Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 6 novembre 2020 et 7 avril 2021 M. A..., représenté par Me Cavelier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 8 octobre 2020 ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 200 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- en se bornant à constater l'existence d'attaches familiales dans son pays d'origine prenant et en ne retenant que ce critère, le préfet a entaché sa décision de refus de titre de séjour d'erreur de droit au regard des dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de ces mêmes dispositions, dont il remplit toutes les conditions ;
- cette décision est entachée d'erreur de fait et porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 mars 2021, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 décembre 2020.
La clôture de l'instruction a été fixée au 9 avril 2021 à 12 heures par une ordonnance du 9 mars 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le Rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien né le 5 décembre 2001, déclare être entré irrégulièrement en France le 6 août 2017. Après avoir été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département de la Seine-Saint-Denis en qualité de mineur isolé, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 11 décembre 2019. Par un arrêté du 9 juin 2020, le préfet du Calvados a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du
8 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) ".
3. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le juge de l'excès de pouvoir exerce sur cette appréciation un entier contrôle.
4. Il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment de l'arrêté contesté que, pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. A... sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Calvados aurait entendu subordonner la délivrance de ce titre à l'absence de liens de l'intéressé dans son pays d'origine, d'une part, et qu'il n'aurait pas procédé à une appréciation globale de sa situation au regard des critères prévus par les dispositions précitées, d'autre part. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'erreur de droit ne peut qu'être écarté.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui déclare être entré en France le 6 août 2017, a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance à l'âge de quinze ans et dix mois, le 3 octobre 2017 et a bénéficié d'un contrat jeune majeur à compter de sa majorité. Il n'est pas établi, ni même allégué, qu'il constituerait une menace à l'ordre public. Il a suivi au lycée professionnel privé Victorine Magne de Lisieux un cursus d'apprentissage de la langue française au titre de l'année scolaire 2017-2018, puis une classe de 3ème en unité pédagogique pour élèves allophones arrivants (UPE2A) au titre de l'année 2018-2019. Au cours de l'année scolaire 2019-2020, l'intéressé était inscrit en 1ère année de CAP carreleur mosaïste au centre de formation des apprentis du bâtiment de Caen. Si ses bulletins de notes traduisent globalement l'implication de M. A... dans son parcours de formation, ils font aussi régulièrement état de ses difficultés et présentent, pour cette année 2019-2020, des résultats mitigés assortis de nombreuses absences, quoique justifiées. S'il bénéficie d'un avis favorable de sa structure d'accueil, cette dernière relève aussi la nécessité d'un accompagnement due notamment à son imparfaite maîtrise de la langue. En outre, à supposer même établie la circonstance que son père serait décédé et que son frère aîné résiderait, selon les déclarations variables de l'intéressé, au Congo ou au Gabon, M. A... conserve des attaches familiales dans son pays d'origine où résident notamment ses deux sœurs et sa mère, au domicile de laquelle il vivait. S'il allègue avoir perdu tout contact avec sa famille, il ressort toutefois de ses déclarations que son voyage depuis le Mali a été financé et suivi par son frère, que sa mère lui a également apporté son aide et lui a procuré un acte de naissance lorsqu'il se trouvait en Italie, l'intéressé n'apportant aucune explication quant au fait que les contacts avec sa famille auraient cessé seulement depuis son arrivée en Italie, comme il le prétend. Ainsi, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, en refusant de délivrer le titre de séjour sollicité par M. A... sur le fondement des dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Calvados n'a entaché sa décision ni d'erreur de fait ni d'erreur d'appréciation.
6. Pour le surplus, M. A... se borne à invoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux développés en première instance et tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour porterait une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance de ces mêmes stipulations et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
D E C I D E
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 2 septembre 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, présidente,
- Mme C..., présidente-assesseure,
- M L'hirondel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition du greffe le 17 septembre 2021.
La rapporteure
C. C...
La présidente
I. Perrot
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20NT034652