Procédure devant la cour :
I. Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 17NT00311 le 25 janvier 2017, le 21 septembre 2017 et le 19 juin 2018, la Société maintenance industrielle et production électronique (MIPE) et la SCI Tulipe, représentées par Me J...B...), demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 novembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 8 décembre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- le jugement est insuffisamment motivé, faute d'exposer avec clarté les motifs de rejet des moyens, en particulier en ce qui concerne le respect des seuils financiers fixés aux articles L. 515-16 IV et R. 515-42 du code de l'environnement ; il repose sur des appréciations scientifiques pour lesquelles il n'est pas compétent ;
- le jugement est entaché de contradictions en ce qui concerne la consultation de l'autorité de sureté nucléaire, la procédure de concertation, la liste des éléments devant figurer dans le dossier soumis à enquête, l'insuffisance du résumé non technique, l'insuffisance des documents graphiques ;
- le jugement n'a pas répondu au moyen tiré de 1'absence de toute indication, dans l'arrêté prescrivant le PPRT, des modalités de publicité et de mise en oeuvre de la concertation, ni au moyen tiré de l'insuffisance du résumé non technique ;
- l'autorité de sureté nucléaire n'a pas été associée à l'élaboration du PPRT en violation de l'article L. 515-22 du code de l'environnement alors que l'activité de la société MIPE implique la manipulation de sources radioactives ; plusieurs entreprises riveraines de la société Isochem n'ont pas été désignées parmi les personnes et organismes associés à l'élaboration du PPRT, alors qu'elles sont directement concernées ;
- l'arrêté du 16 juin 2011 portant prescription du PPRT n'a pas prévu les modalités de publicité de la procédure de concertation contrairement à ce que prévoit l'article R. 515-40 II du code de l'environnement, ce qui a nui à l'information du public, qui était peu présent à la réunion de concertation ; les modalités de la concertation étaient insuffisantes pour respecter le principe de participation du public ; aucune publicité n'a été donnée à la réunion publique d'information ; les personnes intéressées n'ont pas reçu les informations et documents fondant les prescriptions du plan, notamment les estimations de France domaine, les études de vulnérabilité ; les observations émises par les personnes concernées par l'élaboration du PPRT n'ont pas été prises en compte par les services instructeurs ; la procédure de concertation a été ainsi irrégulière ;
- les conclusions du commissaire enquêteur sont insuffisamment motivées, contradictoires et dépourvues d'avis personnel ; celui-ci ne répond pas à de nombreuses observations faites durant l'enquête ; ses réserves ne sont pas cohérentes avec la motivation des conclusions ;
- le dossier soumis à enquête était insuffisant ; ainsi la note de présentation a décrit insuffisamment les phénomènes dangereux, n'a pas exposé les différents partis envisagés, notamment le déménagement de la société Isochem et n'a pas permis d'apprécier la pertinence des prescriptions du règlement du plan ; les documents graphiques sont trop petits, illisibles, ne font pas apparaître les noms des entreprises implantées dans le périmètre, ni le détail des bâtiments de la société Isochem ; le règlement est insuffisamment précis s'agissant des mesures d'alerte et du plan de protection des personnes et ne prévoit pas d'échéancier de mise en oeuvre ; le résumé non technique se borne à des rappels généraux sans information sur la procédure, sans plan et comportant des tableaux de synthèse dépourvus d'explication ; l'absence des estimations des bâtiments existants réalisées par France Domaine, des études de vulnérabilité de ces bâtiments, de l'étude de déménagement de la société Isochem, de certaines pièces de l'étude de danger a été préjudiciable à l'information du public ; le cumul de ces insuffisances affecte nécessairement la régularité du PPRT ;
- l'arrêté du 8 décembre 2014 est insuffisamment motivé ;
- il n'est pas justifié que le PPRT respecte les seuils financiers prévus à l'article L. 515-16 IV et à l'article R. 515-42 du code de l'environnement, notamment la condition que le montant des travaux n'excède pas 5 % du chiffre d'affaires de la société propriétaire du bien ; il n'est pas démontré que les propriétaires puissent assumer la mise en oeuvre des prescriptions ; la société MIPE a évalué le coût de son déménagement à 835 000 euros ;
- le PPRT n'a pas pris en compte l'activité de la société MIPE qui implique la manipulation de sources radioactives ; le plan ne permet pas de prévenir les risques dus à un incident entrainant par effet domino, une contamination par les matières radioactives, et alors que l'ASN n'a pas été consultée ; aucune mesure de délaissement n'a été prévue ; il n'est pas justifié que les mesures prescrites par le règlement du PPRT sont nécessaires et proportionnées à la sauvegarde de la sécurité des personnes alors que le plan ne permet pas de préserver l'activité économique des entreprises du site ; aucune mesure complémentaire ni supplémentaire prévue à l'article L. 515-16 V n'est imposée à la société Isochem ; le préfet n'a prévu aucune mesure de délaissement ; il n'a pas envisagé le déplacement de la société Isochem ; le plan ne tient pas compte de la spécificité du site composé uniquement d'entreprises industrielles et commerciales, ce qui aurait justifié que soient imposées des mesures organisationnelles garantissant la sécurité des personnes ; l'article L. 515-26-2 du code de l'environnement issu de l'ordonnance n° 2015-1324 du 22 octobre 2015 précise que la réalisation de travaux ne peut être imposée qu'aux seuls logements ; le PPRT est ainsi entaché d'erreurs d'appréciation ;
- le préfet n'a pas anticipé les conséquences de l'entrée en vigueur de la directive du 4 juillet 2012 dite Seveso 3, commettant une erreur manifeste d'appréciation.
Par des mémoires enregistrés le 1er septembre 2017 et le 14 mai 2018, la société PMC Isochem venant aux droits de la société Isochem, représenté par la SELARL ATMOS, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des sociétés MIPE et Tulipe une somme de 2000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle renvoie au mémoire en défense produit par le préfet devant le tribunal ;
- pour les PPRT déjà approuvés, les prescriptions de travaux de protection ne s'appliquent qu'aux logements, et ce en vertu des dispositions issues de l'ordonnance n° 2015-1324 du 22 octobre 2015, qui revêtent un caractère rétroactif consacré par 1'article 6 II de 1'ordonnance du 22 octobre 2015 ;
- les autres moyens soulevés par les sociétés MIPE et Tulipe ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2018, le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré de l'absence, dans l'arrêté du 16 juin 2011 prescrivant l'élaboration du PPRT, des modalités de publicité et de concertation est inopérant et dès lors les premiers juges n'étaient pas tenus d'y répondre ;
- Les travaux de protection, imposés au titre du IV de l'article L. 515-16 du code de l'environnement dans sa rédaction à la date de l'arrêté en litige, ont perdu leur objet, par l'effet du II de l'article 6 de l'ordonnance du 22 octobre 2015, dès lors qu'ils ne concernent aucun immeuble à usage d'habitation.
- les autres moyens soulevés par les sociétés MIPE et Tulipe ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
II. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 17NT00385 le 30 janvier 2017 et le 22 septembre 2017, la société Caoutchouc et plastique pour industrie et bâtiment (CPIB), et la société Hursin et fils, représentés par Me D...(M...A...avocatsB...), demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 novembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 8 décembre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- les membres de la commission de suivi du site n'ont pas été informés de la tenue d'une réunion publique le 3 juin 2014 ; l'information du public sur cette réunion a été insuffisante, de sorte que seulement 11 personnes se sont déplacées ; les comptes-rendus des réunions d'information n'ont pas retranscrit de manière exhaustive les échanges ; le public n'a pas reçu tous les documents nécessaires à son information ; ainsi l'étude relative à la délocalisation du site d'Isochem n'a été communiquée que durant l'enquête publique, tandis que l'étude de vulnérabilité d'Ineris n'a pas été mise à la disposition du public ; ainsi la procédure de concertation s'est déroulée de manière irrégulière ;
- le dossier soumis à enquête était insuffisant ; ainsi le résumé non technique est inintelligible ; la note de présentation n'a pas exposé les alternatives existantes, notamment le déménagement de la société Isochem, ou la mise en place de mesures d'organisation ; les études de vulnérabilité des bâtiments et l'étude de déménagement de la société Isochem étaient absentes du dossier soumis à enquête, de même que le résumé non technique relatif aux accidents potentiels et la cartographie des zones de risque significatifs, ce qui a été préjudiciable à l'information du public ; le commissaire enquêteur a relevé les documents graphiques trop petits, illisibles, ne faisant pas apparaître le détail des bâtiments de la société Isochem ; il a relevé la rétention de certaines informations, notamment sur l'étude du déménagement d'Isochem ;
- le préfet a demandé au commissaire enquêteur de ne pas prolonger l'enquête publique ; le préfet a convoqué le commissaire enquêteur à un entretien, en-dehors du cadre de l'enquête, tentant ainsi d'influer sur la procédure d'enquête ;
- le rapport du commissaire enquêteur ne répond pas de manière motivée aux observations des entreprises riveraines ; le contenu de la conversation avec le sous-préfet n'y est pas mentionné ; les conclusions du commissaire enquêteur sont insuffisamment motivées, contradictoires et dépourvues d'avis personnel ;
- l'administration a constamment refusé de rechercher des mesures de réduction du risque à la source, en application de l'article L. 515-16 du code de l'environnement ;
- le plan de zonage adopté impose de lourdes obligations aux entreprises riveraines, sans réalisation préalable d'une étude économique globale ; aucune analyse sérieuse du coût du déménagement de la société Isochem n'a été réalisée ; l'évaluation du coût de ce déménagement à hauteur de 40 millions d'euros apparaît exagérée ; les mesures de protection ne sont pas justifiées par un diagnostic détaillé des bâtiments ; la situation financière d'Isochem n'a pas été prise en compte ;
- le PPRT méconnaît le principe de pollueur-payeur consacré par l'article L. 110-1 du code de l'environnement dès lors que le coût des risques causés par l'activité d'Isochem sont pris en charge non par l'exploitant mais par les entreprises riveraines ;
- le PPRT ne prend pas en compte la situation particulière du bassin économique et industriel de Pithiviers ; le plan se borne à imposer aux entreprises des travaux sur le bâti, tels que la mise en place d'un local de confinement, au lieu de mesures d'organisation plus adaptées ; la réalisation de travaux sur les constructions, autres que les logements, n'est pas une nécessité, ainsi que le législateur l'a reconnu dans en l'ordonnance n°2015-1324 du 22 octobre 2015 ; les mesures imposées par le règlement freinent le développement des entreprises.
Par des mémoires enregistrés le 1er septembre 2017 et le 14 mai 2018, la société PMC Isochem venant aux droits de la société Isochem, représenté par la SELARL ATMOS, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des sociétés CPIB et Hursin et fils une somme de 2000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle renvoie au mémoire en défense produit par le préfet devant le tribunal ;
- pour les PPRT déjà approuvés les prescriptions de travaux de protection ne s'appliquent qu'aux logements, et ce en vertu des dispositions issues de l'ordonnance n° 2015-1324 du 22 octobre 2015, qui revêtent un caractère rétroactif consacré par 1'article 6 II de 1'ordonnance du 22 octobre 2015 ;
- les autres moyens soulevés par les sociétés CPIB et Hursis et fils ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2018, le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requête, qui se borne à reprendre à l'identique les moyens de première instance sans critiquer le jugement attaqué, est irrecevable ;
- il renvoie au mémoire en défense produit par le préfet en première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
III. Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 17NT00451 le 2 février 2017, le 29 août 2017, le 25 septembre 2017 et le 17 mai 2018, la société SAS CV Beauvallet fils, représentée par la SELARL Casadei Jung, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 novembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 8 décembre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté du 16 juin 2011 portant prescription du PPRT n'a pas indiqué les objectifs poursuivis par l'autorité compétence comme le prévoit l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme ; une seule information a été donnée au public lors de la concertation et le public n'a pas été informé de manière suffisante de l'organisation de la réunion du 3 juin 2014 ; les modalités de la concertation n'ont pas été respectées ; la durée de la concertation a été trop courte, sur un mois, et n'a pas permis un accès véritable du public à l'information ; il n'est pas établi que l'arrêté prescrivant l'élaboration du PPRT du 16 juin 2011 et les deux arrêtés prorogeant les délais ont fait l'objet d'un affichage, de sorte que leur caractère exécutoire n'est pas avéré ;
- le PPRT a été approuvé après expiration du délai de 18 mois prévu par l'article R. 515-40 du code de l'environnement à compter de l'arrêté qui prescrit ce PPRT ; une seule prorogation était possible ;
- le préfet a demandé au commissaire enquêteur de ne pas prolonger l'enquête publique ; le préfet a convoqué le commissaire enquêteur à un entretien, en-dehors du cadre de l'enquête, tentant ainsi d'influer sur la procédure d'enquête ; le préfet ne pouvait ainsi donner des directives ; le dossier soumis à enquête était insuffisant ; les rapports de l'INERIS et du CETE n'y étaient pas joints, de même que les avis de France domaine ; en présence de ce dossier incomplet, le commissaire enquêteur aurait dû faire compléter le dossier et prolonger l'enquête ; l'enquête publique est ainsi entachée d'irrégularités ;
- la note de présentation est incomplète et insuffisante en ce qui concerne les conditions de prévention sur le site ; elle ne précise pas la population exposée, le nombre d'emplois ou les caractéristiques des établissements recevant du public ; elle n'évoque pas les impacts socio-économiques, les conditions de mise en oeuvre des mesures édictées par le plan ; elle n'a pas permis d'apprécier la pertinence des prescriptions du règlement du plan ;
- l'administration n'a pas suffisamment recherché les mesures de réduction du risque à la source, en application de l'article L. 515-16 du code de l'environnement et alors que l'exploitant connaît des difficultés financières ; la note de présentation et l'étude de dangers sont très insuffisantes sur ce point ;
- les mesures réglementaires imposées, notamment le local de confinement, ne sont pas pertinentes compte tenu des difficultés de dimensionner ces locaux pour les activités de négoce et des conséquences défavorables en matière d'effectifs ; ces mesures empêchent les entreprises de se développer ; le tribunal ne s'est pas réellement prononcé sur ce point ; rien ne justifie l'absence de mesure de délaissement ; le PPRT est ainsi entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Par des mémoires enregistrés le 1er septembre 2017 et le 14 mai 2018, la société PMC Isochem venant aux droits de la société Isochem, représenté par la SELARL ATMOS, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SAS CV Beauvallet fils une somme de 2000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle renvoie au mémoire en défense produit par le préfet devant le tribunal ;
- pour les PPRT déjà approuvés les prescriptions de travaux de protection ne s'appliquent qu'aux logements, et ce en vertu des dispositions issues de l'ordonnance n° 2015-1324 du 22 octobre 2015, qui revêtent un caractère rétroactif consacré par 1'article 6 II de 1'ordonnance du 22 octobre 2015 ;
- les autres moyens soulevés par la SAS CV Beauvallet fils ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2018, le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requête, qui se borne à reprendre à l'identique les moyens de première instance sans critiquer le jugement attaqué, est irrecevable ;
- il renvoie au mémoire en défense produit par le préfet en première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2012/18/UE du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses, modifiant puis abrogeant la directive 96/82/ CE du Conseil ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n°2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages ;
- l'arrêté du 29 septembre 2005 relatif à l'évaluation et à la prise en compte de la probabilité d'occurrence, de la cinétique, de l'intensité des effets et de la gravité des conséquences des accidents potentiels dans les études de dangers des installations classées soumises à autorisation, notamment son article 4 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Degommier,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,
- et les observations de Me G...substituant MeE..., représentant la société Maintenance industrielle et production électronique (MIPE) et la SCI Tulipe, de Me F...substituant MeD..., représentant la société Caoutchouc et plastique pour industrie et bâtiment (CPIB), la société Hursin et fils, de MeH..., représentant la SAS CV Beauvallet fils et de MeC..., représentant la société PMC Isochem et autres.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté en date du 8 décembre 2014, le préfet du Loiret a approuvé le plan de prévention des risques technologiques (PPRT) lié aux installations exploitées par la société Isochem, sur le territoire de la commune de Pithiviers. La société Maintenance industrielle et production électronique (MIPE), la SCI Tulipe, la société Caoutchouc et plastique pour industrie et bâtiment (CPIB), la société Hursin et fils et la SAS CV Beauvallet fils interjettent appel du jugement du 29 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la jonction :
2. Les requêtes n° 17NT00311 de la société Maintenance industrielle et production électronique (MIPE) et de la SCI Tulipe, n° 17NT00351 de la société Caoutchouc et plastique pour industrie et bâtiment (CPIB) et de la société Hursin et fils et n° 17NT00451 de la SAS CV Beauvallet sont dirigées contre le même jugement et le même arrêté préfectoral et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la transition écologique et solidaire ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. D'une part, contrairement à ce que soutiennent la société MIPE et la SCI Tulipe, le jugement attaqué a répondu à leur moyen tiré de l'absence d'indication, dans l'arrêté du 16 juin 2011 portant prescription du plan de prévention des risques technologiques, des modalités de publicité et de mise en oeuvre de la concertation, notamment dans son point n° 15. Il a par ailleurs répondu à leur moyen tiré du caractère insuffisant du résumé non technique, notamment au point n° 27. Ce jugement n'est dès lors pas entaché de défaut de réponse à des moyens.
4. D'autre part, en réponse au moyen tiré de l'absence d'association de l'autorité de sureté nucléaire, les premiers juges ont indiqué de manière motivée qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que le risque allégué se situerait à un niveau tel que cette autorité aurait dû être consultée. Cette réponse n'est entachée d'aucune contradiction. Par ailleurs, les premiers juges se sont prononcés tant sur la durée de la concertation que sur son caractère suffisant, relevant notamment que l'absence de transmission de l'étude sur le déménagement de la société Isochem constituait un vice de la concertation, qui n'avait toutefois pas été de nature à nuire effectivement à une bonne information de la population. Ils n'ont, ce faisant, pas entaché leur jugement de contradiction. Ils ont également suffisamment répondu au moyen tiré de l'insuffisance du résumé non technique, en relevant, sans aucune contradiction, que ce résumé, bien que non exigé par les dispositions de l'article R. 515-41 du code de l'environnement, était néanmoins rédigé en termes clairs et adaptés pour un public non spécialisé. Ils ont de même répondu au moyen tiré de l'insuffisance des documents graphiques, sans contradiction, en relevant que ces documents, en dépit de leur manque de clarté, n'ont pas empêché les personnes intéressées de comprendre les modalités et les enjeux du PPRT.
5. Enfin, le jugement attaqué a répondu de manière suffisamment motivée aux moyens invoqués devant lui, en particulier, dans ses points 48 à 51, au moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 515-16, IV et R. 515-42 du code de l'environnement, et dans ses points n° 50 et 53 et suivants, au moyen tiré du manque de pertinence des travaux imposés au regard de l'activité des entreprises et de leurs contraintes.
6. Il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué n'est pas entaché des irrégularités alléguées.
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 8 décembre 2014 approuvant le plan de prévention des risques technologiques lié aux installations de la société Isochem :
En ce qui concerne la prescription de l'élaboration du PPRT :
7. L'article R. 515-40 du code de l'environnement prévoit que " I.-L'élaboration d'un plan de prévention des risques technologiques est prescrite par un arrêté du préfet (...) ". Aux termes de l'article R. 515-46 du code de l'environnement : " Un exemplaire des arrêtés prévus aux articles R. 515-40 et R. 515-44 est adressé aux personnes et organismes associés. Chaque arrêté est affiché pendant un mois dans les mairies des communes et au siège des établissements publics de coopération intercommunale concernés en tout ou partie par le plan de prévention des risques technologiques. Mention de cet affichage est insérée, par les soins du préfet, dans un journal diffusé dans le département ou les départements intéressés. / Ces arrêtés sont, en outre, publiés au recueil des actes administratifs de l'Etat de chaque département. (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier, notamment des attestations signées du maire de la commune de Pithiviers, en date des 1er août 2011, 15 janvier et 12 août 2013, qui font foi jusqu'à preuve contraire, que l'arrêté du 16 juin 2011 prescrivant l'élaboration du PPRT et les arrêtés du 30 novembre 2012 et du 1er juillet 2013 portant prorogation du délai d'approbation du PPRT ont bien été affichés en mairie de Pithiviers, siège de l'EPCI " Le Coeur du Pithiverais ". Il ressort des pièces produites par le préfet que ces arrêtés ont été publiés au recueil des actes administratifs de la préfecture et fait l'objet d'annonces dans le journal " la République du Centre ", de sorte qu'ils étaient exécutoires. Ce moyen doit, par suite, être écarté.
En ce qui concerne le délai d'approbation du PPRT :
9. Aux termes de l'article R. 515-40 du code de l'environnement : "IV.-Le plan de prévention des risques technologiques doit être approuvé dans les dix-huit mois qui suivent l'intervention de l'arrêté prescrivant son élaboration. Si les circonstances l'exigent, notamment pour prendre en compte la complexité du plan ou l'ampleur et la durée des consultations, le préfet peut, par arrêté motivé, fixer un nouveau délai". Par arrêtés du 30 novembre 2012 et du 1er juillet 2013, le délai d'approbation du PPRT contesté a été reporté au 16 décembre 2013 puis au 16 décembre 2014. Les dispositions de l'article R. 515-40 du code de l'environnement ne faisaient pas obstacle à ce que le délai d'approbation fût, comme en l'espèce, reporté deux fois. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne les personnes associées à l'élaboration du PPRT :
10. Aux termes de l'article L. 515-22 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " Sont notamment associés à l'élaboration du plan de prévention des risques technologiques les exploitants des installations à l'origine du risque, les communes sur le territoire desquelles le plan doit s'appliquer, les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d'urbanisme et dont le périmètre d'intervention est couvert en tout ou partie par le plan ainsi que la commission de suivi de site créée en application de l'article L. 125-2-1. ". Aux termes de l'article R. 515-40 du même code : " I.-L'élaboration d'un plan de prévention des risques technologiques est prescrite par un arrêté du préfet qui détermine : (...) 4° La liste des personnes et organismes associés définie conformément aux dispositions de l'article L. 515-22, ainsi que les modalités de leur association à l'élaboration du projet ".
11. Par arrêté du 16 juin 2011, le préfet du Loiret a prescrit l'élaboration d'un plan de prévention des risques technologiques sur le territoire de la commune de Pithiviers. L'article 5 de cet arrêté a prévu que sont associés à l'élaboration du PPRT, outre la société Isochem, la commune de Pithiviers, la communauté de communes " le Coeur du Pithiverais", les sociétés 3M Santé, Orgapharm, les sociétés Mipe et Macaple, riveraines du site Isochem, ainsi que, en tant que de besoin, le conseil général et le service départemental d'incendie et de secours. L'autorité de sureté nucléaire ne figure pas au nombre des personnes et organismes devant être associés à l'élaboration du PPRT en application des dispositions précitées de l'article L. 515-22 du code de l'environnement. Ces mêmes dispositions n'imposaient pas davantage au préfet d'associer l'ensemble des entreprises riveraines de la société Isochem. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que quatre entreprises proches du site Isochem ont été associées à l'élaboration du plan, tandis qu'a été organisée une réunion, le 30 janvier 2014, ouverte à toutes les entreprises et propriétaires riverains, à laquelle neuf entreprises riveraines ont participé. Par ailleurs, les estimations de la valeur vénale des biens réalisées par France Domaines et les résultats des études de vulnérabilité des bâtis, informations concernant des biens propres et revêtant un caractère personnel, ont été communiquées à leur seul propriétaire à 1'occasion des entretiens individuels organisés le 5 février 2013 et par courrier du 18 juin 2013. Dans ces conditions, les dispositions relatives aux personnes et organismes associés n'ont pas été méconnues.
En ce qui concerne la procédure de concertation :
12. L'article L. 515-22 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable, dispose que " Le préfet définit les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques technologiques dans les conditions prévues à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme.". Aux termes de l'article R. 515-40 du même code : " II.-L'arrêté fixe également les modalités de la concertation avec les habitants, les associations locales et les autres personnes intéressées. (...) Le bilan de la concertation est communiqué aux personnes associées et rendu public dans des conditions que l'arrêté détermine ". Aux termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Font l'objet d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées : / 1° L'élaboration ou la révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme ; / 2° La création d'une zone d'aménagement concerté ; / 3° Les opérations d'aménagement ayant pour effet de modifier de façon substantielle le cadre de vie ou l'activité économique, dont la liste est arrêtée par décret en Conseil d'Etat. / II. - Les objectifs poursuivis et les modalités de la concertation sont fixés par : / 1° Le préfet lorsque la révision du document d'urbanisme ou l'opération sont à l'initiative de l'Etat (...). Ces modalités doivent, pendant une durée suffisante au regard de l'importance du projet, permettre au public d'accéder aux informations relatives au projet et aux avis requis par les dispositions législatives ou réglementaires applicables et de formuler des observations et propositions qui sont enregistrées et conservées par l'autorité compétente. (...) / III. - A l'issue de la concertation, l'autorité mentionnée au II en arrête le bilan. / Lorsque le projet fait l'objet d'une enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement, le bilan de la concertation est joint au dossier de l'enquête. / IV. - Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux I et II ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la décision ou la délibération prévue au II ont été respectées. (...) ".
13. Il résulte de ces dispositions que l'article L. 515-22 du code de l'environnement renvoie, pour déterminer les modalités de la concertation relative à l'élaboration des projets de plan de prévention des risques technologiques, à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme dans son ensemble, y compris le IV de cet article, devenu l'article L. 600-11 du même code. Il suit de là que l'auteur d'un recours tendant à l'annulation de la décision préfectorale approuvant un plan de prévention des risques technologiques peut utilement invoquer l'irrégularité de procédure résultant de la méconnaissance des modalités de concertation définies le préfet, mais ne peut utilement exciper de l'illégalité de la décision par laquelle le préfet a fixé ces modalités.
14. L'article 4 de l'arrêté du 16 juin 2011 prescrivant l'élaboration du PPRT a prévu la mise à disposition du public, en mairie de Pithiviers, des documents d'élaboration validés du projet de plan, ces documents étant consultables pendant un mois et accessibles sur le site internet de la préfecture du Loiret. L'arrêté prévoit en outre la mise en place d'un registre en mairie de Pithiviers pour recueillir les observations du public, la possibilité pour le public d'exprimer ses observations par courrier électronique sur le site internet de la préfecture, la possibilité de tenir une réunion publique d'information, le maire de Pithiviers devant en aviser le public quinze jours au moins avant la date de la réunion publique par voie d'affichage. Le préfet a également prévu la communication du bilan de la concertation aux personnes et organismes associés et sa mise à disposition du public en mairie de Pithiviers, à la préfecture du Loiret, et sur le site internet précité, jusqu'à l'approbation du projet de PPRT et durant les délais réglementaires de recours. Les modalités de publicité de cette procédure de concertation ont été ainsi prévues, contrairement à ce qui est soutenu, notamment par la voie du site internet et par affichage. En revanche, les dispositions précitées de l'article L. 515-22 du code de l'environnement ne faisaient pas obligation au préfet de préciser, dans son arrêté prescrivant l'élaboration du PPRT, les objectifs poursuivis.
15. Il ressort des pièces du dossier, notamment du bilan de la concertation, qu'une réunion d'information des riverains a eu lieu le 30 janvier 2014, que la consultation du public s'est déroulée durant un mois, du 26 mai au 26 juin 2014, période durant laquelle l'entier dossier de PPRT, comprenant le résumé non technique, la note de présentation, le règlement, le plan de zonage réglementaire, a été mis à la disposition du public dans les locaux de la mairie et sur le site internet et qu'une réunion d'information du public s'est tenue le 3 juin 2014. Cette dernière réunion a fait l'objet des mesures de publicité prévues, par voie d'affichage en mairie, par annonces dans la presse et sur le site internet de la préfecture. Compte tenu de ces mesures de publicité, il ne peut dès lors être valablement soutenu que les membres de la commission de suivi du site d'Isochem, qui étaient en outre tenus informés de l'avancement de l'élaboration du PPRT, n'auraient pas eu connaissance de la réunion du 3 juin 2014. En outre, l'étude sur le déménagement de la société d'Isochem du site de Pithiviers, déménagement envisagé en tant que mesure supplémentaire au sens du V de l'article L. 515-16 du code de l'environnement, a été réalisée par l'entreprise Isochem le 6 février 2013, mais n'a pas été produite pendant la phase de concertation, notamment lors de la réunion du public du 3 juin 2014, n'ayant été transmise que le 3 octobre par cette société, soit moins d'un mois avant la fin de l'enquête publique et après l'achèvement de la phase de concertation. Toutefois, il a été indiqué lors de la réunion du 3 juin 2014 que le coût de ce déménagement était très important et en tout état de cause très supérieur au coût de la seule mesure foncière d'expropriation prévue, chiffrée à 124 000 euros. Ainsi, le défaut de production de cette étude durant la phase de concertation n'a pas été de nature à nuire effectivement à une bonne information de la population. Par ailleurs, les résultats des études de vulnérabilité des bâtis, informations concernant des biens propres et revêtant un caractère personnel, ont été communiquées à leur seul propriétaire à 1'occasion des entretiens individuels organisés le 5 février 2013 et par courrier du 18 juin 2013.
16. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des courriers échangés entre l'équipe de projet du PPRT et plusieurs entreprises riveraines, que l'administration n'aurait pas tenu compte des observations des personnes concernées par l'élaboration du PPRT. S'il est soutenu que les comptes-rendus des réunions d'information n'auraient pas retranscrit de manière exhaustive les échanges avec le public, il ressort en tout état de cause des courriers produits que l'administration a accepté de compléter le compte-rendu de la réunion du 3 juin 2014, à la demande de la société CPIB. Les modalités de la concertation prévues par l'arrêté du 16 juin 2011 ayant été respectées, les sociétés requérantes ne peuvent utilement soutenir que ces modalités étaient insuffisantes.
En ce qui concerne le déroulement de l'enquête publique :
17. En premier lieu, en vertu de l'article L. 515-22 du code, de l'environnement, le projet de plan de prévention des risques technologiques est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier de ce code. Aux termes de l'article R. 515-41 du code de l'environnement, dans sa version applicable : " I. - Le plan de prévention des risques technologiques comprend : 1° Une note de présentation décrivant les installations ou stockages à l'origine des risques, la nature et l'intensité de ceux-ci et exposant les raisons qui ont conduit à délimiter le périmètre d'exposition aux risques. (...) 2° Des documents graphiques faisant apparaître le périmètre d'exposition aux risques et les zones et secteurs mentionnés respectivement aux articles L. 515-15 et L. 515-16 du présent code ; 3° Un règlement comportant, en tant que de besoin, pour chaque zone ou secteur : a) Les mesures d'interdiction et les prescriptions mentionnées au I de l'article L. 515-16 ; b) Les servitudes d'utilité publique instituées en application de l'article L. 515-8 et les servitudes instaurées par les articles L. 5111-1 à L. 5111-7 du code de la défense ; c) L'instauration du droit de délaissement ou du droit de préemption, de la mise en oeuvre de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; d) Les mesures de protection des populations prévues au IV de l'article L. 515-16 du présent code ; e) L'échéancier de mise en oeuvre des mesures prévues par le plan, conformément aux dispositions de l'article L. 515-18 ; 4° Les recommandations tendant à renforcer la protection des populations formulées en application du V de l'article L. 515-16 ; 5° Le cas échéant, les mesures supplémentaires de prévention des risques prévues par l'avant-dernier alinéa de l'article L. 515-16. (...) ". Aux termes de l'article R. 515-44 du même code : " I. - Le projet de plan, éventuellement modifié pour tenir compte des résultats de la concertation et des avis émis par les personnes et organismes associés, est soumis à une enquête publique organisée dans les formes prévues par la section 2 du chapitre III du titre II du livre Ier. Le dossier de l'enquête comprend les documents et informations mentionnés à l'article R. 515-41, les documents établis à l'issue de la concertation et les avis émis en application du II de l'article R. 515-43. Lorsque le projet comporte des mesures supplémentaires de prévention des risques, le dossier est complété par une note indiquant les mesures prévues aux I, II, III et IV de l'article L. 515-16 qu'elles permettent d'éviter et par les documents graphiques mentionnés au 2° du I de l'article R. 515-41 tels qu'ils se présenteraient en l'absence de mesures supplémentaires. (...) ".
18. S'il appartient à l'autorité administrative de mettre à la disposition du public, pendant toute la durée de l'enquête, un dossier d'enquête publique comportant l'ensemble des documents mentionnés notamment par les dispositions citées, la méconnaissance de ces dispositions n'est toutefois de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.
19. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport du commissaire enquêteur, que le dossier soumis à enquête comportait, outre une notice d'information et un résumé non technique, une note de présentation, le règlement du plan, des recommandations, le plan de zonage, le bilan de la concertation du public et les avis des personnes et organismes associés, ainsi qu'une copie de l'arrêté préfectoral complémentaire du 30 juillet 2014, imposant à la société Isochem des mesures de réduction du risque à la source, dans le cadre du PPRT. La note de présentation décrit avec précision les phénomènes dangereux, notamment à l'aide d'un tableau dressant la liste de ces phénomènes, en indiquant leur probabilité, leurs effets et leur gravité, avec une cartographie précise des aléas et des enjeux. Elle comporte une description suffisante, au regard des dispositions précitées de l'article R. 515-41, des établissements existants situés dans le périmètre d'étude, en précisant les activités exercées et l'existence d'établissements recevant du public. Contrairement à ce qui est soutenu, la note de présentation évoque bien l'hypothèse alternative du déménagement de la société Isochem, dont le coût est évalué par cette société entre 44 et 55 millions d'euros. La note indique, plans à l'appui, que le zonage réglementaire est constitué de plusieurs zones de réglementation distinctes qui sont définies en fonction du type de risques, de leur gravité, de leur probabilité et de leur intensité, permettant ainsi d'apprécier la pertinence des prescriptions du règlement du plan. La note expose des mesures d'organisation, telles que l'organisation commune des entreprises voisines d'Isochem, ou les mesures d'accompagnement. La note comporte des précisions suffisantes sur les conditions de prévention sur le site d'Isochem. Elle n'avait pas à exposer les impacts socio-économiques du plan, ni les conditions de mise en oeuvre des mesures édictées par ce plan, ni à justifier de sa pertinence. L'étude de dangers n'est pas au nombre des documents devant figurer, en vertu de l'article R. 515-41 du code de l'environnement, dans le dossier soumis à enquête publique en vue de l'approbation d'un plan de prévention des risques technologiques. Si le document graphique ne fait pas apparaître les noms des entreprises implantées dans le périmètre d'étude, ni le détail des bâtiments de la société Isochem, ce plan n'en est pas moins suffisamment précis dans la délimitation du zonage réglementaire. En outre, le nom des entreprises riveraines figure clairement dans la carte de synthèse des enjeux figurant dans la note de présentation. Le règlement comporte en annexe une fiche de consignes en cas d'alerte et une autre, consacrée au plan de protection des personnes, défini comme un plan de gestion de crise décrivant dans chaque entreprise riveraine concernée la conduite à tenir pour protéger les personnes présentes dès le début d'un sinistre dans l'établissement Isochem. La mise en oeuvre de ce plan de protection des personnes y est décrite de manière suffisante. L'absence d'échéancier de mise en oeuvre des mesures réglementaires n'a pas été de nature à nuire à l'information du public, dès lors que cet échéancier ne concerne que les mesures foncières de délaissement et d'expropriation et que le plan litigieux ne prévoit qu'une mesure d'expropriation et pas de droit de délaissement. Le dossier soumis à enquête comportait également un résumé non technique, qui ne fait pas partie des documents énumérés à l'article R. 515-41 du code de l'environnement, n'a pour seul objet que de faciliter la compréhension du dossier par une description synthétique du plan et de son règlement et ne saurait se substituer à la note de présentation qui figurait bien dans le dossier soumis à enquête. Par ailleurs, ainsi que l'indique le commissaire enquêteur dans son rapport, la note de présentation cite les conclusions des études de vulnérabilité des bâtis aux effets de surpression, thermiques et toxiques réalisées par l'INERIS et le CETE, présentées lors d'une réunion des personnes publiques associées le 5 février 2013 et adressées individuellement aux entreprises concernées. Le commissaire enquêteur a pu prendre connaissance de ces études de vulnérabilité et en fait une analyse dans son rapport. Les estimations des bâtiments existants réalisées par France Domaine, communiquées aux entreprises concernées, n'avaient pas à figurer au dossier soumis à enquête. Si l'étude sur le déménagement de la société Isochem n'a été communiquée au commissaire enquêteur que durant l'enquête publique, la note de présentation reprend les conclusions de cette étude. Enfin, le commissaire enquêteur, dans ses conclusions, relève que les services de l'Etat ont mis en oeuvre tout au long de la procédure les moyens adéquats d'étude et de réflexion, et s'il relève " quelques rétentions d'informations ", il admet que ces informations ont été délivrées suite aux demandes présentées.
20. Dans ces conditions, le dossier soumis à enquête n'a pas comporté de lacunes ayant nui à l'information de l'ensemble des personnes intéressées ou été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête. Le moyen doit être écarté.
21. En second lieu, l'enquête publique s'est déroulée du 20 septembre au 20 octobre 2014. Si le commissaire enquêteur a relevé dans son rapport, que lors d'une réunion en préfecture le 26 août 2014, soit avant le début de l'enquête, il lui a été demandé de ne pas engager une prolongation d'enquête, en raison du court délai restant avant que soit pris l'arrêté, le 16 décembre 2014 au plus tard, le commissaire enquêteur, qui a relaté cette demande dans son rapport, indique lui-même que cette invitation n'a eu aucun effet sur le déroulement de l'enquête. Ce souhait exprimé par les services préfectoraux n'a pas constitué dans les circonstances de l'espèce, une pression exercée sur le commissaire enquêteur. De même, si le sous-préfet a fait part au commissaire enquêteur, lors d'un entretien le 15 octobre 2014, de la " nécessité de réaliser le PPRT ", il ne ressort nullement des pièces du dossier que le commissaire enquêteur, qui a également mentionné cette demande dans son rapport, se serait estimé lié par ce souhait qui n'a pas constitué davantage une pression.
En ce qui concerne les conclusions du commissaire enquêteur :
22. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (...) ".
23. Il résulte des dispositions citées, que, si celles-ci n'imposent pas au commissaire-enquêteur de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elles l'obligent à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis. En l'espèce, le commissaire enquêteur a répondu de manière approfondie, dans son rapport, aux observations adressées par les entreprises durant l'enquête. En outre, le commissaire-enquêteur a, dans ses conclusions, d'une part présenté ses commentaires et avis sur les observations formulées relatives à l'élaboration du plan par les services préfectoraux, à la rapidité de la procédure, à la pérennité des entreprises riveraines, au financement des travaux de protection du personnel, à la délocalisation d'Isochem, à l'impact de la nouvelle directive " Seveso III ". D'autre part, il a indiqué notamment que l'activité de négoce des sociétés présentes n'est pas incompatible avec la mise en oeuvre du PPRT, que les personnes et organismes associés ont émis en majorité des avis favorables, que la procédure suivie a permis de réduire le risque à la source, qu'une participation au financement des travaux de protection et des locaux de confinement est possible de la part des autorités départementales et régionales et que le PPRT constitue une garantie de protection des personnels travaillant dans le périmètre de protection. Ces conclusions, qui ne sont entachées d'aucune contradiction, détaillent les raisons ayant amené le commissaire enquêteur à émettre un avis favorable assorti de réserves. Les requérantes ne sont, par suite, pas fondées à soutenir que les conclusions du commissaire-enquêteur seraient insuffisamment motivées.
En ce qui concerne la motivation :
24. L'arrêté du 8 décembre 2014 contesté qui approuve le plan de prévention des risques technologiques lié aux installations exploitées par la société Isochem, sur le territoire de la commune de Pithiviers, revêt un caractère réglementaire et ne fait donc pas partie des décisions individuelles défavorables soumises à l'obligation de motivation en vertu de la loi du 11 juillet 1979 alors applicable et reprise aux articles L. 211-2 et suivants du code des relations entre le public et l'administration. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cet arrêté doit dès lors être écarté.
En ce qui concerne le respect des seuils financiers :
25. Aux termes du IV de l'article L. 515-16 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : "A l'intérieur du périmètre d'exposition aux risques, les plans de prévention des risques technologiques peuvent, en fonction du type de risques, de leur gravité, de leur probabilité et de leur cinétique : (...) IV.-Prescrire les mesures de protection des populations face aux risques encourus, relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des installations et des voies de communication existant à la date d'approbation du plan, qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants et utilisateurs dans les délais que le plan détermine. Ces mesures peuvent notamment comprendre des prescriptions relatives aux mouvements et au stationnement des véhicules de transport de matières dangereuses. Lorsque des travaux de protection sont prescrits en application du premier alinéa du présent IV, ils ne peuvent porter que sur des aménagements dont le coût n'excède ni des limites fixées par le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 515-25 ni, en tout état de cause : 20 000 , lorsque le bien concerné est la propriété d'une personne physique ; 5 % du chiffre d'affaires de la personne morale l'année de l'approbation du plan, lorsque le bien est la propriété d'une personne morale de droit privé ; 1 % du budget de la personne morale l'année de l'approbation du plan, lorsque le bien est la propriété d'une personne morale de droit public. (...) " ; et aux termes de l'article R. 515-42 du même code : " Les travaux de protection prescrits en application du IV de l'article L. 515-16 ne peuvent porter que sur des aménagements dont le coût n'excède pas 10 % de la valeur vénale ou estimée du bien avant l'intervention de l'arrêté prévu à l'article R. 515-40 ".
26. Le règlement du PPRT litigieux prévoit en son titre IV, chapitre 1er, que les mesures relatives à l'aménagement des constructions et installations existantes qu'il prévoit sont à réaliser dans un délai de 5 ans à compter de la date d'approbation du plan, et que " les travaux prescrits ne peuvent porter que sur des aménagements dont le coût n'excède pas 10% de la valeur vénale ou estimée du bien avant la prescription du présent PPRT ni, en tout état de cause : - 20 000 , lorsque le bien concerné est la propriété d'une personne physique ; - 5 % du chiffre d'affaires de la personne morale l'année de l'approbation du plan, lorsque le bien est la propriété d'une personne morale de droit privé ". Ce faisant, le règlement du PPRT reprend les seuils définis par les articles L. 515-16 IV et R. 515-42 du code de l'environnement, dont les dispositions n'ont par suite pas été méconnues. La circonstance que les propriétaires ne pourraient financer la mise en oeuvre des aménagements en cause et que le coût du déménagement de la société MIPE serait évalué à 835 000 euros est sans incidence. Enfin, il résulte des dispositions de l'article 6 de l'ordonnance n° 2015-1324 du 22 octobre 2015 que " Les prescriptions de travaux de protection prévues par ces plans ne s'appliquent qu'aux logements " et que " Les plafonds mentionnés aux quatrième et cinquième alinéas du IV de l'article L. 515-16 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, et les dispositions prévues par ces plans faisant référence à ces plafonds ne s'appliquent plus ". Il suit de ce qui précède que le moyen ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne le bien-fondé des mesures prescrites par le plan :
27. Aux termes de l'article L. 515-15 du code l'environnement dans sa rédaction alors applicable : " L'Etat élabore et met en oeuvre des plans de prévention des risques technologiques qui ont pour objet de limiter les effets d'accidents susceptibles de survenir dans les installations figurant sur la liste prévue au IV de l'article L. 515-8 et pouvant entraîner des effets sur la salubrité, la santé et la sécurité publiques directement ou par pollution du milieu. / Ces plans délimitent un périmètre d'exposition aux risques en tenant compte de la nature et de l'intensité des risques technologiques décrits dans les études de dangers et des mesures de prévention mises en oeuvre ". L'article L. 515-16 du même code, dans sa rédaction applicable, énumère les mesures que les plans de prévention des risques technologiques peuvent définir à l'intérieur du périmètre d'exposition aux risques, en fonction du type de risques, de leur gravité, de leur probabilité et de leur cinétique. Au nombre de celles-ci figure notamment, au I de cet article, la délimitation des zones dans lesquelles la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages ainsi que les constructions nouvelles et l'extension des constructions existantes sont interdites ou subordonnées au respect de prescriptions relatives à la construction, à l'utilisation ou à l'exploitation. En vertu de l'article L. 515-23 du même code : " Le plan de prévention des risques technologiques approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est porté à la connaissance des maires des communes situées dans le périmètre du plan en application de l'article L. 121-2 du code de l'urbanisme. Il est annexé aux plans locaux d'urbanisme, conformément à l'article L. 126-1 du même code ".
S'agissant de la prise en compte de l'activité de la société MIPE :
28. Pour établir le PPRT, le représentant de l'Etat doit prendre en compte les effets d'accidents susceptibles de survenir dans les installations figurant sur la liste prévue au IV de l'article L. 515-8, en relation avec tout autre facteur de nature à interagir avec elles et en particulier les effets dit "dominos" dus aux interactions entre les différentes installations de l'établissement.
29. L'établissement exploité par la société MIPE, propriété de la SCI Tulipe, a été classé dans le PPRT, pour partie en zone d'interdiction r, zone d'interdiction n'ayant pas pour vocation à la construction ou à l'installation de nouveaux locaux d'activité ou d'habitation, et pour partie en zone B3, zone d'autorisations très limitées sous conditions, ayant vocation à la construction ou à l'installation de nouveaux locaux d'activité économiques sous réserve de ne pas augmenter la population exposée et mettre en oeuvre des règles constructives pour protéger les personnes présentes. Si la société MIPE soutient que le PPRT n'a pas tenu compte de son activité qui implique la manipulation de substances radioactives et de la survenance d'effets dits dominos, il ressort des pièces du dossier, notamment de la cartographie des aléas générés par l'établissement Isochem que le bâtiment de la société MIPE est concerné par des effets toxiques, qui ne génèrent aucun effet domino, des effets de surpression allant jusqu'à 50 mbar et des effets thermiques dont l'intensité maximale, évaluée à un rayonnement thermique de 5 KW/m², n'est pas susceptible d'endommager le bâti selon l'étude de vulnérabilité réalisée par la société Ineris de janvier 2013 et donc d'engendrer des effets domino. Ces effets sont en outre inférieurs aux seuils définis par l'arrêté ministériel du 29 septembre 2005 et au-delà desquels les effets domino doivent être évalués et examinés, ces seuils étant de 200 mbar pour les effets de surpression et de 8 kW/m² pour les effets thermiques. L'étude des effets domino pour l'établissement de la société MIPE n'était donc pas nécessaire.
S'agissant de l'absence de mesures de délaissement :
30. Aux termes de l'article L. 515-16 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " A l'intérieur du périmètre d'exposition aux risques, les plans de prévention des risques technologiques peuvent, en fonction du type de risques, de leur gravité, de leur probabilité et de leur cinétique : (...) II.-Délimiter, à l'intérieur des zones prévues au I, des secteurs où, en raison de l'existence de risques importants d'accident à cinétique rapide présentant un danger grave pour la vie humaine, les propriétaires des biens concernés peuvent mettre en demeure la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme de procéder à l'acquisition de leur bien (...). La commune ou l'établissement public de coopération intercommunale peut, par convention passée avec un établissement public, lui confier le soin de réaliser l'acquisition des biens faisant l'objet du délaissement. (...)III.-Délimiter, à l'intérieur des zones prévues au I, des secteurs où, en raison de l'existence de risques importants d'accident à cinétique rapide présentant un danger très grave pour la vie humaine, l'Etat peut déclarer d'utilité publique l'expropriation, au profit des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d'urbanisme, dans les conditions prévues par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, des immeubles et droits réels immobiliers. ".
31. Il est constant que le PPRT contesté, au titre des mesures foncières, a délimité un secteur Ex d'expropriation potentielle en application du III de l'article L. 515-16 du code de l'environnement, mais n'a retenu aucun secteur de droit à délaissement en application du II dudit article. Si la société MIPE soutient que son établissement aurait dû bénéficier de ce droit à délaissement, il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment du mémoire en réponse au commissaire enquêteur et des études de la société Ineris que, compte tenu de l'écart important entre le coût de la mesure de délaissement, estimé à environ 1 900 000 , et le coût des travaux de protection nécessaires imposés à cet établissement, évalués à 128 000 HT, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation en ne classant pas l'établissement exploité par la société MIPE en secteur de délaissement.
S'agissant de la pertinence des mesures prévues :
32. Aux termes de l'article L. 515-16 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " A l'intérieur du périmètre d'exposition aux risques, les plans de prévention des risques technologiques peuvent, en fonction du type de risques, de leur gravité, de leur probabilité et de leur cinétique : I.-Délimiter les zones dans lesquelles la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages ainsi que les constructions nouvelles et l'extension des constructions existantes sont interdites ou subordonnées au respect de prescriptions relatives à la construction, à l'utilisation ou à l'exploitation. (...) IV.-Prescrire les mesures de protection des populations face aux risques encourus, relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des installations et des voies de communication existant à la date d'approbation du plan, qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants et utilisateurs dans les délais que le plan détermine. Ces mesures peuvent notamment comprendre des prescriptions relatives aux mouvements et au stationnement des véhicules de transport de matières dangereuses. (...) V.-Définir des recommandations tendant à renforcer la protection des populations face aux risques encourus et relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des voies de communication et des terrains de camping ou de stationnement de caravanes, pouvant être mises en oeuvre par les propriétaires, exploitants et utilisateurs. (...) ".
33. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le PPRT contesté comporte un plan de zonage réglementaire, qui a été établi après une caractérisation des risques liés au site de l'établissement Isochem, dont la situation notamment financière a été pleinement prise en compte, résultant notamment de l'étude de dangers, et après cartographie tant des aléas que des enjeux. Ce zonage prévoit une zone grisée correspondant à l'emprise foncière du site Isochem, faisant l'objet d'une réglementation stricte, une zone R d'interdiction stricte n'ayant pas vocation à la construction ou à l'installation de nouveaux locaux d'activité ou d'habitation, cette zone étant soumise à des effets toxiques d'aléas très fort+ à très fort, à des effets thermiques d'aléas fort+ à faible et à des effets de surpression d'aléas fort+ à faible, une zone r d'interdiction n'ayant pas pour vocation à la construction ou à l'installation de nouveaux locaux d'activité ou d'habitation, et trois zones B (B1, B2 et B3), caractérisées par des aléas toxiques et de surpression moins significatifs, et dans lesquelles seules les extensions des constructions existantes sont autorisées sous conditions, ainsi que les constructions nouvelles strictement destinées à la mise à l'abri des personnes, les nouveaux bâtiments devant alors mettre en oeuvre des règles constructives pour protéger les personnes présentes. Le règlement prévoit également en son titre IV des mesures de protection des populations, en particulier en prescrivant, pour les constructions existantes en zones R, r, B1, B2 et B3, des travaux de réduction de la vulnérabilité afin d'assurer la protection des occupants pour l'effet toxique, par la mise en oeuvre d'un local ou espace de confinement correctement dimensionné et aménagé, en prévoyant en outre, en fonction des zones, des travaux de réduction de la vulnérabilité, des mesures de protection contre l'aléa thermique, le renforcement de la structure du bâti. En particulier, en zone B3 où se situent principalement les établissements des sociétés requérantes, le règlement dispose que tout projet autorisé dans cette zone permet d'assurer la protection des personnes par la mise en oeuvre d'un local ou espace de confinement correctement dimensionné et aménagé selon des prescriptions énoncées en annexe 3. Si la SAS CV Beauvallet fait valoir que les mesures réglementaires imposées, notamment le local de confinement, ne sont pas pertinentes compte tenu des difficultés de dimensionner ces locaux pour les activités de négoce et des conséquences défavorables en matière d'effectifs et que ces mesures empêchent les entreprises de se développer, elle n'apporte pas de justifications probantes à l'appui de son moyen alors que les études de vulnérabilité réalisées contribuent à garantir l'efficacité des travaux réalisés pour les locaux de confinement et que le ministère en charge de l'écologie a mis à disposition des riverains industriels tous les guides nécessaires pour définir les travaux à mettre en oeuvre à partir de l'objectif de performance défini dans le PPRT. Le règlement prévoit également des mesures relatives à l'utilisation et à l'exploitation, notamment, pour les installations classées du pôle chimique de Pithiviers, une organisation commune de gestion de crise pour la mise à l'abri de leur personnel et l'adoption d'un plan de protection des personnes. Le règlement prévoit encore des mesures d'accompagnement concernant l'usage du domaine public, en interdisant le stationnement des transporteurs de matières dangereuses, à l'exception néanmoins de l'arrêt ponctuel du véhicule. Le règlement ne se limite donc pas à des travaux sur le bâti et a bien prévu diverses mesures d'organisation. Les sociétés requérantes n'apportent pas d'élément précis permettant d'établir que les mesures de protection prescrites par le PPRT seraient inadaptées aux effets des différents aléas résultant des installations, ni que ces mesures ne permettraient pas d'assurer la sauvegarde de l'activité économique des entreprises incluses dans le périmètre du plan. Par ailleurs, aucune disposition n'imposait lors de l'élaboration du PPRT, la réalisation préalable d'une étude économique globale. En revanche, il ressort notamment de la note de présentation que l'administration a fait procéder à une estimation foncière de la valeur des biens situés dans le périmètre d'étude du plan, ainsi qu'à une étude de vulnérabilité sur les bâtiments existants. Il ne peut dès lors être soutenu que les mesures de protection ne seraient pas justifiées par un diagnostic détaillé des bâtiments. Enfin, il ressort notamment de la note de présentation, des conclusions du commissaire enquêteur, et du déroulement de la procédure, en particulier avec les personnes et organismes associés, que le PPRT a été élaboré en tenant compte de la particularité du site composé d'entreprises industrielles dont une partie dispose de plans de protection des personnes (PPP). Il n'est ainsi pas établi que les prescriptions du PPRT ne tiendraient pas compte de la spécificité du site, composé uniquement d'entreprises industrielles et commerciales. Il prévoit bien par ailleurs des mesures organisationnelles garantissant la sécurité des personnes. Il suit de ce qui précède que le moyen ne peut qu'être écarté.
34. En deuxième lieu, s'il résulte des dispositions de l'article 6 de l'ordonnance n° 2015-1324 du 22 octobre 2015 que " Les prescriptions de travaux de protection prévues par ces plans ne s'appliquent qu'aux logements ", cette circonstance n'établit pas par elle-même l'illégalité des dispositions relatives à la protection du bâti figurant dans le PPRT.
35. En dernier lieu, s'il est reproché au préfet d'avoir refusé de rechercher des mesures de réduction du risque à la source, il ressort des pièces du dossier que le PPRT a été élaboré en tenant compte de l'étude de dangers réalisée par la société Isochem en 2008, qui prévoit diverses mesures de maîtrise des risques, à savoir des dispositions constructives telles que la présence de murs coupe-feu, des dispositions organisationnelles telles que le permis de feu, les consignes de sécurité, la formation du personnel aux opérations à effectuer, des dispositifs techniques visant à la prévention des risques tels que des détections incendie ou gaz, l'asservissement de vannes pneumatiques à la détection, des dispositifs techniques visant à la protection des personnes tels que le sprinklage du parc à fûts, le canon incendie au poste de dépotage, les rideaux d'eau protégeant les établissements voisins. En complément de ces mesures de maîtrise des risques, l'exploitant a proposé par courrier du 8 mars 2013 la mise en place d'un dispositif de type colonne de lavage des gaz BF3 et HCl gaz à l'eau située au niveau de l'extraction d'air du local d'utilisation pour capter l'ensemble des gaz toxiques pouvant être émis vers l'extérieur. Ce dispositif, qui a été prescrit à l'exploitant par arrêté préfectoral complémentaire du 30 juillet 2014, permet de réduire la distance d'effet de 360 à 210 m. Le moyen doit dans ces conditions être écarté.
S'agissant des mesures supplémentaires :
36. Aux termes du V de l'article L. 515-16 du code de l'environnement : " Les plans peuvent par ailleurs prévoir, sans préjudice des obligations mises à la charge de l'exploitant par le représentant de l'Etat dans le département en application des articles L. 512-1 à L. 512-5 et de l'article L. 512-7, des mesures supplémentaires de prévention des risques permettant de réduire le périmètre des secteurs susceptibles de faire l'objet des mesures prévues aux II et III du présent article lorsque le coût de ces mesures supplémentaires est inférieur à celui des mesures prévues à ces mêmes II et III qu'elles permettent d'éviter. De telles mesures supplémentaires doivent faire l'objet de la convention prévue au IV de l'article L. 515-19 avant l'approbation des plans ".
37. Les sociétés MIPE et Tulipe soutiennent qu'aucune mesure supplémentaire n'a été imposée à la société Isochem, en particulier son déménagement. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le PPRT a identifié un secteur d'expropriation possible, que la valeur vénale de la totalité de la parcelle concernée par ce secteur a été estimée par France Domaines à 124 000 , alors qu'il résulte de l'étude réalisée par la société Isochem que le déménagement du site qu'elle exploite représenterait un coût évalué entre 44 et 55 millions d'euros. Les sociétés requérantes n'établissent pas que ce coût, qui a été déterminé au vu d'une étude produite au dossier, réalisée par la société Isochem, et qui prend en compte les frais d'étude, d'achat de terrain, de construction de nouveaux bâtiments, de déménagement, de dépollution du site actuel, ainsi que la perte d'exploitation durant ce déménagement, aurait été surévalué.
En ce qui concerne la méconnaissance du principe " pollueur-payeur " :
38. L'article L. 110-1 du code de l'environnement énonce, parmi les principes généraux : "(...) Le principe pollueur-payeur, selon lequel les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur ". Le PPRT attaqué, pris en application de l'article L. 515-16 précité du code de l'environnement, comporte des dispositions qui, à l'intérieur d'un périmètre donné, ont pour objet de limiter les effets d'accidents susceptibles de survenir dans l'établissement exploité par la société Isochem et pouvant entraîner des effets sur la salubrité, la santé et la sécurité publiques directement ou par pollution du milieu. Ces dispositions, qui s'appliquent sans préjudice des obligations qui s'imposent à la société Isochem en sa qualité d'exploitante d'une installation classée pour la protection de l'environnement, classée Seveso seuil haut, ne méconnaissent pas le principe "pollueur-payeur ".
En ce qui concerne la directive n° 2012/18/UE du parlement européen et du conseil, dite "Seveso 3 " du 4 juillet 2012 :
39. La société MIPE et la SCI Tulipe soutiennent que le préfet n'a pas anticipé les conséquences de l'entrée en vigueur de la directive du 4 juillet 2012 dite " Seveso 3 ". Il y a lieu d'écarter ce moyen, par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
40. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Maintenance industrielle et production électronique (MIPE), la SCI Tulipe, la société Caoutchouc et plastique pour industrie et bâtiment (CPIB), la société Hursin et fils et la SAS CV Beauvallet fils ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes.
Sur les frais liés au litige :
41. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les sociétés requérantes demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de la société Maintenance industrielle et production électronique (MIPE) et de la SCI Tulipe, une somme de 1 000 euros à la charge de la société Caoutchouc et plastique pour industrie et bâtiment (CPIB) et de la société Hursin et fils et une somme de 1 000 euros à la charge de la SAS CV Beauvallet fils, au titre des frais exposés par la société PMC Isochem et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes n° 17NT00311 de la société Maintenance industrielle et production électronique (MIPE) et de la SCI Tulipe, n° 17NT00385 de la société Caoutchouc et plastique pour industrie et bâtiment (CPIB) et de la société Hursin et fils et n° 17NT00451 de la SAS CV Beauvallet sont rejetées.
Article 2 : La société Maintenance industrielle et production électronique (MIPE) et la SCI Tulipe, d'une part, la société Caoutchouc et plastique pour industrie et bâtiment (CIPB) et la société Hursin et fils, d'autre part, et la SAS CV Beauvallet fils verseront chacune à la société PMC Isochem une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Maintenance industrielle et production électronique (MIPE), à la SCI Tulipe, à la société Caoutchouc et plastique pour industrie et bâtiment (CPIB), à la société Hursin et fils, à la SAS CV Beauvallet fils, au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, à la Société PMC Isochem venant aux droits de la société Isochem et à la Sarl Pmc Group France,
Une copie sera en outre adressée au préfet du Loiret, Scp Christophe Ancel - Mandataire Judiciaire de La Sté Isochem, à Me I...K..., à la Selarl A et M L...et à la Selarl Bauland-Carboni-Martinez et Associés - Administrateur Judiciaire de La Sté Isochem.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Dussuet, président de chambre,
- M. Degommier, président assesseur,
- M. Mony, premier conseiller.
Lu en audience publique le 26 novembre 2018.
Le rapporteur,
S. DEGOMMIER
Le président,
J-P. DUSSUET Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis
en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées,
de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT00311,17NT00385,17NT00451