2°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, le tout dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°1602909/1-1 du 15 juin 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police en date du 4 décembre 2015, enjoint au préfet de police de délivrer à Mme C...un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement et mis à la charge de l'Etat le versement à Mme C...de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 juillet 2016, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 15 juin 2016 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- son arrêté du 4 décembre 2015 n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il se réfère pour le surplus à ses écritures de première instance.
Par des mémoires en défense enregistrés les 20 janvier et 7 mars 2017, MmeC..., représentée par MeE..., demande à la Cour de confirmer le jugement attaqué, d'annuler l'arrêté du préfet de police du 4 décembre 2015, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, le tout dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- les moyens du préfet de police ne sont pas fondés ;
- en tout état de cause, elle a droit à la délivrance d'un certificat de résidence dès lors qu'elle justifie de dix ans de présence en France ;
- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Vu
- la décision du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Paris du 2 décembre 2016 admettant Mme C...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant MmeC....
1. Considérant que MmeC..., ressortissante algérienne née le 8 avril 1965, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salariée ; que, par l'arrêté du
4 décembre 2015, le préfet de police a rejeté cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que le préfet de police relève appel du jugement n°1602909/1-1 du 15 juin 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté, lui a enjoint de délivrer à Mme C...un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement à Mme C...de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions du préfet de police :
2. Considérant que Mme C...est célibataire et sans charges de famille ; que si elle a bénéficié de titres de séjour " vie privée et familiale " sur la période courant de décembre 2008 à juillet 2010 en raison de la conclusion d'un pacs avec une ressortissante portugaise, il est constant que ce pacs a été dissous le 28 janvier 2010 ; qu'elle n'a pas déféré aux mesures d'éloignement prises à son encontre le 2 août 2010 et le 11 avril 2012 par des arrêtés du préfet du Rhône et du préfet de police dont la légalité a été confirmée par les juridictions administratives saisies par l'intéressée ; qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches en Algérie où elle a reconnu avoir séjourné en 2009 ; qu'elle a fait l'objet, en 2007 et 2008 de deux condamnations à six mois d'emprisonnement avec sursis et au versement de dommages et intérêts pour fraude ou fausse déclaration pour obtention de prestations ou allocations indues versées par un organisme de protection sociale (faits commis de décembre 2005 à février 2007) et altération ou modification du nom ou accessoire de nom de l'état civil dans un acte public ou authentique ou dans un document administratif (faits commis de mai 2003 à février 2007), puis pour violence avec usage ou menace d'une arme sans incapacité et violence avec usage ou menace d'une arme suivie d'incapacité supérieure à 8 jours ; que si elle a fait valoir qu'elle s'acquitte de ses obligations fiscales, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'est pas imposable à l'impôt sur le revenu, et est bénéficiaire de l'aide médicale d'Etat et de la carte " solidarité transport " ; que si elle se prévaut des difficultés rencontrées par les femmes homosexuelles dans la société algérienne, elle n'établit en tout état de cause pas avoir fait l'objet de menaces personnelles ; qu'ainsi, et alors même que Mme C...a exercé une activité professionnelle en qualité d'animatrice vacataire dans le cadre des activités périscolaires entre 2010 et 2015, qu'elle a été également serveuse, employée de café et a exercé une activité d'aide à la personne, qu'elle déclare ses revenus, paie son loyers et ses factures, qu'elle produit des documents faisant état de sa présence en France entre l'année 2003 et l'année 2005, ponctuellement en 2006, ainsi que depuis l'année 2007, que son père et l'un de ses frères sont décédés, que sa mère et un autre de ses frères, de nationalité française, résident en France, qu'elle aurait des activités associatives, qui ne sauraient d'ailleurs suffire, dans les circonstances susmentionnées, à établir son intégration dans la société française, et qu'elle produirait des attestations de soutien, l'arrêté en cause ne saurait être regardé comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ; qu'il suit de là que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce motif pour annuler ledit arrêté ;
3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C...tant devant tribunal administratif qu'en appel ;
4. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté n° 2015-00968 du 25 novembre 2015, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 4 décembre 2015, le préfet de police a donné à Mme B...D..., attachée principale d'administration de l'Etat, signataire des décisions attaquées, délégation à l'effet de signer de tels actes ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions attaquées doit être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco- algérien modifié susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : 1°. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ; qu'en l'absence de toute pièce permettant d'apprécier les modalités de son séjour en France au cours de l'année 2006, la seule circonstances que Mme C...ait été condamnée pour usurpation d'identité et pour violence en raison de faits commis au cours de ladite année ne suffit pas à établir le caractère habituel de sa résidence en France pendant la période correspondante ; que Mme C...ne justifie par suite pas d'une résidence habituelle en France de plus de dix ans à la date de l'arrêté du
4 décembre 2015 ;
6. Considérant, en troisième lieu, que si Mme C...soutient que le préfet de police a commis une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dès lors que leur situation est intégralement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien en ce qui concerne les demandes d'admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale ; que, par suite, un ressortissant algérien ne peut utilement invoquer les dispositions de cet article à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national ;
7. Considérant, en quatrième lieu qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que pour les motifs indiqués au point 2., les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien modifié doivent être écartés ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 4 décembre 2015, lui a enjoint de délivrer à Mme C...un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat le versement à Mme C...de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme C...:
9. Considérant que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme C...ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions de Mme C...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C...demande au bénéfice de son avocat, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1602909/1-1 du 15 juin 2016 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C...devant le Tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant la Cour sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme F...C....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 22 mars 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Brotons, président de chambre,
Mme Appèche, président assesseur,
M. Magnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 6 avril 2017.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 11PA00434
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N° 16PA02276