Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 28 février 2017, et un mémoire enregistré le 3 septembre 2018, la SARL 18 Belles Feuilles, représentée par Me A...et MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1517104 du 16 janvier 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge de la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle peut bénéficier de l'exonération prévue par l'article 231 ter du code général des impôts, dès lors que les locaux dont elle est propriétaire sont des locaux commerciaux d'une superficie inférieure à 2 500 m² ;
- elle est fondée à se prévaloir des énonciations de l'instruction référencée BOI-IF-AUT-50-10 n° 110.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société 18 Belles Feuilles ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Poupineau,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société 18 Belles Feuilles, qui est propriétaire d'un hôtel particulier situé 93 rue Lauriston, à Paris (75016), a été assujettie à la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement au titre de l'année 2014, à raison des locaux situés dans cet immeuble. Elle fait appel du jugement en date du 16 janvier 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette taxe.
Sur l'application de la loi fiscale :
2. Aux termes de l'article 231 ter du code général des impôts : " I.-Une taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement annexées à ces catégories de locaux est perçue, dans les limites territoriales de la région d'Ile-de-France, composée de Paris et des départements de l'Essonne, des Hauts-de-Seine, de la Seine-et-Marne, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne, du Val-d'Oise et des Yvelines. II.-Sont soumises à la taxe les personnes privées ou publiques qui sont propriétaires de locaux imposables ou titulaires d'un droit réel portant sur de tels locaux. (...) III.-La taxe est due : 1° Pour les locaux à usage de bureaux, qui s'entendent, d'une part, des bureaux proprement dits et de leurs dépendances immédiates et indispensables destinés à l'exercice d'une activité, de quelque nature que ce soit, par des personnes physiques ou morales privées, ou utilisés par l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements ou organismes publics et les organismes professionnels, et, d'autre part, des locaux professionnels destinés à l'exercice d'activités libérales ou utilisés par des associations ou organismes privés poursuivant ou non un but lucratif ; (...) V.-Sont exonérés de la taxe : (....) 3° Les locaux à usage de bureaux d'une superficie inférieure à 100 mètres carrés, les locaux commerciaux d'une superficie inférieure à 2 500 mètres carrés, les locaux de stockage d'une superficie inférieure à 5 000 mètres carrés et les surfaces de stationnement de moins de 500 mètres carrés annexées à ces catégories de locaux ; (...) ".
3. En premier lieu, la circonstance alléguée que les locaux n'étaient plus utilisés du fait des nombreux travaux réalisés depuis le 15 décembre 2013 n'est pas de nature à les exclure du champ de la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureau, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement.
4. En deuxième lieu, pour contester son assujettissement à la taxe en litige, la société requérante fait valoir que les locaux dont elle est propriétaire sont utilisés pour la réalisation de prestations de service de nature commerciale et qu'ayant une superficie inférieure à 2 500 m², elle pouvait bénéficier de l'exonération prévue par les dispositions du V de l'article 231 ter du code général des impôts pour les locaux commerciaux.
5. Toutefois, il ressort des différents documents versés au dossier par l'administration, en particulier la déclaration modèle H1 en date du 13 octobre 1970, la déclaration de locaux commerciaux et bien divers établie le 30 novembre 1977 et la déclaration d'un local à usage professionnel ou commercial souscrite le 22 avril 2013 par le précédent propriétaire de l'immeuble, dont les mentions ne sont pas remises en cause par la société requérante, que les locaux en litige ont été répertoriés comme étant à usage de bureaux. La société 18 Belles Feuilles n'a pas, postérieurement à l'acquisition le 14 février 2013 de l'immeuble et à la réalisation des travaux, informé l'administration d'un éventuel changement d'affectation de ces locaux. Si elle fait valoir qu'elle a donné les locaux en location à une société immobilière, la société Barnes, que cette société, dont 99% du chiffre d'affaires est issu de la réalisation de transactions immobilières sur immeubles et fonds de commerce, effectue ainsi des prestations commerciales donnant lieu à l'accueil du public et que le service a admis que la profession d'agent immobilier était une activité commerciale réglementée, elle n'a produit aucune pièce susceptible d'établir que les locaux occupés par la société Barnes auraient changé d'affectation par rapport à leur désignation dans les déclarations produites par l'administration. A cet égard, il ressort des mentions de la déclaration précitée du 22 avril 2013, qui indique que les locaux étaient à usage de bureaux d'agencement, que ceux-ci étaient, au 1er janvier 2013, déjà exploités par la société Barnes, dont il n'est pas allégué qu'elle aurait depuis changé d'activité. Par ailleurs, le ministre fait valoir en se référant aux mentions de l'extrait Kbis qu'il a produit de la société exploitante que l'activité développée par la société Barnes au 93 rue Lauriston, est essentiellement une activité d'étude, de prospective, de conseil et de gestion, laquelle s'exerce dans des bureaux. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a considéré que les locaux de la société 18 Belles Feuilles situés 93 rue Lauriston entraient dans la catégorie des locaux commerciaux définie au 2° du III de l'article 231 ter du code général des impôts. Dès lors, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir de l'exonération de taxe prévue par ces dispositions pour les locaux commerciaux.
Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :
6. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...) ".
7. La société requérante se prévaut, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations de l'instruction référencée BOI-IF-AUT-50-10 n° 110 selon lesquelles " Seuls entrent dans le champ d'application de la taxe les locaux auxquels le public a normalement accès. Sont concernés les locaux de restauration (cafés, brasseries, restaurants, restaurants d'entreprise...) et d'hébergement collectif (hôtels, résidences de tourisme...), les agences commerciales, de voyages, bancaires, les salons de coiffure, les salles de jeu, casinos, discothèques, etc. Sont également concernés par la taxe les complexes sportifs ou de remise en forme à caractère commercial. Ainsi, une salle de sport située dans un ensemble immobilier de bureaux, réservée au personnel travaillant dans cet ensemble, mais exploitée par un prestataire extérieur est imposable dans la catégorie des locaux commerciaux ".
8. Toutefois, ces énonciations, qui ont pour seul objet de commenter la portée des dispositions de l'article 231 ter du code général des impôts qui soumettent à la taxe les locaux commerciaux et non de préciser le régime applicable aux locaux qui, en vertu de la loi, ont le caractère de locaux à usage de bureaux, ne font ainsi pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont il a été fait application dans le présent arrêt. Elles ne peuvent, dès lors, être invoquées sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la société 18 Belles Feuilles n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société 18 Belles Feuilles est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) 18 Belles Feuilles et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (Pôle fiscal parisien 1)
Délibéré après l'audience du 20 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Poupineau, président assesseur,
- M. Doré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 octobre 2018.
Le rapporteur,
V. POUPINEAULe président,
S.-L. FORMERYLe greffier,
C. RENE-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA00749