Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 21 février 2019, Mme F..., représentée par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1605488 du 21 décembre 2018 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler la décision du 29 décembre 2015 par laquelle le maire de la commune d'Orly l'a affectée à compter du 11 janvier 2016 à la direction des services techniques en qualité de gestionnaire de flux ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Orly la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme F... soutient que :
- la requête est recevable ;
- elle a été affectée sur un emploi de gestionnaire de flux dont il est patent qu'il n'existait pas avant qu'elle n'y pourvoie. Par conséquent, il s'agit d'une création de poste et non d'un transfert d'emploi comme l'a indiqué à tort le jugement contesté ;
- la publication du poste sur le site du centre interdépartemental de gestion (CIG) de la ville fait bien mention d'une création et non d'une vacance d'emploi ;
- le poste correspond à des fonctions de technicien et non d'adjoint administratif et ne correspond pas aux postes de son cadre d'emploi ;
- la commune ne démontre pas qu'elle avait un intérêt à la muter sur ce poste en raison des conséquences de ses obligations syndicales en matière de disponibilité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2019, la commune d'Orly, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune d'Orly fait valoir que :
- la notion de création d'emploi est seulement budgétaire et chaque agent public a vocation selon son grade à occuper un ensemble d'emplois, non plus au sens budgétaire mais fonctionnel du terme, c'est-à-dire de " métiers " ou de " fonctions " correspondant à son grade. Mme F... a été affectée sur un emploi de catégorie C qui correspond à son cadre d'emploi et qui correspondait à un réel besoin des services techniques qui ne disposaient d'aucune personne, au sein de leurs effectifs, en charge du suivi administratif de la gestion des fluides des différents bâtiments communaux. L'emploi n'a pas fait l'objet d'une création budgétaire mais d'un redéploiement au sein de la direction des bâtiments de la commune. Ainsi, elle a pu publier un avis de vacance d'emploi nouveau mais sur un poste budgétaire déjà existant pour remplir des fonctions correspondant à des besoins nouveaux au sein de la direction des bâtiments ;
- les missions confiées à Mme F... sont toutes d'ordre administratif et conformes à celles que le statut des adjoints administratifs territoriaux lui donne vocation à exercer ;
- le service était en droit de prendre en considération l'impact des activités syndicales de Mme F... pour décider son changement d'affectation dans l'intérêt du service.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;
- le décret n° 2006-1690 du 22 décembre 2006 ;
- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public,
- les observations de Me E..., pour Mme F..., et celles de Me C..., pour la commune d'Orly.
Une note en délibéré a été enregistrée le 30 novembre 2020 pour la commune d'Orly.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 3 du décret du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux : " I. - Les adjoints administratifs territoriaux sont chargés de tâches administratives d'exécution, qui supposent la connaissance et comportent l'application de règles administratives et comptables. / Ils peuvent être chargés d'effectuer divers travaux de bureautique et être affectés à l'utilisation des matériels de télécommunication. / Ils peuvent être chargés d'effectuer des enquêtes administratives et d'établir des rapports nécessaires à l'instruction de dossiers. / Ils peuvent être chargés de placer les usagers d'emplacements publics, de calculer et de percevoir le montant des redevances exigibles de ces usagers. / II. - Lorsqu'ils relèvent des grades d'avancement, les adjoints administratifs territoriaux assurent plus particulièrement les fonctions d'accueil et les travaux de guichet, la correspondance administrative et les travaux de comptabilité. / Ils peuvent participer à la mise en oeuvre de l'action de la collectivité dans les domaines économique, social, culturel et sportif. / Ils peuvent être chargés de la constitution, de la mise à jour et de l'exploitation de la documentation ainsi que de travaux d'ordre. / Ils peuvent centraliser les redevances exigibles des usagers et en assurer eux-mêmes la perception. / Ils peuvent être chargés d'assurer la bonne utilisation des matériels de télécommunication (...) ".
2. Il ressort des pièces du dossier que le poste de gestionnaire de flux auquel la requérante a été affectée à compter du 11 janvier 2016 est un poste spécialisé dans les domaines de l'énergie, de la consommation d'eau et des télécommunications. Cette fonction implique d'entretenir des relations fréquentes avec les services de l'urbanisme, les services techniques ainsi qu'avec le service de comptabilité et d'informatique. La fiche de poste du centre national de la fonction publique territoriale classe ses missions dans la filière technique de catégorie B. Les missions principales de ce poste ne sont pas celles que le statut particulier du cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux lui donne naturellement vocation à exercer puisqu'il relève normalement de la filière technique et de la catégorie B, alors même qu'une partie de ses attributions est de nature administrative. Par suite, Mme F... est fondée à dire que le poste sur lequel elle a été affectée au motif de l'intérêt du service relève de la filière technique et non de son cadre d'emplois.
3. De surcroît et en tout état de cause, aux termes de l'article 34 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 : " Les emplois de chaque collectivité ou établissement sont créés par l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement (...) " et de l'article 41 de la même loi : " Lorsqu'un emploi permanent est créé ou devient vacant, l'autorité territoriale en informe le centre de gestion compétent qui assure la publicité de cette création ou de cette vacance, à l'exception des emplois susceptibles d'être pourvus exclusivement par voie d'avancement de grade. / Les vacances d'emploi précisent le motif de la vacance et comportent une description du poste à pourvoir. (...) ".
4. Il ressort des dispositions précitées que la définition des emplois communaux et la fixation de leur nombre sont des éléments de l'organisation des services communaux entrant dans la compétence du conseil municipal. La décision en litige du 29 décembre 2015, par laquelle le maire de la commune d'Orly a procédé à la mutation de Mme F... sur le poste de gestionnaire de flux en sa qualité de fonctionnaire titulaire n'a pas été précédée d'une création de poste par le conseil municipal. La circonstance que la requérante occupait déjà un emploi dans la commune et que le poste correspondrait à un redéploiement budgétaire, allégations de la commune qui ne sont étayées par aucune pièce de nature à les justifier, ne saurait pallier cette carence, alors, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, il appartient à l'organe délibérant de la commune de définir les emplois communaux. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions susvisées de la loi du 26 janvier 1984 par la décision de mutation litigieuse doit être accueilli par voie de conséquence.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme F... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
7. Il y a lieu de condamner la commune d'Orly à verser la somme de 2 000 euros à Mme F... au titre des frais qu'elle a exposés et de rejeter les conclusions incidentes présentées en appel sur ce même fondement par la commune d'Orly.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1605488 du 21 décembre 2018 du Tribunal administratif de Melun et la décision du maire de la commune d'Orly en date du 29 décembre 2015 de mutation de Mme F... sur un emploi de gestionnaire de flux sont annulés.
Article 2 : La commune d'Orly versera la somme de 2 000 euros à Mme F... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions incidentes présentées en appel par la commune d'Orly sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... F... et à la commune d'Orly.
Délibéré après l'audience du 26 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme B..., première conseillère,
- M. D..., premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2020.
Le rapporteur,
B. D...Le président,
S.-L. FORMERY
La greffière,
C. DABERTLa République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°19PA00818