Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 mai 2014 et 26 mai 2015, Mme B..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 avril 2014 ;
2°) d'annuler la décision du 8 juin 2011 par laquelle le président du conseil général de Maine-et-Loire a refusé de renouveler son agrément d'assistante maternelle ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux prise le 4 juillet 2011 ;
3°) d'enjoindre au président du conseil général de Maine-et-Loire de renouveler son agrément ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4 ) de mettre à la charge du département de Maine-et-Loire une somme de 2 500 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la convocation du 2 mai 2011 devant la commission consultative paritaire ne mentionne pas les motifs du non-renouvellement envisagé de son agrément d'assistante maternelle, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 421-23 du code de l'action sociale et des familles ; elle a été ainsi privée d'une garantie substantielle ;
- les motifs évoqués dans la lettre du 16 novembre 2010 et ceux retenus par la décision contestée ne sont pas les mêmes ;
- en ne saisissant pas la commission de recours gracieux, alors qu'elle avait fait valoir des éléments nouveaux à l'appui de son recours gracieux, le président du conseil général de Maine-et-Loire a méconnu la procédure contradictoire et en particulier les dispositions de l'article 24 de la loi relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- les témoignages des parents, le soutien de l'association " les KoKinoo " et du maire de la commune de Montreuil-Bellay établissent l'inexactitude matérielle des motifs de la décision contestée, soit sa difficulté prétendue à appréhender les besoins réels et individuels de chaque enfant accueilli et le débordement également prétendu de son rôle d'assistance maternelle ; sa mise en oeuvre des prescriptions de sécurité a par ailleurs été actée dès le 11 janvier 2007 ;
- la décision est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que contrairement à ce qu'on lui oppose, elle sait associer les parents à son projet éducatif ; le retrait de son agrément est disproportionné dès lors que ni la santé, ni la sécurité ni l'épanouissement des enfants accueillis ne sont en cause et qu'une telle mesure ne saurait être justifiée par la seule différence d'approche sur le projet éducatif entre les services départementaux d'une part et l'assistante maternelle avec le consentement des parents, d'autre part.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 octobre 2014 et 22 octobre 2015, le département de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de Mme B...le versement d'une somme de 3 000 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête de Mme B...n'est fondé.
Par ordonnance du 9 octobre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 9 novembre 2015 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant le département de Maine-et-Loire.
1. Considérant que Mme B...a obtenu son premier agrément d'assistante maternelle le 1er décembre 2000, permettant l'accueil permanent d'un enfant de 0 à 6 ans et l'accueil non permanent d'un enfant de 2 à 18 ans, et que cet agrément a fait l'objet d'un renouvellement le 4 janvier 2007, permettant l'accueil permanent de deux enfants de 0 à 6 ans,et l'accueil non permanent d'un enfant de 2 à 18 ans ; qu'elle a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 8 juin 2011 par laquelle le président du conseil général de Maine-et-Loire a, sur avis défavorable de la commission consultative paritaire départementale, refusé de renouveler à nouveau cet agrément, ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux prise le 4 juillet 2011 ; que, par la présente requête, Mme B...relève appel du jugement n°1108237 du 3 avril 2014 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'action sociale et des familles : " L'assistant maternel est la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon non permanente des mineurs à son domicile. / L'assistant maternel accueille des mineurs confiés par leurs parents, directement ou par l'intermédiaire d'un service d'accueil mentionné à l'article L. 2324-1 du code de la santé publique. Il exerce sa profession comme salarié de particuliers employeurs ou de personnes morales de droit public ou de personnes morales de droit privé dans les conditions prévues au chapitre III du présent livre, après avoir été agréé à cet effet " ; qu'aux termes de l'article L. 421-3 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil général du département où le demandeur réside. / Un référentiel approuvé par décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément. / (...) / L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne... " ; que l'article L. 421-6 du même code prévoit que : " Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil général peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait " ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 421-23 du code de l'action sociale et des familles : " L'assistant maternel ou l'assistant familial concerné est informé, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, des motifs de la décision envisagée à son encontre, de la possibilité de consulter son dossier administratif et de présenter devant la commission ses observations écrites ou orales. " ; que, d'une part, ces dispositions n'imposent pas que les motifs de la décision envisagée soient indiqués à l'intéressée uniquement dans le courrier de convocation devant la commission consultative paritaire départementale ; qu'en l'espèce, Mme B...a été informée des motifs du refus de renouvellement d'agrément par une lettre du président du conseil général du 16 novembre 2010 ; que, par suite, la circonstance que la lettre du 2 mai 2011 l'informant de la réunion de la commission, qui comporte par ailleurs toutes les mentions réglementaires, notamment celle de la faculté de présenter des observations orales ou écrites, ne rappelle pas les motifs de la décision envisagée est sans influence sur la légalité des décisions contestées ; que, d'autre part, si les motifs indiqués dans la décision du 8 juin 2011 sont rédigés différemment de ceux énumérés par la lettre susmentionnée du 16 novembre 2010, s'y retrouvent les mêmes éléments relatifs au manque de souplesse dans ses conceptions éducatives, au caractère excessif ou manquant de recul de certains comportements, ainsi qu'à l'incapacité à écouter les points de vue différents du sien et à évoluer ; que, dans ces conditions, la seule circonstance que le motif tiré de ce que " les conditions de sécurité ne sont pas garanties " ne soit pas repris dans la décision contestée n'est pas de nature à entacher celle-ci d'une irrégularité ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que la décision du 4 juillet 2011 par laquelle le président du conseil général de Maine-et-Loire ne soit pas elle-même motivée est sans influence sur la légalité du refus de renouvellement de l'agrément dès lors qu'elle doit être regardée comme s'appropriant les motifs et le dispositif de la décision initiale du 8 juin 2011 qui est, elle, suffisamment motivée ; que le moyen tiré de ce que la décision du 4 juillet 2011 n'aurait pas été précédée de la consultation de la " commission de recours gracieux " est, en tout état de cause, inopérant dès lors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait la consultation d'une telle commission ;
5. Considérant, en troisième lieu, que Mme B...ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, qui ne trouvent pas à s'appliquer aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives, comme c'est le cas en l'espèce des dispositions de l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles, ont instauré une procédure contradictoire particulière ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que la décision contestée du 8 juin 2011 par laquelle le président du conseil général de Maine-et-Loire a refusé de renouveler l'agrément de Mme B...pour exercer la profession d'assistante maternelle est motivée, d'une part, par sa " difficulté à prendre en compte la réalité, les besoins individualisés et l'évolution de chaque enfant accueilli ", d'autre part, par le fait que son comportement l'amenait à " dépasser le cadre de sa fonction d'assistante maternelle et ne pas laisser aux parents la place qui est la leur ", enfin, par la circonstance que sa pratique professionnelle n'avait pas évolué malgré le suivi psychologique et la formation dont elle avait bénéficié en 2009 ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les cinq attestations produites par la requérante font état de son investissement auprès des enfants, de la qualité des soins qu'elle leur apporte et de la diversité des activités auxquelles elle les fait participer, de son dévouement ainsi que de sa souplesse envers les parents, en dépit d'un caractère " prononcé " et direct ; que, toutefois, il ressort du dossier d'évaluation, établi en novembre 2010 pour l'instruction de sa demande de renouvellement d'agrément, qu'en octobre 2007 le service départemental a reçu un courrier se plaignant de son caractère " autoritaire " après qu'elle eut remis en cause les progrès d'un enfant et l'éducation donnée par ses parents qui avaient des conceptions divergentes des siennes, qu'elle lui eut infligé une punition parce qu'il refusait de dire bonjour ou de s'habiller, comparant constamment l'évolution de l'enfant accueilli et ses propres enfants et refusant de lui donner son " doudou " ; qu'un conflit sur l'alimentation de l'enfant est survenu avec les parents d'une petite fille en 2008 ; que si le problème de la sécurisation de l'escalier intérieur et de la terrasse extérieure de sa maison semblait résolu, depuis peu, à la date de la décision contestée, il ressort du dossier que Mme B...a résisté plusieurs années aux recommandations du département sur les mesures d'adaptation de son logement à la garde de jeunes enfants ; que si elle a accueilli à trois reprises des enfants présentant une problématique médicale qu'elle a elle-même repérée et orientée, elle s'est prévalu de ses compétences médicales, issues de son passé d'aide-soignante, pour manifester un surinvestissement auprès d'enfants connaissant des problèmes de santé ; qu'elle a fait preuve d'un manque de neutralité et de distance vis-à-vis de certains parents ; qu'enfin, lors de l'entretien intervenu le 9 novembre 2010 à son domicile dans le cadre de l'instruction de sa demande de renouvellement d'agrément, elle a manifesté à l'égard de l'infirmière puéricultrice et de l'assistante sociale représentant le service, devant l'enfant qu'elle gardait, une rigidité et une agressivité dont le caractère particulièrement excessif révélait de manière flagrante une incapacité à écouter les points de vue différents des siens, en particulier ceux des professionnels chargés de contrôler et d'encadrer son travail, rendant ainsi toute collaboration particulièrement difficile ; qu'il suit de là que le refus de renouveler son agrément en qualité d'assistante maternelle n'est entaché ni de l'erreur de fait ni de l'erreur d'appréciation invoquées ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;
10. Considérant que le rejet des conclusions de Mme B...tendant à l'annulation de la décision du 8 juin 2011 par laquelle le président du conseil général de Maine-et-Loire a refusé de renouveler son agrément d'assistante maternelle et de la décision rejetant son recours gracieux n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au président du conseil départemental de Maine-et-Loire de renouveler son agrément ou de réexaminer sa demande ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme que demande Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge du département de Maine-et-Loire, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme B...le versement au département de Maine-et-Loire d'une somme au titre de ces mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du département de Maine-et-Loire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B...et au département de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 1er mars 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mars 2016.
Le rapporteur,
C. LOIRATLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au préfet de Maine-et-Loire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01444