrative paritaire n'a pas été saisie en méconnaissance de l'article 17-1 du décret du 6 février 1991 ;
- la lettre de licenciement qui lui a été adressée ne comportait pas la mention des conditions de reclassement ;
- l'obligation de reclassement elle-même a été méconnue ; la charge de prouver l'impossibilité de reclassement incombe à l'employeur.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 décembre 2019 le centre hospitalier de Bayeux, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de M E... au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par M. E... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 91-155 du 6 février 1991
- le décret n° 2007-1188 du 3 août 2007 ;
- le décret n° 2015-1434 du 5 novembre 2015 ;
- l'arrêté du 4 juin 2018 fixant la date des prochaines élections professionnelles dans la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., recruté par l'hôpital de Bayeux le 26 février 2003, en qualité d'agent des services hospitaliers qualifié, sur un poste de brancardier, d'abord sous contrats à durée déterminée puis sous contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2005, a été victime d'un malaise cardiaque le 22 mars 2017 et placé en arrêt de travail jusqu'au
1er décembre 2017. A la suite de la visite médicale de reprise du 22 mai 2017 concluant à l'inaptitude au poste de brancardier, M. E... a, le 23 mai 2017, sollicité son reclassement. Après lui avoir proposé le 11 juillet suivant un poste de standardiste, que M. E... a accepté, le centre hospitalier a retiré sa proposition, l'estimant incompatible avec l'avis du médecin du travail. Par une décision du 26 septembre 2017, le centre hospitalier de Bayeux a licencié l'agent pour inaptitude physique à compter du 1er décembre 2017. Par un jugement du 1er février 2019, dont M. E... relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande d'annulation de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 2-1 du décret du 6 février 1991, dans sa rédaction issue du décret du 5 novembre 2015 : " I.- Une commission consultative paritaire compétente à l'égard des agents contractuels mentionnés à l'article 1er est instituée, dans chaque département, par arrêté du directeur général de l'agence régionale de santé agissant au nom de l'Etat. Il en confie la gestion à l'un des établissements publics de santé dont le siège se trouve dans le département. (...) II.- Ces commissions sont obligatoirement consultées dans les cas prévus aux articles 17-1, (...) ". Aux termes de l'article 17-1 du même décret : " I.-Lorsqu'à l'issue d'un congé prévu au présent titre, il a été médicalement constaté par le médecin agréé qu'un agent se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, l'autorité investie du pouvoir de nomination convoque l'intéressé à l'entretien préalable prévu à l'article 43 (...). / Si l'autorité investie du pouvoir de nomination décide, à l'issue de la consultation de la commission consultative paritaire prévue à l'article 2-1, de licencier l'agent, elle lui notifie sa décision par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre précise le motif du licenciement et la date à laquelle celui-ci doit intervenir, compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis prévu à l'article 42. Cette lettre informe également l'intéressé qu'il peut présenter une demande écrite de reclassement, dans un délai correspondant à la moitié de la durée du préavis prévu à l'article 42 et lui indique les conditions dans lesquelles les offres de reclassement sont susceptibles de lui être adressées. " et aux termes de l'article 17-2 de ce décret : " I- Lorsque (...) le reclassement n'est pas possible ou lorsque l'agent refus le bénéfice de la procédure de reclassement (...) l'agent est licencié (...) ". Aux termes de l'article 44 du même décret : " Lorsqu'à l'issue de la consultation de la commission consultative paritaire prévue à l'article 2-1, et de l'entretien prévu à l'article 43, l'administration décide de licencier un agent, elle lui notifie sa décision par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. (...) ".
3. Par ailleurs, le IV de l'article 58 du décret du 5 novembre 2015 précise : " Les procédures dans lesquelles est prévue la consultation de la commission consultative paritaire restent régies par les dispositions du décret du 6 février 1991 susvisé dans sa rédaction antérieure au présent décret, jusqu'à l'installation de celle-ci ". Aux termes du V de ce même article : " Les commissions consultatives paritaires sont mises en place au plus tard lors du prochain renouvellement général des commissions administratives paritaires locales et départementales de la fonction publique hospitalière. ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 4 juin 2018 fixant la date des prochaines élections professionnelles dans la fonction publique hospitalière : " La date des élections pour le renouvellement général des commissions administratives paritaires locales et départementales du personnel des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 susvisée, des commissions consultatives paritaires compétentes à l'égard des agents contractuels de la fonction publique hospitalière, des comités techniques d'établissement des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 susvisée et des groupements de coopération sanitaire de moyens de droit public, des commissions administratives paritaires nationales de la fonction publique hospitalière et du comité consultatif national institué par l'article 25 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, est fixée au jeudi 6 décembre 2018 pour l'ensemble du territoire de la République française. (...) ". Aux termes de l'article 2 du même arrêté : " Il est mis fin au mandat des représentants des personnels des comités techniques et des commissions administratives paritaires mentionnés en annexe du présent arrêté le 31 décembre 2018. Le mandat des nouveaux représentants des personnels au sein de ces instances débute à compter de la date d'entrée en vigueur de l'acte les nommant et, au plus tard, le 14 janvier 2019. ".
3. Il résulte des dispositions précitées que l'obligation de consultation des commissions consultatives paritaires sur les licenciements des agents contractuels des établissements hospitaliers ne trouve à s'appliquer qu'à compter de la mise en place de ces commissions et, au plus tard, lors du prochain renouvellement général des commissions administratives paritaires locales et départementales de la fonction publique hospitalière. Il n'est pas contesté que la commission concernée n'avait pas encore été mise en place au centre hospitalier de Bayeux à la date de la décision en litige. Par conséquent, le moyen tiré du défaut de consultation de la commission consultative paritaire prévue aux articles 2-1 et 44 du décret du 6 février 1991, dans leur rédaction issue du décret du 5 novembre 2015, doit être écarté.
4. Par ailleurs, si M. E... soutient que les dispositions précitées de l'article 17-1 du décret du 6 février 1991 ont été méconnues faute pour la décision en litige du
26 septembre 2017 de mentionner les conditions dans lesquelles les offres de reclassement pouvaient lui être adressées, il ressort des pièces du dossier que le requérant a, le 23 mai 2017, saisi le centre hospitalier d'une demande de reclassement et que, le 11 juillet suivant, le centre hospitalier lui a proposé un poste d'agent d'accueil au standard. Dans ces conditions, bien que la décision en litige n'ait pas rappelé à M. E... la possibilité qui lui est offerte de demander un reclassement professionnel, cette circonstance ne l'a, en tout état de cause, pas privé d'une garantie.
5. En second lieu, il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il incombe à l'employeur public, avant de pouvoir prononcer son licenciement, de chercher à reclasser l'intéressé. Ce principe est applicable aux agents contractuels de droit public des établissements hospitaliers. La mise en oeuvre de ce principe implique que l'employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l'emploi précédemment occupé ou, à défaut d'un tel emploi, tout autre emploi si l'intéressé l'accepte. Dans le cas où le reclassement s'avère impossible, faute d'emploi vacant, ou si l'intéressé refuse la proposition qui lui est faite, il appartient à l'employeur de prononcer son licenciement. Ce n'est que lorsque ce reclassement est impossible, soit qu'il n'existe aucun emploi vacant pouvant être proposé à l'intéressé, soit que l'intéressé est déclaré inapte à l'exercice de toutes fonctions ou soit que l'intéressé refuse la proposition d'emploi qui lui est faite, que l'employeur peut prononcer son licenciement.
6. Dans son avis du 27 mai 2017, le médecin du travail a estimé que M. E..., à la suite de l'accident cardiaque dont il avait été victime le 22 mars 2017, présentait une inaptitude aux fonctions de brancardier mais était, en revanche, apte à occuper un poste sans manutention de charges ou de patients, de jour et sans conduite automobile. Si un poste d'agent d'accueil au standard a été proposé à l'intéressé le 11 juillet suivant, poste que le requérant a accepté, il ressort cependant des termes de l'attestation du 30 août 2017 du Dr Barret, médecin agréé, que, bien que M. E... présente une aptitude physique pour exercer des fonctions de standardiste, il doit toutefois éviter les efforts physiques importants et le travail de nuit. Le poste proposé à l'agent dans le cadre d'un reclassement comportant du travail de jour et du travail de nuit, le centre hospitalier de Bayeux a retiré sa proposition de reclassement pour ce motif.
7. Si M. E... se prévaut de ce que l'agent occupant précédemment le poste qui lui avait été proposé exerçait ses fonctions de standardiste avec seulement des horaires de jour, il ressort des pièces du dossier que ce n'est que par suite d'un aménagement de ses horaires pour raisons de santé qu'un tel emploi du temps avait été mis en place pour cette personne, et que le retour à une organisation du travail des agents d'accueil-standardiste avec des horaires décalés de jour et de nuit était nécessaire à l'employeur pour satisfaire au mieux les besoins du service, en particulier dans le service des urgences.
8. Par ailleurs, s'il ressort de la liste des postes vacants en 2017 au sein des différents établissements relevant du centre hospitalier de Bayeux, que plusieurs emplois étaient à pourvoir, ces postes correspondaient soit à des fonctions paramédicales exigeant la détention de diplômes spécifiques que ne possède pas M. E..., soit à des fonctions d'agent administratif pour lesquelles ce dernier ne conteste pas ne pas avoir les compétences requises, soit enfin à des emplois d'agent de service pour lesquels le requérant présente des
contre-indications médicales.
9. Enfin, si pour satisfaire à son obligation de reclassement l'employeur doit envisager des mesures telles que des mutations, des transformations de poste ou des aménagements du poste ou du temps de travail et s'il peut être amené à assurer une formation complémentaire lorsqu'elle permet son reclassement dans un poste plus qualifié, l'employeur n'a pas l'obligation d'assurer au salarié inapte une formation sur un métier différent du sien. Il n'est pas davantage tenu de lui proposer un poste nécessitant une formation initiale qui lui ferait défaut.
10. Il s'ensuit que c'est sans méconnaître son obligation de reclassement que le directeur du centre hospitalier de Bayeux, après consultation de la commission d'affectation et de suivi des postes aménagés, a pu procéder au licenciement pour inaptitude physique de M. E....
11. Il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent également être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle que soit mise à la charge du centre hospitalier de Bayeux, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. E... demande au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le centre hospitalier de Bayeux au même titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier de Bayeux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... et au centre hospitalier de Bayeux.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot président de chambre,
- Mme B..., président-assesseur,
- M. Berthon premier conseiller,
Lu en audience publique le 9 octobre 2020.
Le rapporteur
C. B...
Le président
I. Perrot
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT01327