Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 5 février 2019, l'Eurl Ito Ra, représentée par Me C... B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1800099 du 27 novembre 2018 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;
2°) de dire que la vente d'électricité produite par des panneaux photovoltaïques et par une usine hydroélectrique est une "livraison de biens" au sens du code des impôts de la Polynésie française ;
3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont qualifié son activité de prestation de services ;
- la vente d'énergie est un acte de commerce au sens de l'article L. 110-1 du code de commerce ;
- l'article 182-2 du code des impôts de la Polynésie française énonce que l'appréciation du caractère commercial de l'activité est réalisée en fonction des dispositions des articles
L. 110-1 et L. 110-2 du Code de Commerce ;
- le B.O.RES 2007/20 du ministère des finances et la note RES n°2007/20 (FE) du
29 mai 2007 précise que l'activité de production et de vente d'électricité photovoltaïque relève de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.
Cette affaire a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- le code général des impôts ;
- le code des impôts de la Polynésie française ;
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Ito Ra, qui exerce une activité de production et de vente d'électricité, a saisi le 3 novembre 2017 la direction des impôts et des contributions publiques de la Polynésie française d'une réclamation portant sur l'impôt sur les transactions de l'année 2014, en faisant valoir que son activité n'était pas imposable dans la catégorie des prestations de services mais dans celle des ventes de biens. Elle a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision de rejet de sa réclamation et de qualifier son activité en vente d'électricité et non en prestation de services au sens du code des impôts de la Polynésie française. Le tribunal, après avoir requalifié cette demande comme tendant à la réduction de la cotisation d'impôt sur les transactions à laquelle la société a été assujettie au titre de l'année 2014, l'a rejetée par un jugement n° 1800099 du 27 novembre 2018. La société Ito Ra, par la requête susvisée, se borne à demander à la Cour d'annuler ce jugement et de " dire que la vente d'électricité produite par des panneaux photovoltaïques et par une usine hydroélectrique est une "livraison de biens" au sens du code des impôts de la Polynésie française ".
Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête d'appel :
2. En premier lieu, la société Ito Ra soutient que la vente d'énergie est un acte de commerce au sens de l'article L. 110-1 du code de commerce et que l'article 182-2 du code des impôts de la Polynésie française précise que : " l'appréciation du caractère commercial de l'activité réalisée en fonction des dispositions des articles L. 110-1 et L. 110-2 du Code de Commerce ".
3. Aux termes de l'article LP. 181-1 du code des impôts de la Polynésie française : " Les recettes réalisées en Polynésie française par les personnes physiques ou morales qui, habituellement ou occasionnellement, achètent pour revendre ou accomplissent des opérations relevant d'une activité autre qu'agricole ou salariée sont soumises à l'impôt sur les
transactions (...) ".
4. D'une part, il résulte de ces dispositions, ainsi que l'ont estimé les premiers juges, que l'impôt sur les transactions frappe deux types d'activités qui sont soumises à des taux d'imposition différents en application de l'article LP. 184-1 du code des impôts de la Polynésie française, d'une part les achats-reventes et d'autre part, les autres opérations à l'exception des activités agricoles ou salariés. En conséquence, l'activité de vente d'électricité, qui résulte d'un processus de production et non d'un achat-revente en l'état, doit être regardée comme une " autre opération " au sens des dispositions précitées.
5. D'autre part, si l'article LP. 182-2 du même code dispose que : " - L'impôt sur les transactions s'applique aux recettes brutes résultant des opérations imposables de toute nature réalisées par les contribuables. / Sont notamment considérées comme opérations imposables, les cessions de droit de clientèle ainsi que les cessions d'éléments mobiliers de l'actif immobilisé réalisées en cours ou en fin d'exploitation par les entreprises de nature commerciale ou par toute entreprise se livrant à des activités commerciales, l'appréciation du caractère commerciale de l'activité étant réalisée en fonction des dispositions des articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de commerce. ", ces dispositions, qui sont relatives aux cessions de clientèle ou d'éléments mobiliers de l'actif immobilisé, n'ont en aucun cas pour objet ni pour effet de faire entrer l'activité de la société requérante dans la catégorie des activités d'achat-revente, pour l'application des dispositions afférentes à l'impôt sur les transactions et notamment celles de l'article LP. 184-1 du code des impôts de la Polynésie française, cela alors même que l'activité de vente d'électricité est un acte de commerce au sens des articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de commerce.
6. Ainsi, si la société Ito Ra a entendu invoquer devant la Cour les moyens susanalysés pour demander la décharge partielle de la cotisation à l'impôt sur les transactions à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014, elle n'est pas fondée à le faire sur le fondement de la loi fiscale.
7. En second lieu, la société Ito Ra fait valoir que tant le bulletin officiel du ministère des finances référencé RES 2007/20 que la réponse ministérielle n° 2007-20 (FE) du 29 mai 2007 à une question relative à la situation fiscale des producteurs d'électricité photovoltaïque, indiquent que l'activité de production et de vente d'électricité photovoltaïque relève de la catégorie d'imposition des bénéfices industriels et commerciaux. Si, ce faisant, la société requérante entend invoquer la doctrine administrative française, celle-ci est en tout état de cause, seulement opposable à l'administration fiscale métropolitaine sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales instituant un mécanisme de garantie au profit du redevable qui est fondé à s'en prévaloir, et la Polynésie française n'est, par suite, pas tenue d'interpréter le code des impôts de la Polynésie française conformément à la doctrine fiscale métropolitaine, qui en l'espèce, ne concerne pas l'impôt sur les transactions institué par ledit code. Au demeurant et en tout état de cause, la circonstance que l'activité de production et de vente d'électricité relève de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux serait sans incidence sur le présent litige.
8. De tout ce qui précède il résulte que la société Ito Ra n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande. Les conclusions de la requête doivent, par suite, être rejetées, y compris celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Polynésie française n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Ito Ra est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ito Ra.
Copie en sera adressée au gouvernement de la Polynésie française.
Délibéré après l'audience du 6 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme A..., président assesseur,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 novembre 2019.
Le rapporteur,
S. APPECHELe président,
I. BROTONS
Le greffier,
P. LIMMOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19PA00612 2