Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 septembre 2019 M. et Mme D..., représentés par Me B..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 27 juin 2019 ;
2°) de condamner le CHU de Caen à leur verser la somme de 50 000 euros en réparation de leur préjudice moral ;
3°) de mettre à la charge du CHU de Caen la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les médecins du CHU de Caen, qui ne pouvaient ignorer que leur enfant était mort in utero des suites d'une chorioamniotite, auraient dû les informer des causes de son décès, ce qui aurait permis d'éviter l'échec de la deuxième grossesse de Mme D... ;
- l'accouchement aurait dû être déclenché plus rapidement pour leur éviter le traumatisme qu'ils ont subi ;
- leur préjudice moral peut être évalué à 50 000 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 avril 2020 le CHU de Caen, représenté par Me H..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de Me F..., représentant le CHU de Caen.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... était enceinte de sept mois lorsqu'elle a bénéficié, le 18 septembre 2006, d'une échographie qui a révélé l'absence de rythme cardiaque du foetus. Elle a été immédiatement dirigée vers le CHU de Caen. Le 20 septembre 2006, elle a accouché par voie basse d'un enfant mort in utero, prénommé E.... En 2007, une deuxième grossesse a été interrompue par une fausse couche. De nouveau enceinte en 2010, Mme D... s'est vue prescrire par son nouveau gynécologue une stérilisation de l'utérus et une antibiothérapie durant le premier trimestre de la grossesse ainsi qu'une antibiothérapie au cours de l'accouchement. Le 21 juin 2011, Mme D... a donné naissance à un enfant en bonne santé. Le 31 décembre 2016, M. et Mme D... ont adressé au CHU de Caen une demande indemnitaire préalable qui a été rejetée par une décision du 15 février 2017. Ils ont alors saisi le tribunal administratif de Caen d'un recours indemnitaire, qui a été rejeté par un jugement du 27 juin 2019. M. et Mme D... relèvent appel de ce jugement.
Sur la responsabilité :
2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. ".
3. En premier lieu, M. et Mme D... soutiennent que le CHU de Caen a tardé à déclencher l'accouchement de Mme D..., intervenu 48 heures environ après sa prise en charge. Il résulte toutefois de l'instruction qu'un tel délai n'est pas anormal au regard des recommandations du collège national des gynécologues obstétriciens français, eu égard en particulier à la nécessité d'administrer à la mère un traitement médicamenteux au moins 24 heures avant l'expulsion du foetus mort. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la prise en charge de Mme D... entre le 18 et le 20 septembre 2006 aurait été fautive.
4. En second lieu, M. et Mme D... soutiennent que, n'ayant pas été informés par les médecins du CHU de Caen des causes du décès de leur enfant E..., qu'ils attribuent à une infection de la cavité amniotique provoquée par un streptocoque de type B, la deuxième grossesse de Mme D... n'a pu être menée à son terme. Toutefois, la circonstance que Mme D... a pu aller au bout de sa troisième grossesse après une stérilisation de l'utérus et une antibiothérapie ne suffit pas à confirmer leur hypothèse de la cause du décès de leur enfant E.... Il résulte d'ailleurs d'un courrier adressé le 5 décembre 2006 par un médecin du CHU de Caen au gynécologue de Mme D..., courrier dont le contenu n'est infirmé par aucune autre pièce de l'instruction, que " la présence de streptocoque B et de candida albicans (...) ne peuvent pas être mis en cause dans cette mort foetale in utero " et que, en l'absence d'examen foeto-pathologique, examen auquel les requérants se sont opposés, il n'est pas possible de déterminer la cause du décès de E.... M. et Mme D... ne sont donc pas fondés à soutenir que le CHU de Caen aurait commis une faute à leur égard en ne les informant pas de ce que leur enfant E... serait décédé en raison d'une infection de la cavité amniotique provoquée par un streptocoque de type B.
5. Il résulte de ce qui précède que la responsabilité du CHU de Caen n'est pas engagée et que, par voie de conséquence, M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande indemnitaire.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le CHU de Caen, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, verse à M. et Mme D... la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... et Mme A... D..., au CHU de Caen et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Couvert-Castéra, président de la cour,
- Mme Brisson, président assesseur,
- M. C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 janvier 2021.
Le rapporteur
E. C...Le président
O. Couvert-Castéra
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT03585