Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 avril 2018, M.C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 8 décembre 2017 ;
2°) d'annuler les décisions du 5 décembre 2017 de la préfète de la Loire-Atlantique ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire-Atlantique de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que la décision de remise aux autorités italiennes :
- est insuffisamment motivée ;
- est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'indique pas qu'un entretien individuel aurait été réalisé ;
- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2018, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Le préfet déclare s'en remettre à ses écritures de première instance et informe la cour de ce que M. C...est considéré en fuite depuis le 23 février 2018 et que l'échéance du délai d'exécution de la décision de transfert a été reportée jusqu'au 5 juin 2019.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Besse a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., ressortissant soudanais né le 23 novembre 1990 qui déclare être entré irrégulièrement en France le 2 juin 2017, a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique le 2 octobre 2017. Les recherches effectuées sur le fichier Eurodac ont révélé que ses empreintes avaient été précédemment relevées le 28 mai 2017 en Italie, dont il avait irrégulièrement franchi les frontières. La préfète de la Loire-Atlantique a alors saisi, le 3 octobre 2017, les autorités italiennes d'une demande de prise en charge de l'intéressé sur le fondement du paragraphe 1 de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Les autorités italiennes ont implicitement donné leur accord à cette prise en charge. Par des décisions du 5 décembre 2017, la préfète de la Loire-Atlantique a décidé de remettre M. C...aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence. M. C...relève appel du jugement du 8 décembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
2. En premier lieu, la décision de remise de M. C...aux autorités italiennes litigieuse vise notamment le règlement (UE) n° 604/2013 susvisé, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier son article L. 742-3, ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle comporte en outre un exposé détaillé des considérations de droit et de fait sur lesquelles la préfète de la Loire-Atlantique s'est fondée, en mentionnant notamment que la consultation du fichier Eurodac a révélé que Judo Adam avait irrégulièrement franchi les frontières italiennes le 28 mai 2017, que les autorités italiennes, saisies le 3 octobre 2017 d'une demande de prise en charge de l'intéressé sur le fondement du paragraphe 1 de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ont implicitement donné leur accord à cette prise en charge, et qu'en application des articles 3 et 7 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, l'Italie est le pays responsable de sa demande d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision ne satisferait pas à l'exigence légale de motivation doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Entretien individuel : 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / 2. (...) / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ". Il ressort des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. C...le 2 octobre 2017 qu'il a bénéficié le jour même, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Cet entretien s'est tenu en arabe, langue que l'intéressé a déclaré comprendre, avec l'assistance, par téléphone, d'un traducteur assermenté. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas bénéficié d'un entretien individuel en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013.
4. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de la Loire-Atlantique n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation personnelle de M. C...et des conséquences de son transfert en Italie. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle doit être écarté.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M.C..., qui n'invoque en appel aucun moyen à l'encontre de la décision ordonnant son assignation à résidence, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 5 décembre 2017 par lesquelles la préfète de la Loire-Atlantique a décidé sa remise aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D...C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 18 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,
- M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 janvier 2019.
Le rapporteur,
P. BesseLe président,
L. Lainé
Le greffier,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT01405