Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 avril 2014 et le 18 février 2015, le Conseil national des activités privées de sécurité, représenté par MeC..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 18 février 2014 ;
2°) de mettre à la charge de Mme E...la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'administration était en situation de compétence liée au regard des dispositions de l'article L. 622-19 du code de la sécurité intérieure ;
- l'ancienneté et le caractère isolé d'une condamnation ne sauraient être retenus comme circonstances atténuantes ;
- il faut raisonner comme en matière de sécurité privée ;
- les faits commis étaient incompatibles avec l'exercice de l'activité envisagée ;
- la délivrance le 31 janvier 2014 de l'autorisation sollicitée ne fait pas obstacle à la recevabilité de l'appel.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 octobre 2014 et le 9 mars 2015, Mme B...E..., représentée par MeF..., conclut :
- au rejet de la requête ;
- à ce que soit mise à la charge du Conseil national des activités privées de sécurité la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la carte professionnelle sollicitée ayant été accordée le 31 janvier 2014, le CNAPS est dépourvu d'intérêt à agir ;
- le critère de l'ancienneté des faits et leur caractère isolé pouvaient être pris en compte par le tribunal ;
- elle exerçait les fonctions en cause depuis 2002 ;
- les faits étaient sans rapport avec l'activité professionnelle ;
- les activités de sécurité privées ne sont pas identiques à celles d'agent de recherches.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lainé,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant MmeE....
1. Considérant que Mme E...a sollicité en octobre 2012 la délivrance d'une carte professionnelle relative aux activités de sécurité dans le but d'exercer la profession d'agent de recherches privées ; que cette demande a été rejetée par la commission interrégionale d'agrément et de contrôle Ouest le 28 novembre 2012 ; que Mme E...a formé un recours contre cette décision devant le conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) ; que le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans ayant suspendu l'exécution de la décision implicite de rejet née du silence gardé sur ce recours administratif préalable obligatoire, le CNAPS a explicitement rejeté le recours de l'intéressée, par décision du 23 mai 2013 ; que le CNAPS relève appel du jugement du 18 février 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé cette décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 622-19 du code de la sécurité intérieure, régissant l'octroi de la carte professionnelle délivrée en vue de l'exercice de l'activité d'agent de recherches privées : " Nul ne peut être employé pour participer à l'activité mentionnée à l'article L.621-1 : 1° S'il a fait l'objet d'une condamnation à une peine correctionnelle ou à une peine criminelle inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire ou, pour les ressortissants étrangers, dans un document équivalent, pour des motifs incompatibles avec l'exercice des fonctions ; (...) " ;
3. Considérant que pour rejeter la demande de Mme E...tendant à la délivrance d'une carte professionnelle relative aux activités de sécurité, le CNAPS s'est fondé sur les motifs que le bulletin n°2 de son casier judiciaire faisait mention d'une condamnation, prononcée le 28 novembre 2007 par le tribunal correctionnel de Tours, à une peine d'emprisonnement d'un mois avec sursis et à une suspension de son permis de conduire pendant 8 mois pour conduite d'un véhicule en état d'ivresse manifeste et outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique et que ces faits étaient incompatibles avec l'exercice de l'activité d'agent de recherches privées ;
4. Considérant que les faits à l'origine de la condamnation avaient été commis le 15 mai 2007 soit près de six années avant l'intervention de la décision contestée et qu'ils étaient isolés, aucun autre fait répréhensible ne pouvant être retenu à l'encontre de MmeE..., tant à titre privé que dans l'exercice de sa profession d'agent d'enquêtes exercée, depuis 2002, comme employée de la société ATER, spécialisée en enquêtes civiles ; qu'ils étaient en outre sans rapport direct avec l'activité que l'intéressée souhaite exercer ; que, dans ces conditions, en regardant les motifs de la condamnation qui figurait encore au bulletin du casier judiciaire de l'intéressée comme incompatibles avec l'exercice des fonctions d'agent de recherches privées, le CNAPS a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que le CNAPS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Orléans a, par le jugement attaqué, annulé la décision du 23 mai 2015 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que MmeE..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse au CNAPS une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CNAPS la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme E...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du Conseil national des activités privées de sécurité est rejetée.
Article 2 : Le Conseil national des activités privées de sécurité versera une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros à Mme E...au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Conseil national des activités privées de sécurité et à Mme B...E....
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 février 2016.
Le président-rapporteur,
L. LAINÉL'assesseur le plus ancien,
C. LOIRAT
Le greffier,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
3
N° 14NT01013