Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 décembre 2020 et le 3 mars 2021, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 2017783/8 du 17 novembre 2020 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. D... devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- l'arrêté n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté est suffisamment motivé et témoigne d'un examen complet de la situation de l'intéressé ;
- il ne méconnaît pas les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 ;
- il ne méconnaît pas les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 ;
- il ne méconnaît pas les dispositions de l'article 23 et de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 24 février 2021 et le 3 mars 2021, M. D... demande à la Cour :
1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) de rejeter la requête du préfet de police ;
3°) dans l'hypothèse d'un refus du bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par le préfet de police ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, modifié par le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant afghan né le 29 novembre 1999, a fait l'objet d'un arrêté du 15 octobre 2020, notifié le même jour, par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités suédoises responsables de l'examen de sa demande d'asile. Le préfet de police relève appel du jugement 17 novembre 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 15 octobre 2020 et lui a enjoint de procéder à l'enregistrement de la demande d'asile de M. D....
Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. ". Eu égard aux circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. D... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur les conclusions de M. D... à fin de non-lieu à statuer :
3. Contrairement à ce que soutient M. D..., la circonstance que le préfet de police lui a, en exécution de l'injonction prononcée à l'article 3 du jugement attaqué, délivré une attestation de demande d'asile, ne prive pas d'objet l'appel du préfet de police contre ce jugement.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :
4. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
5. Pour annuler l'arrêté en litige comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013, le tribunal administratif s'est fondé sur la circonstance qu'il ne pouvait pas être présumé que M. D... ne serait pas éloigné à destination de l'Afghanistan par les autorités suédoises dès lors que, par une décision de l'office suédois des migrations du 18 décembre 2017, confirmée par le tribunal administratif de Stockholm le 19 septembre 2019 puis par la cour administrative d'appel de Stockholm le 2 décembre 2019, la demande de protection internationale introduite par l'intéressé a été rejetée et qu'il lui a été fait obligation de quitter le territoire à destination de l'Afghanistan. Toutefois, l'arrêté contesté a seulement pour objet de renvoyer l'intéressé en Suède, et non dans son pays d'origine. Par ailleurs, la Suède, Etat membre de l'Union européenne, est partie à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut de réfugiés, complétée par le protocole de New-York, et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Enfin, et alors même que sa demande d'asile aurait été définitivement rejetée, il ne ressort pas des pièces du dossier que les autorités suédoises n'évalueront pas, avant de procéder à un éventuel éloignement de l'intéressé, les risques auxquels il serait exposé en cas de retour en Afghanistan. Par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris s'est fondé sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 et la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté du 15 octobre 2020.
6. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... devant le Tribunal administratif de Paris.
Sur les autres moyens soulevés par M. D... :
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". En application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.
8. La décision litigieuse vise les stipulations applicables de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ainsi que le règlement (CE) 1560/2003 du 2 septembre 2003. Elle fait référence à la consultation du fichier Eurodac, selon lequel M. D... était connu des autorités allemandes et suédoises auprès desquelles il avait sollicité l'asile. Elle précise que ces dernières, qui doivent être regardées comme responsables de sa demande d'asile, ont été saisies d'une demande de reprise en charge de l'intéressé, qu'elles ont acceptée sur le fondement des dispositions de l'article 18.1 (d) du règlement (UE) n° 604/2013. L'arrêté contesté comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté en litige et du défaut d'examen sérieux de la demande de M. D... doivent être écartés.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, (...) 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de1'entretien individuel visé à l'article 5. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de ne pas instruire la demande de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit ou, si nécessaire pour la bonne compréhension du demandeur, oralement, et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, leur délivrance complète par l'autorité administrative, notamment par la remise de la brochure prévue par les dispositions précitées, constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
10. Il ressort des pièces du dossier que M. D... s'est vu remettre, le 2 septembre 2020, le guide du demandeur d'asile ainsi que les documents d'information A et B, intitulés respectivement " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande " et " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ", qui constituent la brochure commune prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement précité, en langue farsi. Si M. D... a déclaré comprendre le dari, il ne ressort pas des pièces du dossier, et alors que la langue farsi est une langue très proche du dari dès lors qu'elle use du même alphabet et qu'elle peut être lue par les locuteurs des deux langues, que M. D... n'aurait pas compris les informations comprises dans ces documents, l'intéressé ayant, au demeurant déclaré lors de son entretien individuel mené le 2 septembre 2019, en présence d'un interprète en langue dari, avoir compris la procédure engagée à son encontre. Si M. D... fait valoir que l'étiquette figurant sur la brochure B qui lui a été remise mentionne qu'elle contient 13 pages alors que ladite brochure doit en compter 16, cette circonstance, qui constitue une erreur purement matérielle, ne saurait démontrer, à elle seule, que le document en cause n'a pas été communiqué à l'intéressé dans son intégralité, alors au demeurant que M. D... a apposé sa signature sans émettre la moindre observation lors de la remise du document, ni d'ailleurs lors de l'entretien individuel du même jour pendant lequel il a reconnu avoir reçu l'information sur les règlements communautaires. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'intéressé n'a pas reçu l'ensemble des éléments d'information requis par les dispositions précitées de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté comme manquant en fait.
11. En troisième lieu, à supposer que M. D..., qui fait valoir que les informations relatives à la finalité du traitement des données dans Eurodac lui ont été communiquées postérieurement au relevé de ses empreintes, soulève le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 1er de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013, à la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 susvisé, dit Dublin III, qui prévoit qu'un document d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile doit être remis au début de la procédure d'examen des demandes d'asile pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, l'obligation d'information prévue par l'article 29, paragraphe 1, précité, du règlement (UE) n° 603/2013 susvisé, dit Eurodac II, a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des Etats membres relevant du régime européen d'asile commun. Le droit d'information des demandeurs d'asile contribue, au même titre que le droit de communication, le droit de rectification et le droit d'effacement de ces données, à cette protection. Dès lors, la méconnaissance de cette obligation d'information ne peut être utilement invoquée à l'encontre d'une décision par laquelle le préfet transfère un demandeur d'asile aux autorités responsables de l'examen de la demande d'asile. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 29 du règlement (UE) n° 603-2013 du 26 juin 2013 dit Eurodac II est inopérant et doit être écarté.
12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...). 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. (...) ".
13. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a bénéficié, le 2 septembre 2020, d'un entretien individuel dans les locaux de la préfecture de police. Il ressort du compte-rendu de cet entretien que l'intéressé a été personnellement reçu par un agent du 12ème bureau de la direction de la police générale de la préfecture de police, lequel doit être regardé comme une personne qualifiée en vertu du droit national pour mener cet entretien au sens du paragraphe 5 de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013. Dès lors que cet entretien a été mené par une personne qualifiée, l'absence d'indication de l'identité de l'agent ayant conduit l'entretien individuel, lequel n'avait en tout état de cause pas à justifier d'une délégation de signature, n'a pas privé l'intéressé de la garantie tenant au bénéfice de cet entretien et de la possibilité de faire valoir toutes observations utiles. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 doit être écarté.
14. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'il est prévu aux livres II, V et VI et à l'article L. 742-3 du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. / En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur l'une des listes mentionnées à l'article L. 111-9 ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger. ".
15. M. D... a bénéficié lors de son entretien individuel, ainsi que le permettent les dispositions citées ci-dessus, des services d'un interprète en langue dari de l'organisme d'interprétariat ISM, agréé par l'administration. Le nom de cet interprète et la dénomination de cet organisme lui ont été indiqués dans le compte rendu de l'entretien. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit donc être écarté.
16. En sixième lieu, aux termes de l'article 23 du règlement n° 604/2013 : " 1. Lorsqu'un Etat membre auprès duquel une personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu'un autre Etat membre est responsable conformément à l'article 20, paragraphe 5, et à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre Etat membre aux fins de reprise en charge de cette personne. / 2. Une requête aux fins de reprise en charge est formulée aussi rapidement que possible et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac (" hit "), en vertu de l'article 9 paragraphe 5, du règlement (UE) n° 603/2013. ". Aux termes de l'article 26 du même règlement : " 1. Lorsque l'Etat membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), l'Etat membre requérant notifie à la personne concernée la décision de le transférer vers l'Etat membre responsable et, le cas échéant, la décision de ne pas examiner sa demande de protection internationale. Si la personne concernée est représentée par un conseil juridique ou un autre conseiller, les Etats membres peuvent choisir de notifier la décision à ce conseil juridique ou à cet autre conseiller plutôt qu'à la personne concernée et, le cas échéant, de communiquer la décision à la personne concernée. / 2. La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'Etat membre responsable. (...) ".
17. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a saisi le 7 septembre 2020 les autorités suédoises d'une demande de reprise en charge de la demande d'asile de M. D... sur la base des résultats positifs du système Eurodac communiqués le 2 septembre 2020 et que par une réponse en date du 8 septembre 2020, les autorités suédoises ont accepté leur responsabilité sur le fondement des dispositions de l'article 18.1 (d) du règlement n° 604/2013. En outre, il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a prononcé la remise de M. D... aux autorités suédoises par un arrêté en date du 15 octobre 2020, que cet arrêté lui a été notifié le jour même et qu'il comportait l'énoncé des voies et délais de recours. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté aurait été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, faute pour le préfet de police de justifier avoir procédé aux diligences requises par les dispositions précitées, doit être écarté.
18. En septième lieu, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
19. La Suède, Etat membre de l'Union européenne, est partie à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut de réfugiés, complétée par le protocole de New-York et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. M. D... ne produit aucun élément de nature à établir qu'il existerait des raisons sérieuses de croire à l'existence de défaillances systémiques en Suède dans la procédure d'asile et que les autorités suédoises ne traiteraient pas sa demande d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les autorités suédoises, alors même que la demande d'asile de M. D... a été rejetée, n'évalueront pas, avant de procéder à un nouvel éloignement de l'intéressé, les risques auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 17 du même règlement et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen doivent être rejetés.
20. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 15 octobre 2020.
DECIDE :
Article 1er : M. D... est admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 2017783/8 du 17 novembre 2020 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 3 : La demande présentée par M. D... devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme B..., présidente,
- M. Mantz, premier conseiller,
- Mme A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mars 2021.
Le rapporteur,
C. A...La présidente,
M. B...
Le greffier,
S. GASPARLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA04006