Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 11 juin 2021, M. A..., représenté par la SELARL Levy avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2004164 du 30 avril 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a implicitement rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis ou au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet de la Seine-Saint-Denis ne lui a pas communiqué les motifs de la décision implicite de rejet qui lui a été opposé ;
- il a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a méconnu les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain et les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Aggiouri a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant marocain né le 20 octobre 1974, a présenté, par un courrier du 16 octobre 2019, une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " auprès des services de la préfecture de la Seine-Saint-Denis. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a implicitement rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article R. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile : " Le silence gardé par l'administration sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet ". Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article R. 311-3 du même code : " La décision implicite mentionnée à l'article R. 311-12 naît au terme d'un délai de quatre mois ". Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police [...] ". Et aux termes de l'article L. 232-4 du même code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ".
3. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 16 octobre 2019 reçu par les services de la préfecture de la Seine-Saint-Denis le 18 octobre 2019, ayant pour objet une " demande d'examen de situation administrative ", le conseil de M. A... a demandé au préfet qu'un titre de séjour portant la mention " salarié " soit délivré à ce dernier. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé sur cette demande pendant quatre mois. Par un courrier daté du 16 mars 2020 - que M. A... produit pour la première fois en appel, assorti d'un accusé de réception attestant de la notification du pli aux services de la préfecture de la Seine-Saint-Denis le 17 mars 2020 - le requérant a demandé la communication des motifs de cette décision. Il est constant que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense, n'a pas répondu à cette demande dans le délai d'un mois. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que la décision contestée est entachée d'un défaut de motivation.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision contestée.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation retenu ci-dessus, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis réexamine la situation de M. A.... Il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis d'y procéder dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... d'une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2004164 du 30 avril 2021 du tribunal administratif de Montreuil et la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de délivrance de titre de séjour présentée par M. A... sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 17 février 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente de chambre,
- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- M. Aggiouri, premier conseiller.
Rendu public par mise à dispositions au greffe, le 17 mars 2022.
Le rapporteur,
K. AGGIOURILa présidente,
H. VINOT
La greffière,
F. DUBUY-THIAM
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA03255 2