Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1911065/2-1 du 5 novembre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 5 avril 2019 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ;
4°) d'enjoindre, à défaut, au préfet de police de réexaminer sa situation ; de lui accorder un délai de départ volontaire de 6 mois et de faire injonction au préfet de police de délivrer une autorisation écrite dans un délai de quinze jours après la notification du jugement à intervenir et assortir cette décision d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) condamner la préfecture au paiement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour porte atteinte à son droit à la vie privée et familiale garanti par l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet de police ne pouvait pas se fonder sur la circonstance que la vie commune qu'il ne conteste pas et qui a été consacrée par un Pacs s'est déroulée en Belgique pour refuser de délivrer un titre ;
- la décision méconnait les prescriptions de la circulaire n° NOR/INT/D/04/00134/C du 30 octobre 2004, de la circulaire dite Valls ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire, enregistré le 25 août 2020, le préfet de police a conclu au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Bernier, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... C..., ressortissant marocain, né le 29 décembre 1992, a sollicité le 25 aout 2017 un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 5 avril 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement en date du 5 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ... ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier et notamment des attestations produites dont rien ne vient mettre en cause la fiabilité, que la vie de couple de M. C... avec son compagnon français a commencé en Belgique en juillet 2016. Après des changements de résidence qu'explique la carrière professionnelle de son partenaire qui n'ont pas rompu pour autant la vie commune, M. C... l'a rejoint à Paris en juillet 2017 où désormais, depuis cette date et jusqu'à l'intervention de l'arrêté contesté, ils justifient partager le même domicile et avoir une vie de couple permanente et effective. Ils ont par ailleurs conclu un pacte civil de solidarité le
14 décembre 2017. La réalité et la stabilité de la vie commune n'étant pas sérieusement contestées par l'administration en défense, M. C..., à qui il ne saurait être fait grief de ne pas exercer d'activité professionnelle dès lors qu'il ne dispose pas de titre l'autorisant à travailler, et dont les témoignages attestent l'insertion dans la société française, est fondé à soutenir que le refus de lui délivrer un titre de séjour a porté une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale. L'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi sont entachées d'illégalité en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour.
4. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du
5 avril 2019.
5. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la demande de titre de séjour de M. C... en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date de sa nouvelle décision dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, sous quinzaine, une autorisation provisoire de séjour. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction du prononcé d'une astreinte.
6. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à M. C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 5 novembre 2019 et l'arrêté du préfet de police du 5 avril 2019 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de titre de séjour de
M. C... en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date de sa nouvelle décision dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, sous quinzaine, une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera à M. C... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 3 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. B..., premier vice-président,
- M. Bernier, président assesseur,
- Mme Jayer, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2020.
Le rapporteur,
Ch. BERNIERLe président,
M. B...
Le greffier,
N. DAHMANI
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
5
N° 10PA03855
2
N° 19PA03959