Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 avril et 28 septembre 2018, M. C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1719305/1-2 du
3 avril 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions d'astreinte et de délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 700 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est entaché d'irrégularité dès lors qu'il n'est pas signé ;
- le principe du contradictoire a été méconnu dès lors qu'il n'a pas été entendu par la préfecture préalablement à l'adoption de l'arrêté attaqué ;
- le préfet a entaché sa décision d'un vice de procédure en ne saisissant pas la commission du titre de séjour ;
- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 7 ter de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
- il méconnaît les dispositions des articles L.313-11 7ème et L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'un défaut de base légale dès lors que la décision de refus de titre de séjour est elle-même illégale.
Par un mémoire enregistré le 4 juillet 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hamon.
- et les observations de Me A...pour M.C....
Une note en délibéré, enregistrée le 8 octobre 2018, a été présentée pour M.C....
Considérant ce qui suit :
1. M. B...C..., ressortissant tunisien, né le 5 mars 1954, est selon ses déclarations entré en France en 1970. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 7ème et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 17 novembre 2017 le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination. M. C...relève appel du jugement du 3 avril 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 17 novembre 2017 :
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ". Il ressort des pièces du dossier produites par M.C..., qui sont suffisamment nombreuses et variées, notamment les pièces médicales, que l'intéressé établit qu'il résidait de manière continue en France depuis plus de dix années à la date de la décision attaquée. Le préfet de police a dès lors méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en omettant de saisir la commission du titre de séjour avant de prendre l'arrêté attaqué.
3. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
4. Le présent arrêt, par lequel la Cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par M. C...n'implique pas, eu égard au motif d'annulation ci-dessus énoncé, que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé. Par suite, les conclusions du requérant tendant à ce que lui soit délivré un titre de séjour doivent être rejetées. Il y a en revanche lieu d'enjoindre au préfet de police de soumettre la demande présentée par l'intéressé à la commission du titre de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de lui délivrer dans l'attente du réexamen de sa situation administrative, une autorisation provisoire de séjour, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais de justice :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée par M. C...au titre des frais de justice et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1719305/1-2 du 3 avril 2018 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 17 novembre 2017 par lequel le préfet de police a refusé à M. C...la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de saisir la commission du titre de séjour afin qu'elle examine la demande de titre de séjour présentée par M. C...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 octobre 2018.
Le rapporteur,
P. HAMONLe président,
B. EVEN
Le greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA01434