3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de l'autoriser à solliciter l'asile en France et lui délivrer un récépissé en qualité de demandeur d'asile en procédure normale dans un délai de trois jours, ou à titre subsidiaire, de reprendre l'instruction de sa demande d'asile et de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de deux mille euros à verser à son avocat au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.
Elle soutient que :
. en ce qui concerne la décision portant transfert aux autorités espagnoles :
- le préfet de Maine-et-Loire était incompétent pour prendre la décision contestée, seul le préfet de la Sarthe, département dans lequel elle réside, étant compétent en application des dispositions de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; l'arrêté du 2 octobre 2018 portant régionalisation de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile dans la région Pays de la Loire a été abrogé par le décret du 23 janvier 2019 ;
- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ; le préfet devait faire apparaître le critère de responsabilité retenu et non se borner à faire état de l'acceptation de l'Etat requis ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle ;
- le préfet ne justifie pas avoir requis l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration pour se prononcer sur son état de santé ;
- la décision est entachée d'erreur de droit et d'erreur de fait ; la décision s'appuie sur un accord implicite des autorités espagnoles du 8 avril 2019, pris en application de l'article 22.7 du règlement Dublin, alors que le constat d'accord implicite adressé aux autorités espagnoles n'était fondé sur aucun article ; il n'est pas établi que l'accord implicite corresponde à son cas ;
- les dispositions de l'article 26 du règlement Dublin et de l'instruction ministérielle du 19 juillet 2016 ont été méconnues en l'absence d'accord des autorités espagnoles ; l'accord implicite invoqué par le préfet ne saurait correspondre à son cas ; la décision de transfert a donc été prise de manière prématurée avant l'accord des autorités espagnoles ;
- les dispositions des articles 4 et 5 du règlement Dublin ont été méconnues ; il n'est pas justifié que l'ensemble des informations nécessaires auraient été données par écrit dans une langue qu'elle comprend, puisqu'il ne ressort d'aucun document qu'elle aurait formellement déclaré comprendre le français ; il n'est pas établi que les brochures auraient été remises avant l'entretien individuel et avant le relevé des empreintes digitales, notamment lorsqu'elle s'est présentée, le 18 janvier 2019, à la structure de pré-accueil puisqu'elle a reçu les brochures le 4 février 2019 ;
- le préfet n'a pas examiné la possibilité de conserver sa demande d'asile à titre dérogatoire, en méconnaissance des articles 3.2 et 17 du règlement du 26 juin 2013 ; le jugement a omis de répondre au moyen tiré des risques de persécution, par ricochet, en cas de renvoi en Espagne ; la Guinée est un pays dangereux en raison des tensions politiques et sociales ; elle a dû fuir la Guinée en raison d'une tentative de mariage forcé ; en ne faisant pas application des clauses discrétionnaires, le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- son état de santé est incompatible avec son transfert auprès des autorités espagnoles ; elle suit un protocole de soins faisant obstacle à son transfert ; le préfet ne démontre pas avoir vérifié que son état de santé était compatible avec un transfert en Espagne, ou s'être assuré de l'accord des autorités espagnoles pour l'accueillir et qu'elle pourra bénéficier, dès son arrivée, des soins que requiert son état de santé, en méconnaissance des articles 31 et 32 du règlement du 26 juin 2013 ;
- l'Espagne est dans l'incapacité de faire face à un afflux massif de migrants ce qui constitue un motif de mise en oeuvre des clauses discrétionnaires ; cette situation s'est récemment aggravée ; l'Espagne a démontré sa volonté de ne plus faire face à un afflux massif de migrants ; les défaillances systémiques sont incontestables en Espagne, ce qui interdit d'y transférer des demandeurs d'asile en application de l'article 3.2 du règlement Dublin ; le jugement du tribunal administratif de Nantes est entaché sur ce point d'une erreur de droit quant à la charge de la preuve en la faisant reposer sur elle, puisque s'applique en la matière un système de preuve partagée ; le jugement est entaché d'une erreur de droit en estimant qu'elle devait établir une certitude quant à l'existence de défaillances systémiques ; elle risque d'être soumise à un traitement inhumain ou dégradant en cas de retour en Espagne ; elle risque l'expulsion vers le Maroc puis vers la Guinée ; elle ne bénéficiera pas d'un logement d'accueil décent en Espagne ; elle ne pourra bénéficier des soins que requiert son état de santé ; sa demande d'asile ne serait pas étudiée ou pas dans un délai raisonnable ;
. en ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
- la décision est insuffisamment motivée, l'arrêté ne permettant pas de savoir quel est le cas dans lequel le préfet estime qu'elle se trouve ;
- la décision est illégale en raison de l'illégalité du transfert auprès des autorités espagnoles ;
- la décision est entachée d'erreur de droit en méconnaissance des articles L. 561-2 et L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle se fonde sur l'arrêté de transfert auprès des autorités espagnoles alors qu'aucun accord implicite de ces autorités n'est né ;
- le préfet n'établit pas qu'elle ne pourrait quitter immédiatement le territoire français et que son éloignement serait une perspective raisonnable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2019, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Mme C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 juillet 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D..., première conseillère,
- et les observations de Me B..., représentant Mme C....
Une note en délibéré présentée pour Mme C... a été enregistrée le 8 octobre 2019.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C..., ressortissante guinéenne née en mars 1998, est entrée en France en décembre 2018. Elle a déposé une demande d'asile qui a été enregistrée le 4 février 2019. Par une décision du 9 avril 2019, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités espagnoles pour l'examen de sa demande d'asile et par une décision du même jour, a également prononcé son assignation à résidence. Mme C... relève appel du jugement du 29 avril 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 9 avril 2019 portant transfert auprès des autorités espagnoles et assignation à résidence.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, Mme C... soutient que le premier juge aurait commis une erreur de droit en inversant la charge de la preuve en ce qui concerne la preuve de l'existence de défaillances systémiques en Espagne. Ce moyen procède, toutefois, d'une contestation du bien-fondé du jugement et non de sa régularité. Il doit donc être écarté.
3. En second lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de la requête introduite par Mme C... devant le tribunal administratif de Nantes, qu'elle a invoqué la méconnaissance des dispositions des articles 3.2 deuxième alinéa et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et a indiqué, à l'appui de ce moyen, le fait qu'elle encourrait des risques en cas de retour en Guinée. Le tribunal administratif, qui n'est pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments soulevés devant lui par la requérante, a répondu au moyen tiré de la méconnaissance des articles 3 et 17 du règlement (UE) du 26 juin 2013. Il suit de là que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes serait insuffisamment motivé.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. En premier lieu, l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sans préjudice du second alinéa de l'article 11-1 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004, l'autorité compétente pour renouveler l'attestation de demande d'asile en application de l'article L. 742-1, procéder à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile, assigner à résidence un demandeur d'asile en application du 1° bis du I de l'article L. 561-2 et prendre une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 est le préfet de département et, à Paris, le préfet de police (...) ". Par ailleurs, l'article 11 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements dispose que " Le préfet de département est compétent en matière d'entrée et de séjour des étrangers ainsi qu'en matière de droit d'asile. / En matière d'asile, un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de l'asile peut donner compétence à un préfet de département et, à Paris, au préfet de police pour exercer ces missions dans plusieurs départements ". Enfin, l'article 1er de l'arrêté du 2 octobre 2018 du ministre de l'intérieur, également chargé de l'asile, dispose que " Par dérogation aux dispositions de l'arrêté du 20 octobre 2015 susvisé, le préfet du département de Maine-et-Loire est l'autorité administrative compétente pour procéder, en application de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la détermination de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile s'agissant des demandes d'asile enregistrées par le préfet du département de la Loire-Atlantique ou par le préfet du département de Maine-et-Loire, et s'agissant des demandes d'asile enregistrées par un autre préfet de département concernant des demandeurs domiciliés dans un département de la région Pays de la Loire ". Enfin, selon l'article 3 du même arrêté : " Les dispositions du présent arrêté sont applicables aux demandes d'asile enregistrées : 1° A compter du 1er octobre 2018 par le préfet de Maine-et-Loire ou par le préfet d'un autre département concernant les demandeurs domiciliés dans le département de Maine-et-Loire ou de la Sarthe (...) ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'à la date du 9 avril 2019 à laquelle a été prise la décision de transfert de Mme C... auprès des autorités espagnoles, étaient applicables les dispositions de l'arrêté du 2 octobre 2018 du ministre de l'intérieur, également chargé de l'asile, qui confèrent au préfet de Maine-et-Loire compétence pour procéder, en application de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la détermination de l'Etat responsable de l'examen des demandes d'asile enregistrées par le préfet de la Loire-Atlantique ou par le préfet de Maine-et-Loire, et des demandes d'asile enregistrées par un autre préfet de département concernant des demandeurs domiciliés dans un des départements de la région Pays de la Loire. Si l'arrêté du 2 octobre 2018 a été adopté en vertu du dernier alinéa de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, supprimé par le décret n° 2019-38 du 23 janvier 2019, les dispositions de cet alinéa ont été transférées au sein de l'article 11-1 du décret du 29 avril 2004 précité auquel renvoie la nouvelle rédaction de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 2 octobre 2018 serait dépourvu de base légale. Le moyen tiré de l'incompétence du préfet de Maine-et-Loire pour prononcer le transfert de Mme C... auprès des autorités espagnoles doit donc être écarté.
5. En deuxième lieu, l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. / Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l'intéressé n'est pas assisté d'un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend. (...) ".
6. En application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à- dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.
7. La décision litigieuse de transfert de Mme C... auprès des autorités espagnoles vise notamment le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier son article L. 742-3. La décision de transfert qui, après avoir, ainsi qu'il a été dit, visé le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, a relevé que Mme C... a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de Maine-et-Loire le 4 février 2019, et que les recherches entreprises sur le fichier Eurodac ont fait apparaître que l'intéressée avait franchi irrégulièrement les frontières espagnoles moins de douze mois avant le dépôt de sa première demande d'asile, doit être regardée comme suffisamment motivée, une telle motivation faisant apparaître qu'il est fait application du paragraphe 1 de l'article 13 du règlement. La décision comporte ainsi un exposé détaillé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de Maine-et-Loire s'est fondé pour considérer l'Espagne comme responsable de l'examen de la demande d'asile de Mme C... et décider son transfert auprès des autorités de ce pays. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision ne satisferait pas à l'exigence légale de motivation doit être écarté.
8. En troisième lieu, l'arrêté de transfert mentionne également des éléments relatifs à la situation familiale et médicale de Mme C... et fait donc apparaitre que le préfet a écarté, après avoir examiné les éléments portés à sa connaissance, le risque que cet arrêté porte une atteinte disproportionnée au respect du droit de l'intéressée à une vie privée et familiale tel que reconnu par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou une atteinte grave au droit d'asile. Il s'est également assuré que les éléments de fait et de droit caractérisant sa situation ne relevaient pas des dérogations prévues par les dispositions du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 et de l'article 17 de ce même règlement. Il résulte ainsi tant de ces éléments que de ceux évoqués au point précédent que le préfet n'a pas entaché ses arrêtés d'un défaut d'examen de la situation personnelle de Mme C....
9. En quatrième lieu, il ne résulte ni des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit, relatives aux seuls cas de délivrance de plein droit de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ni des dispositions des articles L. 511-4 et R. 511-1 du même code, relatives aux seules obligations de quitter le territoire français, ni d'aucune autre disposition législative ou règlementaire, que l'autorité administrative serait tenue, avant de prononcer, dans les conditions prévues à l'article L. 742-3 du même code, le transfert d'un demandeur d'asile invoquant des problèmes de santé, de saisir préalablement le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Le moyen tiré de ce que le préfet de Maine-et-Loire aurait omis à tort de saisir ce collège de médecins de l'OFII ne peut, dès lors, qu'être écarté.
10. En cinquième lieu, l'article 22 du règlement (UE) n° 604/2013 dispose que : " (...) 7. L'absence de réponse à l'expiration du délai de deux mois mentionné au paragraphe 1 et du délai d'un mois prévu au paragraphe 6 équivaut à l'acceptation de la requête et entraîne l'obligation de prendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée ".
11. Par ailleurs, les articles 20 et suivants du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride fixent les règles selon lesquelles sont organisées les procédures de prise en charge ou de reprise en charge d'un demandeur d'asile par l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile. Ces articles déterminent notamment les conditions dans lesquelles l'Etat sur le territoire duquel se trouve le demandeur d'asile requiert de l'Etat qu'il estime responsable de l'examen de la demande de prendre ou de reprendre en charge le demandeur d'asile.
12. Dans ce cadre, le paragraphe 1 de l'article 26 du règlement précise : " Lorsque l'État membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), l'État membre requérant notifie à la personne concernée la décision de le transférer vers l'État membre responsable et, le cas échéant, la décision de ne pas examiner sa demande de protection internationale ". Le paragraphe 1 de l'article 27 du règlement prévoit, pour sa part, que le demandeur " dispose d'un droit de recours effectif, sous la forme d'un recours contre la décision de transfert ou d'une révision, en fait et en droit, de cette décision devant une juridiction ".
13. Pour pouvoir procéder au transfert d'un demandeur d'asile vers un autre Etat membre en mettant en oeuvre ces dispositions du règlement, et en l'absence de dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile organisant une procédure différente, l'autorité administrative doit obtenir l'accord de l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile avant de pouvoir prendre une décision de transfert du demandeur d'asile vers cet Etat. Une telle décision de transfert ne peut donc être prise, et a fortiori être notifiée à l'intéressé, qu'après l'acceptation de la prise en charge par l'Etat requis. Le juge administratif, statuant sur des conclusions dirigées contre la décision de transfert et saisi d'un moyen en ce sens, prononce l'annulation de la décision de transfert si elle a été prise sans qu'ait été obtenue, au préalable, l'acceptation par l'Etat requis de la prise ou de la reprise en charge de l'intéressé.
14. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire a adressé une demande de prise en charge de Mme C... aux autorités espagnoles le 5 février 2019, à laquelle était jointe un formulaire-type comportant les informations utiles, cette demande comme l'accusé de réception de l'application " Dublinet " comportant le nom de l'intéressée. En application des dispositions du paragraphe 7 de l'article 22 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, en l'absence de réponse des autorités espagnoles à l'expiration d'un délai de deux mois, cette demande a fait naître un accord implicite de prise en charge de Mme C... le 5 avril 2019. Dès lors que cet accord implicite était antérieur à l'arrêté en litige, celui-ci n'est pas intervenu en méconnaissance des règles rappelées aux points 11 et 12 du présent arrêt, sans qu'ait d'incidence la circonstance que les autorités espagnoles n'ont pas confirmé cet accord implicite ou que le préfet a rappelé à ces autorités leur accord implicite par message du 8 avril suivant.
15. En sixième lieu, l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2014 du 26 juin 2013 dispose que " 1. Lorsque l'État membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), l'État membre requérant notifie à la personne concernée la décision de le transférer vers l'État membre responsable et, le cas échéant, la décision de ne pas examiner sa demande de protection internationale. Si la personne concernée est représentée par un conseil juridique ou un autre conseiller, les États membres peuvent choisir de notifier la décision à ce conseil juridique ou à cet autre conseiller plutôt qu'à la personne concernée et, le cas échéant, de communiquer la décision à la personne concernée (...) ".
16. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus au point 13 du présent arrêté, les autorités espagnoles ont implicitement accepté, le 5 avril 2019, de prendre en charge Mme C.... Il suit de là que cette dernière n'est pas fondée à soutenir que la décision de transfert auprès des autorités espagnoles aurait été prise de manière prématurée avant l'accord de cette dernière en méconnaissance des dispositions de l'article 26 du règlement (UE) du 26 juin 2013. Elle ne peut, en outre, se prévaloir de la méconnaissance de l'instruction du 19 juillet 2016 relative à l'application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dès lors que ce document est dépourvu de valeur réglementaire.
17. En septième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " " Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 (...) ". Aux termes de l'article 5 du même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...) ".
18. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle il décide la réadmission de l'intéressé dans l'Etat membre responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
19. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... s'est vu remettre, le 4 février 2019, le jour même de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, et à l'occasion de l'entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées, en langue française. Si l'intéressée soutient qu'il ne ressort d'aucun document qu'elle aurait déclaré comprendre le français, il ressort du résumé de l'entretien du 4 février 2019, qu'elle a signé, que l'entretien s'est déroulé en langue française sans que Mme C... ne conteste. L'intéressée soutient qu'elle a reçu tardivement, lors de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, l'information prévue par l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 alors qu'elle aurait dû lui être délivrée le 18 janvier 2019 lorsqu'elle s'est présentée à la plate-forme d'accueil des demandeurs d'asile. Toutefois, alors que l'information requise a été donnée avant la décision par laquelle le préfet a décidé la réadmission de l'intéressée dans l'Etat membre responsable de sa demande d'asile, la requérante ne peut soutenir qu'elle n'a pas bénéficié d'une information complète sur ses droits en temps utile. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) du 26 juin 2013 doit être écarté.
20. En huitième lieu, Mme C... n'apporte, à l'appui de son moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, aucune précision de nature à en apprécier le bien-fondé. Ce moyen doit donc être écarté.
21. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Par ailleurs, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) 2. L'État membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'État membre responsable, ou l'État membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre État membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre État membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit. ". Il résulte de ces dispositions que si une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et qu'en principe cet Etat est déterminé par application des critères d'examen des demandes d'asile fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application de ces critères est toutefois écartée en cas de mise en oeuvre de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre. Cette faculté laissée à chaque Etat membre est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.
22. Si l'Espagne est un Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient néanmoins à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités de ce pays répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile.
23. Contrairement à ce que soutient Mme C..., il ressort de la motivation même de l'arrêté portant transfert auprès des autorités espagnoles que le préfet de Maine-et-Loire a effectivement examiné la possibilité pour la France d'instruire sa demande d'asile. D'autre part, Mme C... ne peut utilement invoquer les risques qu'elle encourrait en Guinée dès lors que la décision n'a pas pour objet de la renvoyer vers son pays d'origine. En outre en produisant des documents à caractère général émanant d'organisations non gouvernementales ou de journalistes, elle n'établit pas que les conditions de sa prise en charge et d'examen de sa demande d'asile en Espagne ne présenteraient pas les garanties exigées par le respect du droit d'asile. Ainsi, le moyen tiré de ce que le transfert de l'intéressée en Espagne méconnaîtrait l'article 3.2 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.
24. Par ailleurs, si Mme C... justifie de douleurs à la jambe et d'un suivi psychologique en France, elle ne peut être regardée comme se trouvant dans une situation de vulnérabilité exceptionnelle justifiant que sa demande d'asile soit examinée en France et le moyen tenant à ce qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
25. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté contesté : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (...) ". Il résulte de ces dispositions que le préfet peut prendre une mesure d'assignation à résidence à l'encontre d'un étranger qui fait l'objet d'une décision de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et qui présente des garanties propres à prévenir le risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement.
26. En premier lieu, il résulte des points 4 à 23 du présent arrêt que Mme C... n'est pas fondée à se prévaloir, à l'encontre de la décision prononçant son assignation à résidence, de l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités espagnoles.
27. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 13 et 14 du présent arrêt, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision d'assignation serait entachée d'erreur de droit en l'absence d'accord implicite des autorités espagnoles pour sa prise en charge.
28. En troisième lieu, l'arrêté portant assignation à résidence de Mme C... vise, notamment, les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment son 1° bis. Il comporte également les considérations de fait et les autres considérations de droit qui le fondent. Mme C... n'est donc pas fondée à soutenir que cet arrêté serait insuffisamment motivé.
29. En dernier lieu, Mme C..., qui se borne à une simple affirmation sur ce point, n'établit pas que l'exécution de la décision de remise aux autorités espagnoles ne demeurerait pas une perspective raisonnable ni qu'elle pourrait quitter immédiatement le territoire français.
30. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de la Loire-Atlantique du 9 avril 2019. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président-assesseur,
- Mme D..., première conseillère.
Lu en audience publique le 25 octobre 2019.
La rapporteure,
M. D...Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°19NT02055