Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 novembre 2017, M.D..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1615486/3-3 du
26 septembre 2017 ;
2°) d'annuler la décision du préfet de police du 8 juillet 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de prendre un arrêté de péril, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, au profit de MeB..., de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision attaquée a été prise en méconnaissance du principe du contradictoire ;
- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en écartant ce moyen sur le fondement de l'article L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration, qui n'est pas inapplicable ;
- la décision attaquée n'est pas motivée en fait ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les articles L. 511-1 et suivants et L. 521-2 du code de la construction et de l'habitation ;
- le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en refusant de prendre un arrêté de péril ;
- la décision contestée méconnaît les articles 8 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 juin 2018 le préfet de police conclut à sa mise hors de cause.
Il soutient qu'il n'est pas compétent pour défendre à l'instance, les arrêtés de péril ne relevant plus de sa compétente depuis l'intervention de la loi du 28 février 2017.
Par un mémoire enregistré le 22 février 2019, la ville de Paris, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. D...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code des relations entre l'administration et le public ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon,
- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour la ville de Paris.
Considérant ce qui suit :
1. Les services de sécurité de l'habitat de la préfecture de police de Paris se sont déplacés à la demande de M.D..., afin d'évaluer l'état de l'immeuble dans lequel il est locataire d'un logement, situé 14 rue de Vaucouleurs à Paris 11ème. Le préfet de police a adressé un courrier aux copropriétaires de l'immeuble, daté du 27 mars 2014, leur recommandant de prendre certaines mesures nécessaires à la sécurité des occupants. A la suite d'une nouvelle visite des lieux intervenue le 28 mai 2015, au cours de laquelle les services ont constaté une dégradation de l'état du logement, conduisant à constater une situation de péril au sens de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation, le préfet de police a adressé, le 30 juin 2015, une mise en demeure aux copropriétaires de l'immeuble et leur a enjoint de réaliser les travaux de sécurité prescrits considérés comme nécessaires pour mettre fin au péril existant, notamment dans le logement de M.D.... Malgré les travaux de réfection intérieure réalisés, la situation de péril persistant en raison de désordres situé au niveau du rez-de-chaussée et des fondations de l'immeuble, le préfet de police a de nouveau enjoint aux copropriétaires, le 8 juillet 2016, de réaliser les mesures prescrites et nécessaires pour mettre fin au péril constaté. Cependant, par la décision attaquée intervenue le même jour, le préfet de police, saisi d'une demande en ce sens par M.D..., a refusé de prendre un arrêté de péril. M. D...fait appel du jugement du 26 septembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision de refus.
2. Aux termes de l'article L. 2512-13 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable issue de l'article 25 de la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain, le maire de Paris est chargé de la police municipale en matière : " 2° de salubrité des bâtiments à usage principal d'habitation et bâtiments à usage partiel ou total d'hébergement en application des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du présent code et des articles L. 1311-1 et L. 1311-2 du code de la santé publique, sous réserve des dispositions prévues au dernier alinéa du I de l'article L. 123-3 et au dernier alinéa de l'article L. 123-4 du code de la construction et de l'habitation. / Lorsque ces immeubles menacent ruine, il exerce les pouvoirs de police définis aux articles L. 129-1 à L. 129-4-1 et L. 511-7 du même code et à l'article L. 2213-24 du présent code et prescrit les mesures de sûreté exigées par les circonstances, en cas de danger grave ou imminent menaçant ces immeubles. (...) ". L'article L. 511-7 du code de la construction et de l'habitation dispose que : " Sous réserve des compétences dévolues au préfet de police en application du dernier alinéa du I de l'article L. 123-3 et du dernier alinéa de l'article L. 123-4 du présent code, le maire de Paris exerce les pouvoirs prévus au présent chapitre lorsque l'immeuble menaçant ruine est un bâtiment à usage principal d'habitation, un bâtiment à usage total ou partiel d'hébergement ou un édifice ou monument funéraire. Pour l'application du présent article, le pouvoir de substitution conféré au représentant de l'Etat par l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales est exercé par le préfet de police. ". Enfin l'article 8 de la loi n° 2017-257 du 28 février 2017 précitée précise que ses dispositions relatives à la création de la collectivité à statut particulier de la Ville de Paris entrent en vigueur le 1er janvier 2019.
3. Aux termes de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation dans sa rédaction applicable : " Le maire, par un arrêté de péril pris à l'issue d'une procédure contradictoire dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'Etat, met le propriétaire de l'immeuble menaçant ruine, et le cas échéant les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 511-1-1, en demeure de faire dans un délai déterminé, selon le cas, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au péril ou les travaux de démolition, ainsi que, s'il y a lieu, de prendre les mesures indispensables pour préserver les bâtiments contigus. (...) Si l'état du bâtiment, ou d'une de ses parties, ne permet pas de garantir la sécurité des occupants, le maire peut assortir l'arrêté de péril d'une interdiction d'habiter et d'utiliser les lieux qui peut être temporaire ou définitive. Les dispositions des articles L. 521-1 à L. 521-4 sont alors applicables. (...) VI. Les pouvoirs dévolus au maire par le présent article sont exercés à Paris par le préfet de police. "
4. En premier lieu, il ressort des différents courriers de mises en demeure, adressées par le préfet de police, de se conformer aux mesures prescrites destinées à assurer la sécurité des locaux, que la procédure contradictoire imposée par les dispositions précitées a été respectée à l'égard des copropriétaires. En revanche, il résulte de ces mêmes dispositions que la procédure contradictoire ne s'impose pas à l'égard du locataire ayant sollicité de l'autorité administrative qu'elle prenne un arrêté de péril. Dès lors, M.D..., qui a en outre été régulièrement informé des développements successifs de la procédure, n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée, pour ce motif, d'un vice de procédure.
5. En deuxième lieu, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision attaquée, repris en appel par M.D..., sans invocation d'aucun élément nouveau en fait ou en droit, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
6. En troisième lieu, il résulte des pièces du dossier qu'ainsi qu'il a été dit au point 1, le préfet de police, alerté par M.D..., a mis en oeuvre une procédure de péril ordinaire en application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation, en exécution de laquelle les copropriétaires de l'immeuble ont nommé un architecte, qui a réalisé une étude de structure en vue de réaliser les travaux nécessaires au confortement de l'immeuble, et qu'à la date de la décision de refus attaquée, certains travaux avaient déjà été exécutés, notamment par la pose d'étaiements sur la baie d'accès au rez-de-chaussée du bâtiment. Par suite, en ayant refusé de prendre un arrêté de péril le 8 juillet 2016, le préfet de police n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence en la matière, ni commis d'erreur d'appréciation. Pour les mêmes motifs, il n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation en ne prononçant pas une interdiction d'occupation de l'immeuble, qui ne peut intervenir que comme mesure complémentaire d'un arrêté de péril. Pour les mêmes motifs encore, M. D...n'est pas plus fondé à soutenir que la décision attaquée l'a privé de la jouissance paisible de son domicile au sens de la garantie prévue par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Enfin M.D..., qui a contesté en première instance et en appel le refus de prendre un arrêté de péril que lui a opposé le préfet de police, n'est pas fondé à soutenir que son droit à un recours effectif, tel que garanti par les stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, aurait été méconnu.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.
9. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la ville de Paris fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la ville de Paris présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D...et à la maire de la Ville de Paris.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er avril 2019.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVENLe greffier,
I. BEDRLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA03579