Par un jugement n°2021058/5-2 du 11 février 2021, le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris a annulé ces arrêtés et a enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 12 mars 2021, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris du 11 février 2021 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- c'est à tort que le magistrat désigné par le Président du tribunal administratif a fait droit au moyen tiré de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- les autres moyens soulevés devant le Tribunal administratif ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à M. A... qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant ivoirien né le 28 janvier 1988 à M'G...), est entré en France le 6 novembre 2011 selon ses allégations. Par deux arrêtés du
2 décembre 2020, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois. Le préfet de police fait appel du jugement du 11 février 2021 par lequel le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris a annulé ces arrêtés.
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
3. Si M. A... a soutenu devant le tribunal administratif que l'arrêté en litige porte une atteinte excessive à son droit à son droit au respect de sa vie privée et familiale et qu'il n'aurait pas été tenu compte de l'intérêt de ses enfants, il ne justifie pas de sa présence en France depuis 2011, ni de sa communauté de vie avec Mme F..., réfugiée congolaise qu'il présente comme sa concubine, et de sa contribution à l'entretien et à l'éducation de leur fils né le 13 mars 2020, et de ses deux autres enfants nés le 7 mai 2013 et le 12 décembre 2016, avec lesquels il n'établit d'ailleurs pas être en relation, ni encore de ses liens avec son père et avec les autres membres de sa famille présents en France. Par ailleurs, il a fait l'objet de sept signalisations par les autorités de police depuis 2015 et d'une condamnation à un an d'emprisonnement pour escroquerie en janvier 2018. Le préfet de police est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le Président du tribunal administratif a annulé l'arrêté en litige en se fondant sur une méconnaissance des dispositions citées au point 2.
4. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris.
Sur les autres moyens soulevés par M. A... :
5. En premier lieu, par un arrêté n° 2020-01003 du 23 novembre 2020, régulièrement publié au bulletin officiel de la ville de Paris du 27 novembre 2020, le préfet de police a donné à M. E... B... délégation à l'effet de signer les décisions dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure l'édiction des décisions portant obligation de quitter le territoire avec délai, fixant le pays de destination et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés en litige doit par suite être écarté.
6. En deuxième lieu, les arrêtés litigieux comportent l'énoncé des dispositions légales dont il a été fait application ainsi que des circonstances de fait au vu desquelles ils ont été pris. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces arrêtés doit être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7°) de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les motifs énoncés au point 3.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
8. En premier lieu, aux termes de l'article R. 511-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'interdiction de retour sur le territoire français prononcée en application du sixième alinéa du III de l'article L. 511-1 est notifiée par voie administrative ". Il ne ressort en tout état de cause pas des pièces du dossier que l'interdiction de retour sur le territoire français ait été notifiée à M. A... par un autre mode que la voie administrative. Dès lors, ce moyen doit être écarté.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1, III, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ".
10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a fait l'objet de sept signalisations par les autorités de police et d'une condamnation par le tribunal correctionnel de Paris le
30 janvier 2018 à un an d'emprisonnement pour escroquerie. Par suite, le préfet de police n'a pas méconnu l'article L. 511-1, III, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant que M. A... représente une menace pour l'ordre public, et en prononçant pour ce motif l'interdiction de retour litigieuse.
11. En troisième lieu, comme il a été dit au point 3, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... contribuerait à l'entretien et à l'éducation de son fils. Dès lors, le préfet de police n'a pas méconnu l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
12. Enfin, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'encontre d'une interdiction de retour sur le territoire français.
13. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris a annulé ses arrêtés du 2 décembre 2020.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2021058/5-2 du magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Paris du 11 février 2021 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... A....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 16 avril 2021, à laquelle siégeaient :
Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
M. D..., président-assesseur,
M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mai 2021.
Le rapporteur,
J-C. D...Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
K. PETIT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA01286